Attendu avec une grande impatience par les partisans de Laurent Gbagbo, qui restent nombreux en Côte d’Ivoire malgré son absence depuis dix ans, ce retour accepté par le président Ouattara est un signe fort de sa volonté d’œuvrer à la « réconciliation nationale » dans un pays à l’histoire récente marquée par les violences politiques. « MM. Gbagbo et Blé Goudé sont libres de rentrer en Côte d’Ivoire quand ils le souhaitent », a déclaré le président Ouattara à l’ouverture du premier conseil des ministres de son nouveau gouvernement formé mardi. « Des dispositions seront prises pour que Laurent Gbagbo bénéficie, conformément aux textes en vigueur, des avantages et indemnités dus aux anciens présidents de la République », a-t-il ajouté en précisant que « ses frais de voyage » et ceux « des membres de sa famille seront pris en charge par l’État de Côte d’Ivoire ».
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Prééminence de l’esprit de réconciliation nationale
Le chef de l’État n’a pas évoqué la condamnation en Côte d’Ivoire de M. Gbagbo à 20 ans de prison pour le « braquage » de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) pendant les violences post-électorales de 2010-2011. Mais Amadou Coulibaly, nouveau ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, a ensuite laissé entendre que cette condamnation serait levée. « Je m’en tiens aux propos du chef de l’État, ça me semble assez clair : on ne va pas offrir le voyage à Gbagbo pour le mettre derrière les barreaux », a-t-il affirmé à la presse. Michel Gbagbo, fils de Laurent et député, a tenu « à saluer cette prise de parole du président Alassane Ouattara car elle va dans le sens de l’apaisement, de la réconciliation nationale et finalement de la juste application des textes de loi ivoiriens ». Le président Ouattara est « dans une disposition d’esprit pour aller à la réconciliation et à la paix », a de son côté affirmé Kouadio Konan Bertin, ministre de la Réconciliation nationale. « Notre souhait aujourd’hui est qu’il retourne auprès de sa famille, de ses militants et des Ivoiriens pour participer à la réconciliation nationale tant souhaitée par les Ivoiriens », a estimé N’Goran Djedri, un des dirigeants du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), principale formation d’opposition alliée aux pro-Gbagbo.
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Une juste conséquence de l’acquittement obtenu à la CPI
La Cour pénale internationale (CPI) a confirmé il y a juste une semaine l’acquittement, prononcé en 2019, de Laurent Gbagbo, définitivement reconnu non coupable de crimes contre l’humanité, ouvrant la voie à son retour en Côte d’Ivoire après une décennie d’absence. Les juges ont rejeté l’appel de la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, contre les acquittements de M. Gbagbo et d’un de ses proches, Charles Blé Goudé, ex-chef du mouvement des Jeunes Patriotes, prononcés en janvier 2019 à l’issue d’un procès pour crimes contre l’humanité liés aux violences post-électorales en 2010 et 2011.
M. Gbagbo, premier ancien chef d’État jugé par la CPI, et M. Blé Goudé ont toujours clamé leur innocence dans ces crimes ayant fait 3 000 morts en Côte d’Ivoire, lors de violences nées du refus de M. Gbagbo de reconnaître fin 2010 la victoire à la présidentielle de son rival Alassane Ouattara. Au nom de la « réconciliation nationale », les autorités avaient octroyé fin 2020 à Laurent Gbagbo deux passeports, un ordinaire et un diplomatique, et l’intéressé avait alors exprimé son souhait de rentrer dès décembre.
Ce retour, qu’il avait ensuite annoncé pour « bientôt », restait suspendu à la décision de la CPI, mais il l’était aussi à un feu vert définitif du pouvoir désormais acquis. Il va intervenir, à une date qui reste à fixer, dans un contexte d’apaisement de la vie politique ivoirienne, un mois après des élections législatives qui se sont déroulées dans le calme et sans contestation de rue, contrairement à la présidentielle d’octobre 2020, qui avait donné lieu à des violences ayant fait une centaine de morts. Ces élections auxquelles a participé le Front populaire ivoirien (FPI) de Laurent Gbagbo qui boycottait tous les scrutins depuis dix ans, ont été remportées par le parti au pouvoir, mais ont aussi permis le retour de 91 députés d’opposition à l’Assemblée nationale.
Par Le Point Afrique (avec AFP)