France-Afrique: Aide Réelle ou Kool-Aid?
Par Olivier Tchouaffe, PhD, Porte-parole du CL2P
La récente visite du président Emmanuel Macron en Afrique doit être (re)placée dans une perspective historique si nous voulons déconstruire les anciennes filiations et comprendre ce dont le jeune président français est réellement le nom; en relation notamment avec l’infâme “Francafrique”.
Ce jeune président est-il purement l’achèvement de la société du spectacle, du simulacre sécrété par des cabinets de communicants et leur corollaire du vide nihiliste, dont nous ont tant accoutumé les dictateurs Africains? Ou un véritable innovateur, que veut révolutionner, et entre-autre mettre fin à la Francafrique; une sorte de nouvelle manière voulue radicale de gouverner en mode start-up nations? Ou bonnement une (autre) manipulation cynique du vieux statu quo?
En effet le général Charles de Gaulle avait déclaré que la France n’a pas d’amis mais rien que des intérêts. Cette citation devint centrale à la notion de realpolitik globale, car le général de Gaulle, plus que quiconque, connaissait la nature des amitiés creuses et des promesses rompues.
Lors de sa récente visite sur le continent africain, Emmanuel Macron est apparu plus sincère que les présidents français récents; à l’instar d’un François Mitterrand dont la joute verbale avec le président Thomas Sankara, le Che Guevara Africain, a pu d’ailleurs faire ombrage à la visite de Macron, apparaissant presque comme un étrange spectre. Il n’empêche, M. Macron a définitivement paru plus sincère que Nicolas Sarkozy et son discours condescendant de Dakar en 2007.
Dès l’entame de sa visite à Ouagadougou M. Macron a affirmé qu’il appartient à une génération qui ne vient pas en Afrique pour dire aux Africains ce qu’il faut faire. Notre organisation a particulièrement apprécié lorsque le président français a qualifié l’esclavage des migrants africains en Libye comme un «crime contre l’humanité », puis a déclaré que l’Union Européenne (UE) et l’Union Africaine (UA) «lanceraient des actions militaires et policières concrètes sur le terrain pour démanteler les réseaux d’esclavagistes “. Paradoxalement c’est le même Emmanuel Macron qui avait reproduit l’esprit et la rhétorique du président Donald Trump la semaine d’avant quand il a déclaré à une marocaine qui avait besoin de papiers pour pouvoir s’occuper de ses parents malades en France: “tu dois retourner dans ton pays” parce que tu n’es “pas en danger au Maroc” (…) la France ne peut pas “donner des papiers à tout le monde”.
Et c’est toujours le même président Macron qui a ajouté que le retour des œuvres d’art africains deviendrait “une priorité absolue” pour la France au cours des cinq prochaines années, et a explicitement dit: “Je ne peux pas accepter qu’une grande partie du patrimoine culturel de plusieurs pays africains se trouve en France.”
Malgré toutes ses bonnes intentions, n’oublions jamais qu’il s’agit de politique et non de charité.
Et M Macron ne peut effacer le fait qu’il y a au moins 10.000 soldats français et forces spéciales patrouillant le continent; que la France est intervenue plus de 30 fois sur le continent depuis la décolonisation de l’Afrique, puis que ses troupes sont stationnées dans plusieurs de ses anciennes colonies. Le Burkina Faso n’est d’ailleurs pas une exception en la matière, où le contingent français participe à l’opération antiterroriste Barkhane, qui a débuté en 2014. Mardi, répondant à une question à l’université, «pourquoi la France envoie plus de soldats que d’étudiants africains»? Le président français a aussitôt répliqué que les troupes ne devraient être “applaudies” que pour leur service. De plus, le président Macron a réduit le budget français pour l’aide au développement de 0,5% à 0,38%, bien moins que celui alloué par l’Allemagne qui s’élève à 0,70%.
Aussi il faut craindre que, bien au-delà de l’affichage jeune et libéral du Président Macron, la sombre réalité interventionniste et paternaliste de la France reprenne vite le dessus dans l’esprit des jeunes qu’il a rencontrés en Afrique, qui savent et comprennent parfaitement qu’un locataire de l’Élysée – fut-il jeune et volontariste comme eux- ne changera fondamentalement rien au vieux tropisme colonial, voire raciste, qui sous-tend cette vieille relation; avec son lot de tyrans imposés aux peuples, ou de prédateurs néo-colons jouissant de quasi-monopoles dans divers secteurs stratégiques des pays africains francophones.
Il appartient donc d’abord et uniquement aux Africains, notamment les jeunes, d’imprimer une autre relation plus humaine, respectueuse, équilibrée, et cordiale avec la France.
