Un détenu qui a requis l’anonymat raconte ce qui s’est réellement passé à la prison centrale de KONDENGUI.
《La manifestation en elle-même était pacifique. Les ambazoniens étaient très bien organisés. De bonne heure, ils avaient assiégé la cour principale, y chantaient et dansaient. Il y avait des équipes qui se relayaient pour jouer au tambour et utilisaient les couvercles de marmites pour faire du bruit faute d’instruments de musique question de se faire entendre.
Sur leurs pancartes on lisait aisément leurs revendications en rapport avec leur détention prolongée de trois ans sans jugement, ils réclamaient donc leur libération immédiate et demandaient à parler à Laurent Esso.
En journée, plusieurs gars de KAMTO ont rejoint le mouvement lorsque Mamadou Mota a pris la parole. Il faut dire que les ambazoniens l’ont carrément chassé parce qu’il est venu avec un discours pour appeler au calme ce qui n’était pas du goût des ambazoniens.
De 8h à 19h les manifestants étaient là. Même la pluie ne les a pas dissuadé.
L’administration pénitentiaire, incapable de dialoguer, a opté pour l’ouverture des portes du Kosovo question de créer un affrontement entre les grands bandits et les manifestants.
Sauf que les grands bandits sont plutôt sortis non pas pour s’affronter avec les manifestants mais plutôt pour deux objectifs principaux à savoir aller dépouiller les prisonniers de luxe et aller violer les femmes du quartier 5. Dans cette euphorie ils ont vandalisé et Incendié les bureaux des membres de l’administration, la bibliothèque, les ateliers, et l’infirmerie.
Les bandits ont pu accéder au quartier des prisonniers de luxe, ils ont servi des bastonnades à ces gars avant de les dépouiller. Inoni Ephraïm et Urbain Olanguena ont d’ailleurs été blessés.
Les bandits voulaient surtout mettre la main sur Mebe Ngo mais le gars avait fui pour se réfugier dans le quartier 5 des femmes où il y a sa femme. On dit qu’il a même tiré un coup.
Les gars n’ont pas pu accéder au quartier des femmes, la porte là bas est solide le feu seulement.
Ils n’ont également pas pu accéder aux quartiers 11 et 12 réservés à certains ministres et au DDP (Détourneurs des Deniers publics). C’est le DDP, lieutenant-Colonel Mboutou qui a fait plusieurs tirs de sommation pour les dissuader. On se demande comment est-ce qu’un prisonnier a fait pour disposer d’une arme à feu en prison.
Pour une meilleure compréhension il faut rappeler qu’il y a plusieurs quartiers pour les prisonniers de luxe à savoir le spécial 14, le spécial 7, le quartier 11, le quartier 12, et le quartier 13 bis construit par Yves Michel Fotso à l’époque de son séjour à Kondengui avant sa déportation au SED. En dehors des quartiers 11 et 12 logés dans une seule et unique barrière donc, tous les autres quartiers des prisonniers de luxe ont été attaqués
C’est donc lorsque tout avait déjà dégénéré que l’on apprend l’arrivée de Laurent Esso. Il a d’ailleurs envoyé un médiateur discuter avec des leaders ambazoniens mais vu la tournure des événements tout était devenu incontrôlable. Toute la nuit, nous avons été gazés au lacrymogène. Mendo zé a même perdu connaissance.
Si quelqu’un ici en prison te dit qu’il n’a pas failli suffoquer alors il a menti. Il faut noter que les balles crépitaient de partout.
Après l’intervention nocturne des gars du GPIC il y a eu une petite accalmie car chacun était traumatisé par la pulvérisation du gaz.
Mais le calme apparent n’a duré que le temps pour les bandits de reprendre leur esprit après avoir été gazés au lacrymogène puisque ceux-ci ont commencé quelques instants après avoir été gazés à dépouiller tout le monde mais les gars de KAMTO et les ambozoniens étaient les principales cibles dans tous les quartiers.
Au même moment la police utilisait les vidéos qui circulaient sur la toile pour procéder aux arrestations ciblées durant toute la nuit. Aussi les drones survolaient la prison pour repérer les lieux où il y a des mouvements et prendre les images des manifestants à appréhender.
