COMITE DES OBSERVATEURS DES DROITS DE L’HOMME FRANCE
COMMUNIQUE DE PRESSE N°20170628/CODHO France
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Congo-Brazzaville (Afrique centrale): CODHO France demande la libération des opposants politiques détenus à Brazzaville et stopper les massacres des civils du Pool
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Paris, France, le 28/06/2017- Le Comité des Observateurs des Droits de l’Homme France (CODHO France) est très préoccupé par plusieurs assassinats et détentions politiques à Brazzaville au Congo, parmi les détenus politiques figurent monsieur Michel Pika, André Okombi Salissa, Jean-Marie Michel Mokoko, et Paulin Makaya à Brazzaville au Congo, arrêtés respectivement le 31 mars 2017 à Pointe-Noire, le 10 janvier 2017 à Brazzaville, le 16 juin 2016 à Pointe-Noire, et 5 mai 2016 à Brazzaville. Il y a aussi depuis début 2016, les massacres des civils, les pillages et la destruction des biens des populations de la région du Pool par les forces de défense et de sécurité, prétextant la recherche des rebelles.
Détentions politiques
Arrestation et détention arbitraire de l’ex colonel Marcel Pika. –Selon les sources de CODHO, l’intéressé qui a la double nationalité congolaise (Brazzaville) et américaine est poursuivi à cause de ses relation avec l’ex général Jean-Marie Michel Mokoko, lui aussi en détention arbitraire depuis le 31 mars 2017, aux environs de 11h à son domicile du quartier Tchimbamba (ville de Pointe noire).
Selon les sources de CODHO, embarqué torse nu dans un véhicule banalisé (BJ verte) Marcel Pika n’a fait signe de vie et sa famille n’a pas ses nouvelles jusqu’à ce jour. Quelques temps après son arrestation des militaires sont revenus fouiller le domicile de Marcel Pika visiblement à la recherche des armes qu’ils n’ont pas trouvées.
L’ex colonel Pika est âgé de 70 ans, est détenu -sans procès- à Brazzaville depuis plus d’un an. Aucune charge ne pèse contre lui, le CODHO France est particulièrement préoccupé par la détention arbitraire de Marcel Pika car il est diabétique.
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Détention de Okombi-Salissa- Selon les sources de CODHO, l’opposant congolais André Okombi-Salissa a été arrêté, mardi 10 janvier 2017 à l’aube, en périphérie nord de Brazzaville. Candidat à l’élection de mars 2016, il vivait depuis environ six mois dans la clandestinité. Il est accusé par les autorités de « détention d’armes de guerre » et « d’atteinte à la sécurité de l’Etat ».
•Qui est André Okombi Salissa?
-Originaire de «Lékana », dont il est député, dans le département des Plateaux, au sud du pays, André Okombi Salissa a étudié à Kinshasa, « d’où il sort avec un diplôme d’ingénieur avant de se rendre quelques années plus tard à Kharkiv, en Ukraine», comme l’on peut le lire sur son site la plateforme Initiative pour la démocratie au Congo (IDC) dont il est désormais membre. Plusieurs fois ministre du président Sassou-Nguesso, de façon ininterrompue entre 1997 et 2012, André Okombi Salissa, 55 ans, a basculé dans l’opposition à l’approche du référendum constitutionnel de 2015. Président du parti CADD (Convention pour l’action, la démocratie, et le développement), il rejoint ensuite l’IDC, plateforme constituée avec quatre opposants pour barrer la route à la réélection de Denis Sassou-Nguesso qui cumule plus de trente-deux ans à la tête du pays.
•Qu’est-ce que Brazzaville lui reproche?
-André Okombi Salissa a été candidat à la présidentielle du 20 mars 2016. Il a obtenu officiellement 3,96 % au premier tour, là où Denis Sassou-Nguesso en aurait obtenu 60 %. Des résultats contestés par l’opposition. Trois mois après le scrutin, le député de «Lékana » est assigné à résidence, et disparaît.
