Cette phrase, la dernière d’un Afro-Americain menottes aux mains et étranglé par le genou d’un policier blanc sur sa gorge est, en plein Covid-19, la preuve que le coronavirus vient ajouter de la misère dans la vie déjà difficile des pauvres, des défavorisés historiques et de ceux dont la vie ne compte pas.
I can’t breathe est une respiration qui se sent courte , qui se fait rare, puis, qui s’absente une fois le cœur en mode off parce que court-circuiter par le pouvoir raciste blanc, un racisme chronique, une seconde nature qui manifeste son virilisme jouissif et meurtrier sur des nègres.
I can’t breathe!
Ce n’est pas l’assistance respiratoire d’un malade du Covid-19 qui lâche et ne peut plus le sauver de la lévitation de son esprit vers un ailleurs-monde. Ce ne sont pas des poumons qui sont detruits par le Covid-19 et n’assurent plus leur fonction organique. C’est l’acte vital de respirer qui est ôté un un noir par un blanc, une banalité dans l’ histoire americaine, un détail dans les rapports Occident/Afrique comme en témoigne aujourd’hui une méditerannée pleine des tonnes d’ossements de nègres dont les derniers mots engloutis par les flots marins ont certainement été I can’t breathe!
Est-ce ainsi que les gens de rien et de peu meurent ?
Est-ce ainsi que les noirs passent de vie à trépas dans ce monde, aux États-Unis ?
Oui, c’est très souvent le cas aux Usa et dans les rapports migratoire Europe/Afrique. Les noirs ne sont-ils pas historiquement parlant ce que Michel Foucault appellerait les restes muets de la politique coloniale, migratoire, économique et raciale ? Ceux qui ne méritent aucune réparation.
I can’t breathe!
Au moment où, comme le dit Achille Mbembe, le Covid-19 fait de l’acte de respirer une réalité qui permet de penser l’importance du soin à apporter à nos corps, à la planète, aux rapports de genre et à nos sociétés en montrant l’importance de la biopolitique et de l’interconnexion des vies animales et vegetales, I can’t breathe, non pas à cause du virus mais du racisme, de la haine et de l’exclusion, est la preuve que “la raison nègre” continue de sévir et reste plus létale que le Covid-19.
I can’t breathe!
C’est malheureusement le quotidien de la majeure partie des Hommes et du monde qui vit avec une infection permanente au Covid de l’injustice, du racisme, de l’exploitation et de la haine.
I can’t breathe!
Le moment sombre des “Strange Fruit” que chanta Billie Holiday en memoire aux Afro-Americains pendus sur des branches d’arbres et balançant leur corps en décomposition comme des fruits au gré du vent, n’est pas révolu aux USA. Il a pris d’autres formes non moins meurtrières et humiliantes.
Est-on un homme si on ne peut ôter son genou d’un semblable qui vous dit I can’t breathe? Certainement pas car Albert Camus nous enseigne dans “le premier homme” “qu’Homme ça, s’empêche”.
RIP à ce frère généalogique dans l’histoire des subalternes de la marche prédatrice du monde.
Par Thierry AMOUGOU