Notre collègue Ahmed Abba, correspondant de RFI en langue haoussa au Cameroun, est libérable. Le tribunal militaire de Yaoundé l’a acquitté ce jeudi matin de blanchiment de produit d’un acte terroriste, mais condamné à 24 mois de prison pour non-dénonciation. Ahmed Abba a déjà passé 29 mois en prison. Il avait été arrêté en juillet 2015 à Maroua dans l’Extrême-Nord du Cameroun, où il couvrait la situation de crise liée à Boko Haram.
A l’énoncé de la cour militaire, Ahmed Abba n’a pu s’empêcher de laisser couler des larmes. Il est tombé dans les bras de ses avocats, étouffant dans sa voix emplie d’émotion un « merci » à leur intention. Yves Rocle, le sous-directeur de l’information à RFI, présent à l’audience comme à toutes celles ayant précédé depuis l’interpellation de notre confrère, a pu souffler à quelques journalistes souhaitant recueillir sa réaction : « On a toujours cru à son innocence ».
Le tribunal, comme dans un parfait exercice d’équilibre, avait quelques minutes plus tôt infirmé la condamnation du juge d’instance qui avait sanctionné Ahmed Abba à dix ans de prison ferme pour blanchiment du produit d’un acte terroriste. Il a néanmoins confirmé le délit de non-dénonciation assorti d’une peine de 24 mois de prison ferme, que le correspondant de RFI en langue haoussa a déjà purgée, ce qui induit de manière implicite sa sortie de prison imminente.
Arrêté au cours d’un reportage
Ahmed Abba était détenu depuis plus de deux ans, 29 mois très exactement. Il a été arrêté à Maroua, dans l’Extrême-Nord du Cameroun, le 30 juillet 2015. Ahmed était en reportage, il exerçait son métier de journaliste puisqu’il couvrait la situation de crise liée aux activités du groupe Boko Haram.
La justice camerounaise l’a condamné en première instance à 10 ans de prison ferme pour non-dénonciation et blanchiment du produit d’un acte terroriste. Les juges par contre l’ont acquitté du crime d’apologie du terrorisme, une charge qui aurait pu lui valoir la peine de mort.
Radio France Internationale et ses avocats n’ont cessé au cours de ces très longs mois de clamer l’innocence d’Ahmed Abba. Il a été soutenu dans son combat par de très nombreux journalistes, camerounais et étrangers, des organisations de défense de la profession, des organisations de défense des droits de l’homme.
Il aura fallu attendre quatre mois pour qu’Ahmed Abba puisse voir un avocat. Durant cette période, notre correspondant a subi des sévices. Et il aura fallu attendre le mois de février 2016 pour qu’enfin, le procès commence. Dans un vaste chaos judiciaire. Sans véritable instruction.
On ne compte plus le nombre de renvois, d’audiences au tribunal militaire de Yaoundé. Les murs et le plafond de la salle, Ahmed Abba a eu le temps de les regarder. Yves Rocle, directeur Afrique de RFI, et Cécile Mégie, directrice de l’information, aussi. Car à chacune des audiences, la direction de RFI était présente. Pour dire l’innocence d’Ahmed. Le soutenir dans cette épreuve.
Dans un communiqué, la direction de RFI se dit « soulagée à la perspective de cette libération imminente permise par la justice camerounaise. »
Le texte du communiqué de la direction de RFI
Ahmed Abba, le correspondant de RFI en langue haoussa au Cameroun, va recouvrer la liberté !
La Cour d’appel militaire de Yaoundé a rendu ce jeudi 21 décembre son jugement et condamné Ahmed Abba à 24 mois de prison, mais après 29 mois de détention depuis son incarcération le 30 juillet 2015, il est libérable sans délai.
La Direction de RFI est soulagée à la perspective de cette libération imminente permise par la justice camerounaise.
Elle remercie les avocats d’Ahmed Abba ainsi que les associations de soutien et les nombreuses représentations diplomatiques, françaises et étrangères, d’avoir toujours été présents aux côtés de son correspondant pendant cette épreuve.
Ahmed Abba a été relaxé de l’accusation de « blanchiment de produits du terrorisme ». Seule la charge de « non dénonciation d’actes terroristes » a été retenue par la Cour. L’énoncé du jugement tire les conséquences des audiences en appel qui ont permis de prouver la vacuité du dossier d’accusation sur des faits supposés qui avaient valu, en première instance, à Ahmed Abba d’être condamné à 10 ans de prison.
La Direction de RFI se réjouit, ainsi que tous les collaborateurs de France Médias Monde et tous ceux qui se sont mobilisés autour d’Ahmed Abba, qu’il puisse recouvrer la liberté après 875 jours passés en prison.
Pour la Direction de RFI, en dépit de cette condamnation déjà soldée par les années passées en détention, Ahmed Abba n’a fait que son travail de journaliste.