Au Cameroun de Biya, il est difficile de suivre les nouvelles et les controverses s’agglutinent si vite qu’elles s’infiltrent dans les cycles de nouvelles les unes après les autres. Les actions de l’administration de Paul Biya, qui auraient pu faire tomber une présidence normale (ou du moins méritées une enquête du Parlement ou des procureurs spéciaux), passent en quelques heures au moment même oùs éclatent d’autres scandales. Aussi, au moment même où l’Épervier fonctionne à la vitesse de la lumière, les menaces véritablement vitales qui s’accumulent dans le pays ne sont (elles) pas du tout abordées.
En fait, il n’y a pas de consensus et pas de convergence uniforme dans le pays sur rien, y compris sur l’organisation de la CAN en 2019, dont de nombreux Camerounais doutent d’ailleurs encore qu’elle puisse se tenir. Malgré cela le gouvernement n’a aucune éthique, n’initie aucun débat politique de fond, et ne délivre aucun message cohérent, y compris venant de sa machine de propagande habituelle, son volubile porte-parole Issa Tchiroma Bakary. Ils ne semblent pas clairement préparés à répondre à la crise multiforme et croissante qui enserre littéralement le pays: que ce soit la crise anglophone, économique, éducative, sanitaire, sociale. etc … Il n’y a pour ainsi dire aucune solution consensuelle imaginée et imaginable pour faire face à la crise généralisée qui nous attend.
Pendant ce temps le cirque de l’Épervier bat son plein, continue à aiguiser les passions et les rancœurs, alors même que la grande partie du travail de consolidation de la démocratie au Cameroun qui aurait dû être fait, étouffe dans le navire en perdition que dirige Paul Biya qui ne fait que prendre l’eau, rendant encore plus difficile le travail des Camerounais de bonne foi et de bonne volonté pour le faire rester à flot, et construire enfin une démocratie réelle. Parallèlement chacun de nous essaye de sauver son propre navire, les Camerounais ordinaires faisant faire face à de véritables défis existentiels sans pouvoir compter sur l’aide de leur pays.
Pourtant, ces mêmes Camerounais ordinaires doivent repenser leur relation avec leur pays, mais le peuvent-ils seulement?
Afin notamment de rester sain d’esprit, beaucoup d’entre eux doivent s’astreindre à un véritable travail fort émotionnel, le gouvernement avec une poigne de fer à tous les niveaux de responsabilités ne leur fournissant aucune opportunité, aucun répit, aucun espoir, aucune plate-forme pouvant permettre d’envisager ou de rendre leurs vies meilleures. Cette relation ressemble de plus en plus à un syndrome de Stockholm.
En effet, essayer de « sauver » la démocratie libérale au Cameroun semble futile. La raison première de l’arrivée puis de la longévité de dirigeants comme Biya, et Ahmadou Ahidjo avant lui, tient au fait que la démocratie «camerounaise» a échoué à représenter le peuple. Essayer de la transformer (de l’intérieur) s’avère de plus en plus une perte de temps. Ce que nous devrions faire, c’est trouver des moyens d’aller au-delà de l’ordre politique actuel pour améliorer et développer le sens de la responsabilité démocratique d’une manière citoyenne et civile. Les organisations de droits de l’Homme, tel que le CL2P, ont une petite idée sur le sujet et peuvent représenter le point de départ à partir duquel nous pouvons concevoir un plan de sortie de crise non partisan et cohérent. Sinon nous pourrions bientôt devoir dire adieu à toute forme de démocratie au Cameroun. Ce que nous ne souhaitons bien évidemment pas.
Au Cameroun, les opinions sur les droits de l’Homme et la démocratie sont toujours restreintes et contrôlées, avant d’être jugées controversées par les partisans du pouvoir en place. Dans le même temps les personnes qui soutiennent et défendent les droits de l’Homme et la démocratie tendent à graviter elles-mêmes autour de celles qui sont déjà d’accord avec elles, plutôt que de se confronter à celles qui pourraient les défier voire rejeter. Le CL2P ne recule jamais devant les contradicteurs, les intimidateurs et les «bullshitters» de toutes sortes et nous avons les cicatrices pour le prouver. Parce que nous devrons nous dire les vérités et sortir le Cameroun de cette impasse suicidaire.
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques (CL2P)
English version
Once Upon the Time was the Epervier…
In Biya’s Cameroon, it’s hard to keep up. The news and controversies come so quickly they eat into each other’s news cycles. Actions by the Biya’s administration that might have brought down a normal presidency (or at least merited inquiry from the Parliament of Special prosecutors) pass in a matter of hours as the next jaw-dropping scandal explodes.
While the Epervier is functioning at the speed of the light, fundamental threats piling up in the country are not addressed. As a matter of fact, there is no consensus and no uniformed community in the country about nothing including the CAN 2019 which many Cameroonians doubt will happen. The government seems to have no ethos, no policy debates, and no messages, including the government’s propaganda machine, in sight and are not clearly prepared to answer the mounting crisis facing the country be it the Anglophone crisis, economic, educational, health, social and so…Thus, no imagined consensus to exploit to face the many crisis in front of us.
The circus of the Epervier goes on and unfortunately, much of the work shoring up democracy in Cameroon amounts to bailing out the sinking ship as Biya holes in it – trying to stay afloat rather than building a more powerful democracy. And as we try to save our own ship, ordinary Cameroonians must face their own existential challenges without their country’s help.
Normally, ordinary Cameroonians must be rethinking their relationships with their country, however, can they?
In order to stay sane, a lot of them have to undergo a strong emotional labor the government, with an iron grip on all the levels of power, gives them no opportunity, no access, no platform to make their life easy for something that increasingly looks like a Stockholm Syndrome.
Indeed, trying to ‘save’ liberal democracy misses the point in Cameroon. The reason for the rise of leaders like Biya, and Ahmadou Ahidjo before him, is that the “Cameroonian” democracy has failed in representing the people. Trying to transform it is a waste of time. What we should be doing is finding ways of going beyond the present political order to enhance and develop democratic accountability in ways that it has clearly failed to do. Human right Organizations, such as the CL2P, have a blueprint for this and represents a place to start, otherwise, we might as well kiss democracy of any sort goodbye.
In Cameroon, views about human rights and democracy are always shot down before they can properly be discussed and the people who hold these views will often gravitate towards those who already agree with them rather than be allowed to face those who will challenge them. The CL2P never back down from challenging bullies and bullshitters of all sorts and they have the scars to prove it.
The Commitee For The Release of Political Prisoners (CL2P)