En décembre 2016, le procureur de la République, André Oko Ngakala, a demandé à l’Assemblée nationale la levée de son immunité parlementaire en l’accusant « d’atteinte à la sûreté de l’Etat » et de « détention illégale d’armes de guerre». Des fusils-mitrailleurs, lance-roquettes et munitions auraient été retrouvés, un mois plus tôt, au domicile de son épouse Gisèle Ngoma, dans l’arrondissement Djiri, à Brazzaville. La demande de levée de son immunité a été refusée, mais une astuce légale a été trouvée pour son arrestation mardi 10 janvier 2017.
André Okombi Salissa est un politicien congolais
. En tant que membre du Parti congolais du Parti congolais
(PCT), il a siégé au gouvernement du Congo-Brazzaville de 1997 à 2012. Il a également été président-coordonnateur du Comité d’action pour la défense de la démocratie – Mouvement de la jeunesse (CADD-MJ). Après son renvoi du gouvernement, il a déménagé dans l’opposition, devenant le président de l’ Initiative pour la démocratie au Congo
et candidat à l’ élection présidentielle de 2016
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L’ex général Mokoko détenu illégalement à Brazzaville – Selon les sources de CODHO France, formellement inculpé, l’opposant congolais Jean-Marie Michel Mokoko, candidat malheureux à la présidentielle du 20 mars 2016, est accusé d'”atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat.
L’arrestation de Jean-Marie Michel Mokoko a eu lieu le jeudi 16 juin 2016. L’ex général Mokoko a été présenté au procureur de la République qui, suivant (le) réquisitoire introductif, qui a ouvert une information devant le cabinet du doyen des
juges d’instruction pour deux chefs d’inculpation : atteinte à la sûreté intérieure de l’État et détention illégale d’armes et munitions de guerre”
Les mêmes sources de CODHO précisent, des chefs d’inculpation datant de 2007 à 2016, l’ex général Mokoko a réfuté en bloc les chefs d’inculpation retenus contre lui. L’ex général Mokoko et monsieur Okombi Salisssa étaient en garde à vue à la Direction générale de surveillance du territoire (DGST) avant d’être menotté pour aller au parquet de Brazzaville. Le 9 juin 2016, le ministre congolais de la Justice, Pierre Mabiala, avait réclamé l’accélération de la procédure contre cet ex-officier de l’armée.
Ancien chef d’Etat-major des armées du Congo de 1987 à 1993, passé par l’École supérieure militaire (ESM) de Saint-Cyr, en France, l’ex général Mokoko a été jusqu’à début février 2016 représentant spécial de la présidente de la Commission de l’Union africaine (UA) en Centrafrique. Il a démissionné début février 2016 de son poste de conseiller du président Sassou Nguesso chargé des questions de paix et de sécurité, qu’il occupait depuis 2005, pour se porter candidat à l’élection présidentielle du 20 mars.
Jean-Marie Michel Mokoko a recueilli officiellement moins de 14 % de voix à l’élection présidentielle de mars 2016. Initialement prévu en juillet, ce scrutin a été ramené au 20 mars par M. Sassou Nguesso qui l’a remporté avec plus de 60 % des voix, résultats officiels, qualifiés de “forfaitures” par cinq candidats d’opposition, dont l’ex général Mokoko.
Jean-Marie Michel Mokoko a été mis en cause dans une vidéo tournée en 2007 qui le montre discutant d’un plan visant à chasser M. Sassou Nguesso du pouvoir avec un homme dont on ne voit pas le visage et se présentant comme appartenant au service de renseignement extérieur de la France (la DGSE-Direction générale de sécurité extérieure). Interrogé sur la question, l’ex général Mokoko avait déclaré en mars 2016, qu’il s’était fait “piéger” dans cette affaire de vidéo, ajoutant que la question avait été “réglée en famille” avec le président Sassou Nguesso. Il s’était ainsi dit étonné que cette affaire ressurgisse. À la veille de l’élection présidentielle, l’ex général avait été entendu plus d’une fois dans ce dossier par la police.
