Une observation attentive des résultats communiqués depuis lundi aux différentes rédactions parisiennes -notamment Jeune Afrique – par l’autocrate de Brazzaville laisserait davantage apparaître que sa machine à fraude se grippe singulièrement, malgré le black-out général imposé à tous les réseaux du pays depuis samedi.
En effet sur 117 637 votants. 297 143 voix pour Sassou Nguesso ne font pas 61, 4 % comme annoncés, mais 26.6 %.
Ainsi donc même les chiffres fabriqués et auto-attribués en comité restreint dans son palais par Dénis Sassou Nguesso résistent désormais à sa fraude.
C’est pathétique!
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques (CL2P)
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Denis Sassou-Nguesso en passe de réussir son « coup K.-O. »
Il avait promis de l’emporter en « un coup K.-O. », dès le premier tour. A en croire les premiers résultats partiels, la partie semble gagnée pour le président congolais, Denis Sassou-Nguesso. D’après l’estimation de la Commission nationale électorale indépendante (CNEI) portant sur environ 59 % du corps électoral, le chef de l’État arrive en tête du scrutin de dimanche 20 mars avec 67,02 % des suffrages.
Avec 16,81 % des voix, l’opposant Guy-Brice Parfait Kolelas est bon deuxième, loin devant le général Jean-Marie Michel Mokoko, crédité de 7,5 % des suffrages. La participation s’élèverait à 65,74 %.
Ces résultats ne comprennent pas ceux de Pointe-Noire, capitale économique du pays et bastion de l’opposition.
Depuis dimanche, toutes les communications sont coupées au Congo, Internet et SMS compris, « pour des questions de sécurité et de sûreté nationales » selon les mots du ministère de l’intérieur.
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Black-out électoral au Congo-Brazzaville
Par Christophe Châtelot (Brazzaville (envoyé spécial) – LE MONDE
L’ambiance était électrique, dimanche 20 mars, dans la cour du collège d’enseignement général Angola libre du quartier Makélékélé de Brazzaville. Mais ce terme était-il tout à fait approprié ? Il n’y avait pas de lumière dans les salles de classe à l’heure du dépouillement des bulletins lors du premier tour de l’élection présidentielle au Congo. Les votes ont été comptés sur le tableau noir à la lueur de lampes torches ou de téléphones portables. Ceux-ci retrouvaient là une forme d’utilité, depuis l’ordre des autorités de bloquer toutes les communications jusqu’au lendemain soir.
Mais dehors, dans la pénombre, une centaine de personnes vociféraient contre les « tricheurs du pouvoir ». Dans leur état d’excitation avancé, difficile de cerner la nature précise de la « tricherie » incriminée. Au cœur du fief de l’opposant Guy Brice Parfait Kolelas – proche du Front national français –, certains évoquaient de faux bulletins favorables au président Denis Sassou-Nguesso (« DSN »). D’autres évoquaient la carte d’un électeur inscrit dans ce centre de vote, mais retrouvée dans de mauvaises mains au nord de la ville, forteresse politique de DSN, candidat à sa propre succession après plus de trois décennies au pouvoir presque sans interruption, hormis la parenthèse d’un mandat dans les années 1990 conclue par une guerre civile.
Mais dimanche soir à Makélékélé, la petite foule ne cherchait en réalité qu’à s’enflammer, exprimer un ras-le-bol qui se répand dans le pays à l’occasion de ce scrutin, théoriquement ouvert grâce à la participation de neuf candidats, dont cinq farouchement opposés au président Sassou.
« Trente-deux ans, ça suffit ! Cette fois-ci, ils ne voleront pas nos voix, on va défendre nos votes », hurlait Georges, un mécanicien d’une trentaine d’années, en référence aux deux précédents scrutins remportés dès le premier tour, à plus de 75 %, par Sassou-Nguesso, dans des conditions douteuses.
