Il faut surtout dire et redire que le « LE BULU N’A JAMAIS VOTÉ SON FRÈRE BIYA À 100 % « …TOUT SIMPLEMENT PARCE QUE SON VOTE N’A EN RÉALITÉ JAMAIS REVÊTU UNE QUELCONQUE IMPORTANCE POUR LE RÉGIME DE YAOUNDÉ
C’est d’ailleurs méconnaître l’esprit frondeur de l’Homme du Sud Cameroun, et particulièrement d’Ebolowa où le parti politique d’opposition « La Nationale » du regretté Abel Eyinga avait de nombreux militants et sympathisants, que de penser un seul instant que ces derniers ont toujours voté Paul Biya comme un seul homme à 100%… Ou que les supposés « BULU » de l’arrière pays (dont les villages demeurent enclavés et qui sont particulièrement remontés contre les élites méprisantes dites ressources du parti-État RDC)…ont eux-aussi toujours voté Paul Biya comme un seul homme à 100%, au motif – comme le martèle M. Nganang et ses fans – que les BULU parce que issus « de la forêt » sont particulièrement « bêtes » .
Tout cela relève d’une vue des esprits torturés et réactionnaires qui, du pouvoir en place comme de certains suprémacistes ethniques dits de l’opposition, tiennent absolument à enfermer les Camerounais dans des cages ethno-tribales, dans un schéma d’allégeance puis de dévolution ethnique du pouvoir…Ils ne prennent ainsi jamais la peine de comprendre les particularismes historiques et culturels propres à chacune des composantes des groupes et sous-groupes ethniques, y compris dans ce Sud Cameroun compliqué dont est originaire le dictateur Paul Biya.
Le vote voulu à 100% dans le Sud en faveur de ce dernier participe en réalité d’un processus lent et continu d’accoutumance progressive des camerounais à la fraude électorale. Le moins que l’on puisse dire est que ce pouvoir trentenaire y est brillamment parvenu au-delà de ses espérances, puisque ses détracteurs et opposants extrémistes y adhèrent largement.
Assez d’un procès au faciès instrumentalisé contre tout un groupe ethnique pour des crimes perpétrés par une dictature trentenaire au Cameroun!
C’est véritablement le procès permanent au faciès auquel ont collectivement droit les ressortissants du Sud Cameroun – tous assimilés à des BULU- pour les crimes effectivement perpétrés par une dictature trentenaire servie par des dignitaires issus de toutes les régions du Cameroun.
C’est l’occasion d’inviter ces procureurs ethniques à visiter enfin ce Sud Cameroun sur lequel ils répandent tous les clichés et préjugés intolérants. Ils réaliseront alors que l’idée de « bastion imprenable » véhiculée par le parti-État RDPC au pouvoir participe davantage d’une grossière manipulation de celui-ci, devenue au fil du temps et des frustrations légitimes d’autres camerounais une vue de l’esprit de ceux qui se sont accommodés d’une lecture tribale de la question politique au Cameroun.
En effet il n’y a aucune homogénéité dans les opinions des populations du Sud et dans leur vote. Celui-ci est simplement préempté par une élite brutale qui dispose pour cela de tous les moyens de coercition de l’État depuis 1982. En réalité peu importe le candidat que tel ou tel choisit dans l’isoloir à Bengbis, Meyo centre ou Akom II, celui qui ressortira à l’issue du dépouillement c’est Paul Biya, car entériné avant même que l’électeur du Sud glisse son bulletin dans l’urne (quand il parvient à le faire).
Par ailleurs la désignation générique « BULU » procède d’une autre escroquerie intellectuelle qui arrange et accommode visiblement beaucoup de suprémacistes ethniques. La réalité est celle d’une diversité et D’une pluralité de populations, parfois avec des langues différentes, des référents culturels différents…C’est ce qui échappera toujours à ceux qui ne se donnent pas la peine de comprendre la complexité d’un problème et procèdent par des amalgames et des confusions.
Bien entendu ils ne mentionneront jamais le fait que, comme tant d’autres camerounais, l’Homme du Sud doit afficher son soutien à la dictature de Paul Biya simplement pour assurer sa survie. Car ce pouvoir en 37 ans s’est montré particulièrement brutal et cruel contre ceux qu’il suspectait d’avoir des velléités d’autonomie idéologique dans cette partie du Cameroun. En effet dans sa répartition tribale des zones d’influence politique le régime de Paul Biya a toujours considéré ces populations comme un bétail électoral, et c’est pour cela il avait de la sorte relativement épargné les dissidents originaires des autres ères culturelles et linguistiques du Cameroun de représailles jusqu’à une date récente. Mais étonnamment jamais les suprémacistes ethniques ne le relèvent et préfèrent indexer uniquement ceux des supposés BULU qui affichent leur soutien au régime de Biya, quand bien même des non-BULU tels que Atanga Nji, Réné Sadi et tant d’autres encore excellent ces jours-ci dans le négationnisme et le révisionnisme des crimes contre l’humanité.
