Accusé de malversations financières, l’ancien ministre camerounais des Finances puis de l’Agriculture, est sous le coup d’un mandat d’arrêt depuis le 17 mars 2017. Il est normal que la justice émette un mandat d’arrêt contre un citoyen sur qui pèsent des soupçons de délit ou de crime.
Mais ce mandat émis par un juge du Tribunal criminel spécial du Cameroun pose un problème au niveau de l’autorité en charge de son exécution : « …le président de la République mande et ordonne à tous les huissiers de justice sur ce requis, de mettre ledit mandat d’arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis », peut-on lire au bas du document.
Tribunal impartial
Pourtant, non seulement la constitution en son article 37 alinéa 3 dispose que « le président de la République est garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire », mais aussi le Code de procédure pénale promulgué le 27 juillet 2005 accorde les pouvoirs exclusifs aux magistrats de faire exécuter un mandat d’arrêt. Une telle immixtion du président de la République (dont du politique) dans un acte judiciaire viole les conventions internationales et régionales ratifiées par le Cameroun.
En effet, la Déclaration Universelle des Droits de l’homme en son article 10 dispose que : «Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial ». Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques en son article 14 dispose que « …Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial… ».
CADEG
D’après l’article 7 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend :… le droit d’être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale ».La Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance (Cadeg) en son article 2 a prévu entre autres objectifs «Promouvoir et protéger l’indépendance de la justice ».
L’article 3 de la Cadeg quant à lui dispose que « Les Etats parties s’engagent à mettre en œuvre la présente Charte conformément aux principes énoncés ci-après :…La séparation des pouvoirs ». En somme, ces conventions internationales sont à cheval sur le principe de l’indépendance de la justice, de la séparation des pouvoirs exécutifs et judiciaires. Des principes foulés au pied par le Cameroun dans le cadre du déclenchement des poursuites contre Essimi Menye.