Le CL2P milite précisément en faveur de façons plus originales de gérer les conflits avec de véritables moyens créatifs pour parvenir à un consensus politique, plutôt que de se retrouver coincés dans une illusion de consensus, de «Kool Aid», et d«’unité nationale» dont nos dictateurs sont si friands et nous ont littéralement abreuvés depuis les indépendances. En pratique, cela signifierait que nous ne pourrons pas compter sur de réels projets créatifs pour l’avenir, mais encore maintenus dans une politique de la soumission au présent, avec la persistance de moyens coercitifs d’adaptation à la précarité et aux logiques prédatrices du néolibéralisme, dont aux dictatures perpétuels: ce que l’intellectuel Américain, Lauren Berlant, a appelé l’optimisme cruel.
Regardons donc au-delà de l’affichage jeune et libéral du Président Macron!
Olivier Tchouaffe, PhD, Porte-parole du CL2P
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English version
France-Africa: Real Aid or Kool-Aid?
By Olivier Tchouaffe, PhD, Spokesman of the CL2P
President Emmanuel Macron’s recent visit to Africa must be understood within a historical perspective to deconstruct the historical filiation of what the young French president is really the name of, particularly, in relationship with the infamous “Francafrique.” A knowledge, if this young president is the completion of the society of the spectacle, public spins and simulacra of cabinets of communication and thus of the nihilistic void we have accustomed to by African dictators or an innovator who wants to revolutionize, among others, to put an end to the Francafrique. Precisely, a radical way to govern-start up nation? – Or a cynical manipulator of the status-quo?
Hence, General Charles de Gaulle is on record to have said that France has no friends only interests. That quote became central to notion of global realpolitik, as General De Gaulle, more than anyone, knew about the nature of hollow friendships and promises broken.
Indeed, in his recent visit to the continent of Africa, Emmanuel Macron did appear more sincere than recent French presidents, such as Francois Mitterrand whose verbal joust with the president Thomas Sankara, the African’s Che Guevara, and hung over Macron’s visit like an uncanny specter. More, macron was definitely more sincere than Nicolas Sarkozy and his condescending speech in Dakar in 2007.
From the beginning, macron argues that he comes from a generation that does not come to Africa to tell Africans what to do. Moreover, the CL2P, equally, appreciate, Emmanuel Macron, the French president, who described the abuse of migrants as “a crime against humanity” and said that the EU and AU would “launch concrete military and policing action on the ground to dismantle those networks”. At the same time, Macron channeled the spirit of President Donald Trump last week telling a Moroccan woman who needed papers to care for her sick parents that “you have to go back to your country” because you’re “not in danger in Morocco” and France can’t “give papers to everyone.
Nevertheless, the same Macron added that the return of African artifacts will become “a top priority” for France during the next five years, and claimed that: “I cannot accept that a large part of cultural heritage from several African countries is in France.”
Despite of all his good intentions, however, this is about politics not charity.
Consequently, Macron could not erase the fact that there are at least 10.000 French troops and Special Forces patrolling the continent. France has intervened military more than 30 times in the continent since the decolonization of Africa and has its troops stationed in a number of its former colonies.
Burkina Faso is not an exception, where French contingent participates in the anti-terrorism Operation Barkhane, which commenced back in 2014. On Tuesday, while responding to a question at the university why France sends more soldiers in than it receives African exchange students, the French president stated that the troops should only be “applauded” for their service.
Plus, Macron actually decreased French’s budget for Aid from 0.5% to 0.38% less than Germany 0.70%.
Consequently, beyond the young and liberal display of President Macron, the dark interventionist and paternalistic reality of France will certainly take over in the minds of young people he met in Africa, who know and understand perfectly that a tenant of the Elysée – was it young and voluntarist – will fundamentally change nothing to the colonial or even racist tropism that underlies this old relationship, with its lot of imposed tyrants or predators enjoying quasi-monopolies in various sectors strategic.
It belongs first and only to Africans, especially young people, to print another more humane, respectful, balanced, and cordial relationship with France.
The CL2P always militates for original ways to handle conflicts with creative ways to achieve political consensus rather than the illusion of consensus and the “Kool Aid” which our dictators have made us drink since independence. In practice, no creative project for the future but a politics of submission to the present which means ways to adapt to precarity and the predatory logics of neoliberalism and dictatorships and what Lauren Berlant calls: cruel optimism.
Let’s look beyond President Macron’s young and liberal display!
Olivier Tchouaffe, PhD, Spokesman of the CL2P