Le matin arrivée, on croyait que c’était fini…jamais
Le matin donc, à l’arrivée des hommes en tenue tous les corps confondus au moins 400, ils avaient l’effectif bomayé. (bomayé veut dire en importante quantité)
La fouille se faisait quartier après quartier.
On nous a fait sortir un par un. Dès que tu traverses la porte il y a plusieurs rangs d’hommes en tenue, chacun te fouille à son tour jusqu’aux parties intimes.
Lorsque la fouille corporelle est terminée on te fait asseoir au sol dans la cour centrale.
Toute la cour était pleine et nous étions tous assis et encerclés par les hommes en tenue.
Une fois tous les prisonniers d’un quartier sortis et assis dans la cour, les hommes en tenue entrent au quartier et procèdent aux fouilles minutieuses local après local, mandat après mandat. Ils ont tout fouillé jusqu’aux poubelles.
Ils détruisaient carrément les mandats (un mandat c’est ce qui sert lieu de couchette, c’est un petit box ayant la forme d’un cerceuil avec environ 2 mètres de long, environ 1 mètre de large et environ un mètre de hauteur) emportaient les ventilateurs, les cuillères, les plats, les ceintures bref, ils emportaient tout et en profitaient pour voler. Oui, ces hommes en tenue sont des grands voleurs devant Dieu et les hommes. Les gars nous ont bien soutiré. Quand ils trouvaient l’argent dans ton mandat ils ramassaient seulement. Personnellement ils ont volés 15000 (quinze mille) dans mon mandat. L’affaire là m’a vexe mal mauvais.
Il faut dire qu’une fois assis à même le sol dans la cour, les bandits ciblaient les gars de KAMTO et les Ambazoniens et les montraient aux hommes en tenue comme les auteurs des troubles.
Même les gardiens de prison se prêtaient au jeu. Beaucoup en ont profité pour régler leur compte aux gars de KAMTO. Le CBDD (Chef du bureau de la discipline des détenus) nommé AKA’A Fabrice s’est prêté au jeu,il dit d’ailleurs à qui veut l’entendre qu’il hait les gars de KAMTO avec toute son âme.
Et dès qu’on te cible, on ne te donne même pas l’occasion de t’expliquer, il y a vraiment eu beaucoup de règlements de comptes puisque dès qu’une personne est ciblée, elle est directement appréhendée et embarquée pour la cour d’honneur et bonjour la sauvagerie des hommes en tenue.
Les gars de KAMTO sont ceux qui ont été le plus finga loin devant les bandits qui ont mis le feu aux bureaux et dépouillés les prisonniers (finga veut dire être indiqué aux hommes en tenue injustement pour être appréhendé)
Je connais personnellement le docteur Christian Fouelefack un type très calme qui ne cherche pas des problèmes aux gens. C’est devant moi qu’on l’a finga, les hommes en tenue se sont immédiatement jetés sur lui pour le bastonner comme un chien. J’ai de la peine pour lui car c’est un gars bien et très large envers les prisonniers.
Ce sont ses localistes qui ont protesté en témoignant de ce qu’il n’a pas participé à ces événements ni de près ni de loin. Il y a aussi un mince gars là, on l’appelle Bonheur, on l’a aussi finga. Bref tous les gars de KAMTO et les ambazoniens étaient systématiquement finga et ce ne sont donc pas tous ceux qui ont été arrêtés qui ont participé aux événements.
Une fois la fouille terminée, nous avons été appelés à regagner nos quartiers. Jusqu’a 19h hier ils étaient encore en train de fouiller et continuaient les arrestations. Ils ont pris au moins 200 personnes
Une fois que nous avons regagné nos quartiers, les bandits très fâchés du fait que leurs effets aient été récupérés même ce qu’ils ont volés dans les quartiers des prisonniers de luxe, se sont retournés une fois de plus contre les gars de KAMTO et les ambazoniens non appréhendés pour les agresser et les dépouiller de ce qui leur restait.
Mais au fond, c’est l’administration qui a été incapable de gérer une toute petite manifestation.
Jusqu’à présent la prison est assiégée.
La police est encore là ce matin de mercredi avec un bon nombre d’effectif.》