Sortir de la guerre de tranchées ethniques en privilégiant une troisième voie salvatrice pour le Cameroun
Mes contradicteurs diront volontiers que je voudrai je cite « Victimiser les BULU ». Loin de moi cette tentation. Les Bulus ne m’ont d’ailleurs pas désigné comme leur porte-parole, pas plus que je me sentirai investi – comme le font systématiquement certains suprémacistes ethniques notamment dans la diaspora – pour tous les rendre coupables des crimes économiques et de sang perpétrés par un régime qui compte en son sein et au plus haut niveau des camerounais originaires de toutes les régions du Cameroun. Certains parmi ces derniers font preuve aujourd’hui dans la crise anglophone d’une cruauté et d’un sadisme qui n’est pas propre à leurs collègues BULU.
Voilà la vérité que nombre d’extrémistes identitaires et communautaires ne veulent délibérément pas dénoncer et préfèrent s’abriter dans un procès collectif au faciès, mêlant pour ce faire des clichés, des préjugés et toute une gamme d’amalgames faciles tels que « Bulu-Hutu ». Parce qu’ils sont dans une stratégie pensée de victimisation bien ancrée dans un certain inconscient camerounais, consistant notamment à dénier d’emblée tout mérite à tout autre compatriote issu d’une composante ethnique différente que la leur, depuis les luttes d’indépendance jusqu’au combat en faveur de l’alternance démocratique au Cameroun.
Pourtant dans la dissidence contre le régime de Yaoundé certains BULU (comme ils disent) en ont payé le prix fort dans le silence et l’indifférence générale de celles et ceux qui s’arrogent les titres pompeux de généraux, colonels et autres commandants de « la résistance à Biya » aujourd’hui. Nombre de ces victimes ignorées se sont vues notamment interdire de fouler le sol du Cameroun par le clan familial au pouvoir à Yaoundé pendant que certains des « résistants » de la dernière heure se pavanaient comme ils voulaient entre l’occident et le Cameroun, réduisant certaines de nos critiques au rang « d’aigreurs d’enfants du sérail » incapables d’avoir des convictions propres.
Autant dire que nous attendons impatiemment qu’un des généraux, colonels et commandants de la nouvelle résistance à Biya tienne sur la durée un discours aussi argumenté, cohérent et critique sur le système totalitaire qui prévaut au Cameroun depuis 37 ans (voire plus) comme ont eu à le faire certains « BULU » (qui y ont parfois laissé la vie), dénonçant sans concession y compris ceux des dignitaires du régime originaires de leur ère géographique, rompant complètement toute espèce de lien avec eux …Alors nous croirons en la sincérité de leur positionnement en faveur d’une alternance démocratique véritable et complète au Cameroun.
Pour le moment nous ne voyons malheureusement – une fois de plus – que des camerounais qui biaisent avec la vérité, monopolisant une noble aspiration collective au changement à des fins partisanes, personnelles et tribales parce que, estiment-ils en off, « c’est leur tour ». Évidemment ils imaginent tous leurs autres compatriotes tellement « Bêtes » comme ces BULUS dont M. Nganang affublent fréquemment de ce diminutif – parce que dit-il « issus de la forêt »- pour ne pas suffisamment comprendre les articulations d’une entreprise politicienne de culpabilisation collective de tout un groupe ethnique, qui est progressivement entrain d’apeurer et même de tétaniser nombre d’entre-nous qui avions courageusement soutenu Maurice Kamto au sortir de cette crise post-électorale, sur la base uniquement de ses valeurs, mérites, et propositions pour le Cameroun.
Nous nous retrouvons aujourd’hui pris littéralement en otage par des extrémistes des deux bords, et nous demandons si la perspective de voir M. Kamto s’installer à la tête du Cameroun dans ce climat délétère n’augure pas d’un embrasement général du pays, puisque bien que reclus dans sa cellule, il ne parvient manifestement pas -comme son bourreau Paul Biya avec les siens – à contenir les envolées haineuses de certains de ses soutiens les plus controversés.
Toutes ces raisons m’amènent raisonnablement à pencher en faveur d’une troisième voie qui ouvrirait les portes de la magistrature suprême à bien d’autres Camerounais que ceux des deux régions et communautés sus-indiquées en « guerre » ouverte de tranchées ethniques.
Joël Didier Engo, Président du Comité de Libération des Prisonniers Politiques – CL2P