L’ex général Jean-Marie Michel Mokoko, né le 19 mars 1947 à Mossaka
, est un officier supérieur et homme politique congolais, ayant exercé les fonctions de chef d’état-major des armées du Congo-Brazzaville
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Détention et condamnation de monsieur Makaya – Monsieur Paulin Makaya, chef d’une petite formation politique a été condamné fin juillet 2016 à deux ans de prison ferme pour « incitation aux troubles à l’ordre public » après avoir organisé et participé à une manifestation non autorisée le 20 octobre 2015.
Selon les sources de CODHO France, monsieur Makaya avait appelé au boycott du référendum sur la modification de la Constitution de la République avant de dénoncer les fraudes sur le déroulement du scrutin référendaire du 25 octobre. Le 30 octobre, des forces de défense et de sécurité ont débarqué à son domicile avant de perquisitionner sa maison à son absence et celle de son Avocat. Lundi 23 novembre, Makaya a été arrêté par les forces de défense et de sécurité à Brazzaville dans le bureau du procureur de la République, accompagné de son Avocat, alors qu’il venait déposer une plainte contre X pour violation du domicile et tentative d’assassinat (contre la perquisition domiciliaire du 30 octobre). Le 30 novembre, Paulin Makaya a été transféré à la maison d’arrêt de Brazzaville.
Monsieur Makaya a fait face à des soldats armés sur la route de Madingou le 29 août 2015. Il est l’unique homme politique de l’opposition congolaise à avoir manifesté avec ses militants le 20 octobre 2015 contre le référendum. C’est sans doute ce qui lui a valu d’être mis derrière les barreaux le 1erdécembre 2015. Cet homme est Paulin Makaya, président du parti UPC (Unis pour le Congo).
Répression systématique des opposants à Brazzaville.
Par la suite, plusieurs membres et sympathisants des partis politiques de l’opposition ont soit été tués soit détenus lors des manifestations contre le référendum constitutionnel d’octobre 2015 ou la campagne électorale de 2016. En ce qui concerne les détenus en rapport avec l’élection présidentielle de 2016 l’on peut citer Jean Ngouabi, Anatole Linbongo Ngoka, Christine Moyen, et Dieudonnée Dhird, tous membre de campagne de monsieur Jean-Marie Michel Mokoko, et Raymond Ebonga et Serge Blanchard Oba, tous deux membres de campagne de monsieur André Okombi Salissa.
1. En ce qui concerne les assassinats parmi les opposants politiques, plus de 18 manifestants contre la modification constitutionnelle ont été tués par les forces de défense et de sécurité en utilisant des gaz lacrymogène et des balles réelles le 20 octobre 2015. Les victimes s’étaient exprimées par des marches organisées par l’ensemble des partis politiques de l’opposition contre la modification de la Constitution, permettant au président de la République de briquer un nouveau mandat.
2. D’autres militants des partis politiques de l’opposition ont été arrêtés à Brazzaville le 25 mars 2015 alors qu’ils tentaient d’organiser une conférence de presse qui avait avortée.
3. Plus de 10 jeunes membres et sympathisants des partis politiques de l’opposition ont été arrêtés à Pointe-Noire le 20 mars 2015.
Les massacres des civils dans la région du Pool.
Par ailleurs, la situation de crise humanitaire préoccupe beaucoup CODHO France. C’est une crise qui dure depuis un an, et dont on ne parle quasiment pas dans les médias ou très peu. La crise du Pool, ce département du sud du Congo-Brazzaville secoué par des combats depuis la réélection contestée du président Denis Sassou N’Guesso, en avril 2016. Ils opposent forces de défense et sécurité, et les partisans de l’ancien chef rebelle, Frédéric Bintsamou alias le Pasteur Ntumi[1]. L’essentiel des combats se déroule à huis clos, sans journalistes et sans humanitaires. Dans certains villageois, l’on ignore combien, vivent reclus dans ces zones, comme pris en étau. D’autres, 20 000 au minimum, estiment des survivants, ont fui dans les départements voisins. Des victimes survivantes décrivent les terribles conditions de vie de ces déplacés dans le département de la Bouenza, où les victimes sont abandonnées à leur triste sort.
