LA LOI N° 2012/001 DU 19 AVRIL 2012
PORTANT CODE ELECTORAL AU CAMEROUN EST ANTICONSTITUTIONNELLE
Dans quelques mois les camerounais seront encore appelés à aller aux élections avec une loi électorale qui viole la constitution du Cameroun.
En république , les lois ne doivent pas être contraires à la constitution. C’est un sacrilège républicain.
Une loi qui est contraire à la constitution est anticonstitutionnelle.
Une telle loi consacre son illégalité constitutionnelle.
I- PREMIERE RAISON. : CETTE LOI VIOLE L’ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION..
L’article 45 de la constitution dit que les traités et les conventions ratifiés par le Cameroun sont supérieures aux lois nationales.
ARTICLE 45 de la Constitution:
Les traités ou accords internationaux régulièrement approuvés ou ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie.”
En d’autres termes, les lois nationales sont soumises, aussi bien dans leur forme que dans leur contenu aux traités qui régulent leur domaine.
Le Cameroun a ratifié en janvier 2012 un traité qui l’oblige à laisser organiser tout le processus électoral par un organisme des élections indépendant.
Ce traité s’appelle : La Charte Africaine de la Démocratie , des élections et de la Gouvernance (CADEG).
L’article 17 de ce traité dispose que :
” Tout Etat partie DOIT :
(1)- Créer et renforcer les organes électoraux nationaux indépendants et impartiaux chargés des élections”
Pour respecter cette exigence d’un organe indépendant des élections , le Camerounais a créé au mois d’Avril, juste après avoir ratifié ce traité, un organe supposé être indépendant, chargé des élections appelé ELECAM.
La loi portant code électoral de 2012 édictera que :
ARTICLE 4.- (1) : ” « Elections Cameroon » est un organisme
indépendant chargé de l’organisation, de la GESTION et de la
supervision de l’ENSEMBLE du processus électoral et référendaire.”
Mais curieusement à l’article 29 de la même loi, ce n’est plus Elecam qui gère l’ ENSEMBLE élections. Il le partage avec des commissions mixtes qui organisent et supervisent tout ausi comme Elecam les opérations électorales.
ARTICLE 49.: ” Il est créé des commissions électorales mixtes chargées respectivement des opérations préparatoires aux élections, de l’organisation et de la supervision des opérations électorales, des opérations de vote et DU RECENSEMENT GENERAL DU VOTE .”
En lisant le code électoral , vous constaterez qu’Elecam n’est chargé en réalité que de la logistique des élections à savoir l’achat du matériel électoral , choix des bureaux de votes, distribution du matériel électoral, transport des urnes et collecte des pv des bureaux de vote.
Même l’inscription sur les listes électorales est coordonnée par une commission Mixte chargée de la révision des listes électorales :
“ARTICLE 52.: ” (1) Il est créé dans chaque commune, une
commission chargée de la révision des listes électorales.”
Ce sont aussi des structures administratives appelées Commissions mixtes départementales et la Commission nationale de recensement de votes qui compilent , comptabilisent les votes qui seront lus simplement par le conseil constitutionnel en ce qui concerne les législatives et la présidentielle.
ARTICLE 63. :” Il est créé au niveau de chaque département, une commission départementale de supervision … à ce titre …. centralise et vérifie les opérations de décompte des suffrages effectuées par les commissions locales de vote”
ARTICLE 69.- (1) La commission nationale de recensement général des votes procède au décompte général des votes, au vu des procès-verbaux et des pièces annexes transmis par les commissions départementales de supervision”
Ces commissions mixtes composés à 70% des fonctionnaires soumis au pouvoir executif à savoir le president du tribunal de grande instance qui n’y statue pas comme juge , mais comme un simple fonctionnaire , les representants du Ministère de l’Administration territoriale en très grand nombre .
A cet effet , il en ressort clairement que le Cameroun ne dispose pas d’un organe indépendant chargé des élections.