Lacrymogènes
Puis tout est allé très vite. Une centaine de policiers armés comme pour la guerre se sont déployés sur l’avenue devant le collège, certains ont pénétré dans la cour qu’ils ont vidée en un tournemain. La foule a détalé sous les lacrymogènes. C’était l’objectif. Les fusils à pompe n’ont pas été armés, ni la mitrailleuse 14.7 montée sur un des pick-up. En octobre 2015, au moins quatre personnes (près de vingt selon certaines sources) avaient été tuées lors de manifestations durement réprimées pendant le référendum organisé, précisément, pour permettre au président Sassou-Nguesso de se présenter à ce scrutin.
Pendant ce temps, dans quatre salles de classe du collège, le dépouillement continuait. « C’est ça les Congolais : ça fait du bruit ! », lâchait, fataliste, Bikoy Batoumeni, qui dirigeait sa petite équipe du bureau de vote comme un maître d’école fait répéter la leçon à ses élèves. « Quand l’encre dépasse du carré, le bulletin est… ? », demandait le président. « An-nu-lé », répondaient les délégués pendant que le président écartait le bulletin incriminé.
Dans ce bureau, le résultat fut sans appel : sur 995 inscrits, 562 votes exprimés dont 482 en faveur de Guy Brice Parfait Kolelas. Cet ancien ministre de M. Sassou-Nguesso est passé dans l’opposition quand le président imposait la réforme constitutionnelle, en octobre 2015. Mais le raz-de-marée Kolelas au collège Angola libre n’a rien de représentatif. Seulement, l’énervement des militants de Makélékélé tient à la certitude que leurs votes ne seront pas pris en compte. Que tout est joué d’avance. Et que le président fera tout pour atteindre son objectif de victoire au premier tour.
Face à « DSN », l’opposition a choisi la stratégie de l’« émiettement » pour « le forcer au ballottage »
Dimanche soir, il était impossible d’avoir la moindre idée du déroulement du scrutin hors des bureaux visités. Ni de la date de la publication des résultats. Deux jours auparavant, une note signée du ministre de l’intérieur, Raymond Mboulou, a ordonné aux compagnies de téléphone de « bloquer toutes les communications, Internet et SMS compris, pour les journées du 20 et 21 mars (…) pour des questions de sécurité et de sûreté nationales ». « Sauf exception », précise le document, qui évoque une liste restreinte de numéros autorisés. La circulation automobile était également limitée aux véhicules disposant d’autorisations spéciales, données au compte-gouttes.
« Pour un président qui se vante d’avoir garanti la paix et la sécurité dans le pays, cette décision n’est-elle pas contradictoire ? », demandait le général et candidat Jean-Marie Michel Mokoko. Cet ancien chef d’état-major des armées s’est rangé lui aussi dans le camp des anti-Sassou. « Sans téléphone ni Internet nous sommes déconnectés du vote », se plaint-il. « Cette élection, c’est du grand n’importe quoi ! », a-t-il lâché dans la cour de son bureau de vote de Poto-Poto, un quartier du centre de Brazzaville, renouvelant sa défiance totale vis-à-vis de la commission électorale chargée de compiler les résultats.
Face à la machinerie présidentielle, déployée à l’échelle nationale, l’opposition avait conçu une stratégie « dite de l’émiettement, pour le forcer au ballottage », selon Gérard Boukambou, l’un des porte-parole du général Mokoko. Cinq candidats s’étaient engagés à voter en faveur du mieux placé d’entre eux, au second tour. Pendant la campagne, chacun devait chasser sur ses terres afin de ne pas disperser de faibles moyens matériels, face au rouleau compresseur du pouvoir ; et ainsi concentrer les votes, tout en présentant des délégués dans les 5 367 bureaux de vote du pays. Ce dernier point, crucial, devait permettre d’organiser un système de comptage parallèle des voix, recours classique des oppositions contre la fraude. La coupure des télécommunications a fait avorter le projet.
Christophe Châtelot – Brazzaville (envoyé spécial)