S’il est une chose , que Paul Biya ait réussi à inoculer longuement aux privilégiés du régime , c’est incontestablement une certaine cupidité vorace , du fait de la fragilité de leur statut inhérente au jeu permanent de chaises musicales.
En bientôt 37 ans ( 06 novembre 2019) d’un règne totalitaire sans partage , et sans discontinuer, Paul Biya a éliminé et “tué” un à un , presque tous ceux qui étaient susceptibles de lui apporter de l’ombre , en s’approchant de trop près de son fauteuil. À l’instar du génie des Carpates naguère, quand on le barbe il rase systématiquement.
Habile et cynique à la fois , cet admirateur du cardinal Mazarin , qui connaît sur les bouts de doigts son “ Prince “ de Machiavel , connaît trop bien ce dicton du politologue italien selon lequel : “ Vaudrait mieux être craint qu’être aimé. “ . En grand ordonnateur , il organise depuis 36 ans une sorte de ball de faux-culs , répondant à une rotation assez bien synchronisée des hauts-dignitaires du régime .
Dans ce jeu cynique du jeu rotatif de chaises musicales , on prend presque les mêmes à quelques nuances près , et on recommence inexorablement. Les chutes vertigineuses succédant aux promotions tant inattendues que spectaculaires ou éphémères. Les gagnants d’aujourd’hui étant souvent les dindons de la farce d’hier et de demain .
Selon ses états d’âmes , et les exigences des bailleurs de fonds , et parfois en fonction des caprices de sa femme , le tyran récompense , permute , rétrograde , punit les uns et les autres à tour de bras et selon son bon plaisir .
Quand il ne met pas les déchus en réserve de la République, et que ceux-ci échappent à la case prison , Kodengui ou SED, selon la gravité de l’infamie , il peut les nommer à la tête d’une société d’Etat , ou tout simplement à la tête d’un organisme national , comme ce fut le cas avec Joseph Owona un temps tout puissant – secrétaire général de la présidence de la République, avant d’être muté au ministère de la santé , puis du sport pour soupçons d’excès de velléités d’ambitions présidentielles . Paul Biya le soupçonnait de vouloir devenir Kalife en lieu et place du kalife . Tombé gravement malade , alors qu’il n’occupait plus le moindre porte -feuille ministériel , le dictateur s’est rappelé à son bon souvenir , et l’a nommé à la tête du comité de normalisation de la Fecafoot , que ses compatriotes , doués en humour noir , ont tôt fait de baptiser comité de “ mortalisation “ .
Les nouveaux ministres , apprennent leur nomination par la radio , comme du reste leurs collègues déchus leur infortune . Au Cameroun, un ministre dispose de suffisamment de temps pour piller les fonds publics , pas assez pour travailler et faire aboutir ses dossiers . Pour tenir permanent ses ministres en laisse , le dictateur leur rappelle en permanence, que leur situation est transitoire et précaire . Il les maintient dans une situation de psychose permanente , d’insécurité et de dépendance envers son seul bon vouloir , non seulement en suscitant au moyen de la délation , un climat malsain de compétition et de rivalité, mais aussi en attisant des des appétits et des espérances des nombreux aspirants et potentiels rivaux en dehors du gouvernements .
Tout ce climat d’intimidation , accentue dans le sub-conscient des uns et des autres , la peur de la disgrâce toujours presque suivie de sanctions judiciaires. Tout cela est fait à dessein , dans la seule optique de dissuader des potentiels opposants et à terme d’empêcher toute émergence d’un rival sérieux . Prendre un opposant d’hier au gouvernement, présente le double avantage de l’avoir à l’œil , mais celui de le compromettre et lui faire durablement perdre tout crédit .
Une fois utilisé et usé, le tyran qui n’est pas amnésique s’en sépare comme on le le fait d’un papier hygiénique après usage .
Au Cameroun de Paul Biya , ce régime criminogène, a reproduit des millions de petits Paul Biya , qui à force de partage des prébendes, ont eux-mêmes fini par reproduire et prolonger le comportement de leur gourou , à l’instar de ces pieuvres qui déploient des milliers tentacules . Ainsi , même en se débarrassant de Paul Biya , les camerounais ne seraient pas au bout de leur peine . Des milliers d’autres Paul Biya , apparaîtront sur la scène politique camerounaise , pour perpétuer le système .