C’est un simple effet d’annonce visant à tromper la viligilence en déclarant à l’article 4 qu’ELECAM gère tout le processus électoral.
Ce sont les commissions qui valident et décident des résultats des votes.
Même le conseil constitutionnel ne peut pas remettre en question ce qui a été décidé dans les commissions car son rôle c’est d’arrêter et de comptabiliser uniquement les votes.
Le Conseil constitutionnel aditionne simplement les résultats contenus dans les différents PV validés par la Commission nationale de votes et déclare vainqueur celui qui a le plus grand nombre de voix. C’est tout.
C’est ce qu’il fait souvent fait lors de la fameuse audience solennelle en présence du corps diplomatique et le gouvernement.
ARTICLE 137 code électoral : . “Le Conseil Constitutionnel arrête et proclame les résultats de l’élection présidentielle dans un délai maximum de quinze (15) jours à compter de la date de clôture du scrutin”
.
Les comptables vous diront qu’arrêter les résultats c’est de faire simplement les totaux.
2 – DEUXIEME RAISON : CETTE LOI VIOLE L’ARTICLE 48 DE LA CONSTITUTION.
L’article 48 de la constitution dispose que :
” (1) Le Conseil Constitutionnel veille à la régularité de l’élection présidentielle, des élections parlementaires, des consultations référendaires.”
Il faut déjà rappeler qu’ une élection va du jour du vote dans les urnes jusqu’aux résultats définitifs.
Ce qui suppose que toutes les contestions qui peuvent s’élever lors de l’ élection, à savoir du vote dans les urnes aux résultats , devraient pouvoir être soumises au contentieux devant le conseil constitutionnel .
Or , subrepticement les articles 132 et suivants du code électoral de 2012 sortent du champ de la compétence du conseil constitutionnel tel que prévu par la constitution les contestations qui peuvent s’élever sur les résultats.
ARTICLE 132.: ” (1) Le Conseil Constitutionnel veille à la régularité de l’élection présidentielle.
(2) Il statue sur toute REQUÊTE EN ANNULATION totale ou partielle des opérations électorales introduite par tout candidat, tout parti politique ayant pris part à l’élection “
Aucune mention sur la contestation des résultats n’est faite.
Le conseil constitutionnel dans la loi de 2012 ne peut donc que procéder à l’annulation partielle ou totale des élections.
Cette loi n’a pas prévu que des candidats ou leurs partis puissent contester les résultats qui leur sont attribués au cours d’une élection par les commissions mixtes départementales et la Coommission générale de recensement des votes
Avec cette loi de 2012, le conseil constitutionnel est donc dans l’impossibilité juridique de revoir, modifier le résultats compilés par les commissions mixtes alors que la constitution parle de la régularité dans l’ensemble de l’élection.
Pour preuve,es recours en contentieux sont déposés au plus tard 72 heures après le vote alors même que les commissions mixtes départementales n’ont même pas encore compilé les résultats.
Or, si les compilations devant ces commissions ou Elecam
étaient faites avant le contentieux devant le conseil constitutionnel , les partis politiques ou les candidats auraient eu la possibilité de contester les résultats compilés devant le conseil constitutionnel en présence de leurs Avocats.
Dans les pays comme le Gabon , la Côte d’ivoire, le Senegal, le Mali , La RDC…., c’est après toutes les compilations et leur proclamation provisoire par l’organe des élections (CENI, CENAP ) que le contentieux électoral commence.
Les partis politiques et leurs candidats peuvent donc dès lors confronter devant la cour constitutionnelle leurs PV aux résultats provisoirement publiés.
Les cours constitutionnelles de ces pays ont donc la possibilité de vérifier contradictoirement devant les parties vérifier si les résultats compilés sont ceux mentionnés dans les PV souvent remis aux candidats à la fin des opérations de vote dans les bureaux de votes.
En réalité , au Cameroun , les PV remis aux candidats dans les bureaux de votes ne leurs servent à rien.
Ils n’ont aucune instance pour les confronter devant un juge.
Christian BOMO NTIMBANE
Avocat