Le 29 octobre 1965, l’opposant marocain est interpellé par deux policiers français. L’enquête établit que l’enlèvement a été planifié par les services secrets marocains et des complices français. Mais le mystère demeure.
“Son action a laissé des traces”- (Gilles Manceron, historien)
Mehdi Ben Barka était un homme politique marocain, opposant au roi Hassan II et figure du mouvement tiers-mondiste. Le 29 octobre 1965, il est interpellé par deux policiers français près de la brasserie Lipp dans le quartier de Saint-Germain des Prés à Paris. Selon l’avocat de la famille et ses proches, l’enquête établit très vite que l’enlèvement a été planifié par les services secrets marocains avec la complicité de policiers, d’agents des services secrets et de truands français. Près de 55 ans après la disparition de l’homme politique marocain, son corps n’a pas été retrouvé et sa disparition reste un mystère.
Un précurseur de l’indépendance
Mehdi Ben Barka avait été l’un des fondateurs de ce qu’on avait appelé la Tricontinentale, une organisation regroupant les forces “anti-impérialistes” d’
Gilles Manceron, historien, spécialiste du Maghreb est convaincu que l’action de Ben Barka “a laissé des traces car l’élan qu’il a donné vers une réelle indépendance des peuples anciennement colonisés et qui n’ont pas été véritablement indépendants – car toujours soumis à une tutelle des puissances coloniales – cette volonté est encore forte. Elle est portée par des forces politiques au Maroc d’abord, et ailleurs dans l’ensemble du Maghreb et dans ce qu’on a appelé le tiers-monde : Afrique, Asie et Amérique Latine”.
Une plainte pour enlèvement et assassinat est toujours en instruction à Paris. La famille Ben Barka dénonce la non-coopération des autorités marocaines dans cette affaire.
Embarras au Maroc
Le problème concerne en particulier l’audition des personnes encore en vie citées dans le dossier, comme le général Hosni Benslimane et Miloud Tounsi, alias Larbi Chtouki, tous deux sous le coup d’un mandat d’arrêt international depuis 2007.
Selon l’avocat de la famille Ben Barka, Maurice Buttin, “le général Ben Slimane est toujours en vie… il sait ce qui s’est passé. Miloud Tounsi est aussi toujours en vie. Donc je pense que les Marocains attendent leur mort. Si l’on parle, et que l’on parle complètement, on ne peut pas ne pas remonter jusqu’au roi Hassan II”.
Du côté français, des policiers ont été mis en cause, des membres des services secrets, ainsi que des truands.
Pour la famille Ben Barka, la seule façon de débloquer l’enquête en France est de déclassifier l’ensemble des documents protégés par le secret défense.
Bachir Ben Barka, fils aîné de l’opposant marocain disparu, garde toutefois espoir que la vérité sera un jour connue. “On se bat depuis 55 ans, ce n’est pas aujourd’hui que l’on va s’arrêter. Nous espérons bien sûr un jour connaître la vérité. Nous espérons que ma mère, un jour, pourra aller se recueillir sur la tombe de son mari”, confie-t-il.
A l’occasion du centenaire de la naissance de Mehdi Ben Barka, Bachir et ses proches ont annoncé le lancement d’une série de commémorations en France et au Maroc, en hommage à l’homme politique marocain disparu.