Le CODHO signale que le tableau est très sombre de la situation du droit international des droits de l’homme au Congo-Brazzaville ; 2016 et premier semestre 2017 a marqué « une régression totale » en la matière, avec de nombreux cas de tortures, d’arrestations et une augmentation inédite du nombre de prisonniers politiques et les massacres des civils dans la région du pool habitée essentiellement par des populations « bakongo », à l’opposé des populations « bangala » dont le président de la République fait partie.
Aujourd’hui encore une chose est sûre, « les habitants du Pool, dans le sud du pays, vivent » « dans une insécurité totale ». La communauté internationale a le devoir moral d’arrêter ce génocide au Congo-Brazzaville qui a été planifié, programmé et savamment exécuté par un commando ou une milice tribale au service du président de la République, constituée pour massacrer des paisibles populations, y compris des actes de torture, des viols des femmes, des enfants, des personnes âgées, et le pillage et la destruction des villages d’une région entière.
Toujours selon les sources de CODHO France, il est aujourd’hui difficile de sillonner les localités du Pool les plus affectées pour comprendre les ressorts de la crise actuelle, et documenter plus précisément les violences : « C’est le black-out dans le Pool. Les autorités communiquent très peu ou pas du tout, parfois dans le mensonge. Ce qui est signalé dans le Pool s’arrête à «Kinkala », le chef-lieu du département. Or à partir de Kinkala, il est difficile d’apprécier la réalité à l’intérieur du Pool. La situation est beaucoup plus développée à l’intérieur du Pool ».
Selon les sources locales de CODHO France, entre 10 000 et 30 000 déplacés
parmi les populations du Pool ont trouvé refuge loin de leur village depuis le début de la crise. Les autorités nationales n’accordent aucune autorisation aux ONGs des droits de l’homme à se rendre dans cette région du Pool.
Le CODHO France demande instamment à la Communauté internationale d’agir vite avant qu’il ne soit tard, pour stopper dans la vie des victimes civiles, les effets de cette crise humanitaire et des droits de l’homme au Congo-Brazzaville que les autorités nationales tentent désespérément à faire taire. Ne pas agir avec diligence pour arrêter les exactions graves, notamment les massacres des civils et le pillage de leurs biens est un déni de solidarité avec les victimes innocentes, et une non assistance à personne en danger.
Contacté pour avoir son point de vu sur la situation sécuritaire et humanitaire au Congo-Brazzaville, Me N’Sii Luanda, président de CODHO France déclare en substance ce qui suit : « les autorités du Congo-Brazzaville se trompent énormément d’époque d’une part en massacrant continuellement des civils, pillant leurs biens et détruisant leurs villages au non de ce qu’elles appelleraient des opérations pour traquer le «Pasteur Ntumi » dans la région du Pool, et d’autre part en assassinant, en forçant en exil, et en détenant arbitrairement plusieurs leaders, membres et sympathisants des partis politiques de l’opposition à Brazzaville. Les frontières nationales se réduisent ou disparaissent de plus en plus face à la justice internationale, notamment la compétence universelle, et avec elles disparaissent les forteresses des tortionnaires et autres dictateurs après Slobodan Milošević, Bokassa, Pinochet, Hissène Habré, etc. Il est temps que les autorités du Congo –Brazzaville s’inscrivent dans la logique de paix en stoppant l’actuelle épuration ethnique du Pool, et de la justice pour les victimes des violations du droit international des droits de l’homme, notamment l’accès à la juste et à la réparation pour les membres des familles des opposants et paisibles civils assassinés à Brazzaville, Pointe-Noire, et les populations civiles dans la région du Pool victimes
des graves exactions, principalement à raison de leur appartenance tribale, les victimes survivantes des massacres, des pillages et des destructions de leurs biens à Brazzaville et dans le Pool.»
Fait à Paris, France, le 28/06/2017.
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Comité des Observateurs des Droits de l’Homme France (CODHO France)
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