La Haute Cour fédéral d’Abudja au Nigéria a jugé, vendredi, que le rapatriement au Cameroun de Sisiku Ayuk Tabe et 46 autres camerounais le 26 janvier 2018, est un acte « illégal et inconstitutionnel », nous informe un article publié le 1er mars par le journal nigérian Sahara Reporters.
« Cependant, lors de l’audience, vendredi matin, le juge Anwuli Chikere, qui présidait la séance, a convenu avec M. Femi Falana (l’avocat des séparatistes Ndlr) que le Gouvernement nigérian n’avait pas le pouvoir d’expulser des réfugiés et des demandeurs d’asile du pays », rapporte le journal.
« En plus d’accorder 5 millions de Nairas de dommages-intérêts à chaque requérant, le juge a ordonné au Gouvernement fédéral de veiller à ce que les expulsés soient ramenés au Nigéria immédiatement », relève Sahara Reporters.
Interpellés le 5 janvier 2018 dans un hôtel d’Abuja par des hommes de la Sécurité intérieure nigériane, les leaders sécessionnistes ont été ramenés au Cameroun le 26 janvier 2018 et gardés dans une cellule du Secrétariat d’État à la Défense (Sed) de Yaoundé.
Leur procès a débuté le 6 décembre 2018 au tribunal militaire de Yaoundé. Le président autoproclamé de l’État fantôme d’Ambazonie Julius Sisiku Ayuk Tabe et ses neuf coaccusés sont reprochés d’apologie d’actes de terrorisme, sécession, complicité d’actes de terrorisme, financement des actes de terrorisme, révolution, insurrection, hostilité contre la patrie, bande armée, propagation de fausses nouvelles, atteinte à la sûreté intérieure et extérieure de l’État, défaut de carte nationale d’identité.
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L’extradition de séparatistes camerounais du Nigeria jugée “illégale”
Une cour de justice nigériane a jugé “illégale et anti-constitutionnelle” l’arrestation puis l’expulsion de séparatistes camerounais qui avait obtenu le droit d’asile au Nigeria, ont rapporté dimanche leurs avocats.
“Le juge Chikere a déclaré que l’arrestation et la détention de douze plaignants était illégale” dans un jugement rendu dans la semaine à Abuja, peut-on lire dans un communiqué du cabinet Falana and Falana.
“Concernant l’expulsion de ces douze détenus ainsi que 35 autres du Nigeria vers le Cameroun (…) le juge a déclaré qu’elle était illégale et anti-constitutionnelle”, note le communiqué, soulignant que l’Etat nigérian devrait s’assurer qu’ils puissent être renvoyés au Nigeria.
Interpellés à Abuja début janvier 2018 par les services de renseignement nigérians soucieux de soutenir leur voisin camerounais, 47 leaders du mouvement séparatiste anglophone camerounais, dont leur président autoproclamé Julius Ayuk Tabe, ont été transférés à Yaoundé le 26 janvier.
Il “n’existe aucun accord d’extradition” entre les deux pays, ont plusieurs fois plaidé au Cameroun les avocats des prisonniers.
Sur les réseaux sociaux, des leaders d’opinion des sphères séparatistes, en exil, se sont félicités de cette décision. “La victoire est certaine”, a déclaré Mark Bareta, un des principaux propagandistes des séparatistes armés, suivi sur Facebook par plus de 100.000 personnes.
Les Camerounais anglophones “sont heureux qu’au moins il y ait une indépendance judiciaire au Nigeria. Ils espèrent que le gouvernement nigérian donnera suite à cette décision judiciaire”, a-t-il publié sur son site, à l’instar de plusieurs autres comptes de séparatistes sur les réseaux sociaux se félicitant de cette décision de justice.
Pour dix des séparatistes transférés, dont Julius Ayuk Tabe, président autoproclamé de l’Ambazonie – nom donné par les séparatistes à un Cameroun anglophone indépendant dont ils souhaitent l’avènement -, un procès pour “terrorisme” et “sécession” s’est ouvert début décembre au Cameroun.
Depuis leur transfèrement depuis le Nigeria, les leaders ont longtemps été gardés au secret au Secrétariat d’État à la défense (SED), le siège de la gendarmerie à Yaoundé qui abrite une prison de haute sécurité.
Début décembre, peu avant l’ouverture de leur procès, M. Ayuk Tabe et neuf autres séparatistes ont été transférés à la prison centrale de Yaoundé, où ils peuvent recevoir quelques visites.
Le procès n’a pas encore abordé le fond du dossier. Les avocats d’Ayuk Tabe ont juste affirmé que leurs clients n’étaient pas Camerounais et, qu’en en tant que “Ambazoniens”, ils devaient retourner au Nigeria pour y être jugés. Une nouvelle audience au tribunal militaire est prévue le 7 mars.
Le président camerounais Paul Biya, 85 ans dont 36 au pouvoir, a plusieurs fois appelé les séparatistes qui ont opté pour la lutte armée à déposer les armes, et a prévenu que ceux qui ne le feraient pas seraient “neutralisés”.