Nouveau rebondissement dans l’histoire qui lie Jimmy Lai, magnat des médias hongkongais et figure du camp prodémocratie, et les forces de l’ordre à Hongkong. Ce dernier a été renvoyé en prison, jeudi 31 décembre, à l’issue d’une audience devant la plus haute instance judiciaire de la ville, qui a suivi les réquisitions du parquet, lequel ne souhaitait pas sa libération sous caution.
M. Lai, très critique envers Pékin, est l’une des personnalités hongkongaises les plus connues visées par la loi sur la sécurité nationale imposée par Pékin pour rétablir le calme dans le territoire après plus de six mois de manifestations en 2019.
A 73 ans, le patron du tabloïd Apple Daily a effectué vingt jours de détention avant d’être remis en liberté, le 23 décembre, contre le paiement d’une caution de 10 millions de HKD (1 million d’euros) et moyennant des conditions très strictes. Assigné à résidence, il s’est également vu interdire toute prise de parole en public et toute publication sur Twitter.
La Cour d’appel suprême a fait droit jeudi à l’accusation de faire appel de la décision du juge d’une juridiction inférieure qui pourrait « s’être trompé dans son interprétation ou l’application » de l’article 42 de la nouvelle législation.
Ce dernier stipule qu’aucune libération sous caution ne doit être accordée, à moins que le juge n’ait suffisamment de raisons de croire que le prévenu ne commettra plus d’infractions.
« Nous avons conclu qu’il est possible de soutenir que la décision du juge était erronée et que son ordonnance de remise en liberté sous caution était invalide », stipule la décision rendue par la Cour d’appel suprême, qui autorise le parquet à faire appel. Il a également fait droit à la demande de ce dernier de maintenir la détention du magnat des médias jusqu’au 1er février, date à laquelle l’appel sera examiné.
Démission
Jimmy Lai est accusé de « collusion avec des puissances étrangères » pour avoir appelé des gouvernements étrangers à sanctionner Hongkong et la Chine en réponse à la politique menée par Pékin dans le territoire semi-autonome.
Plus d’un millier de tweets de M. Lai et un grand nombre d’entretiens qu’il a accordés à des médias ont été examinés par l’accusation. M. Lai est le premier accusé en vertu de la loi sur la sécurité à avoir bénéficié de la liberté sous caution. Le parquet avait aussitôt fait appel de cette décision.
Le Quotidien du peuple, organe du Comité central du Parti communiste chinois, au pouvoir, avait critiqué cette libération sous caution, estimant qu’elle « portait atteinte à l’Etat de droit à Hongkong ». M. Lai fait également l’objet de poursuites pour fraude et pour avoir pris part à des rassemblements illégaux lors du mouvement de contestation de 2019.
Mardi, il a démissionné de ses fonctions de président et directeur exécutif du groupe de presse Next Digital Limited, qui possède le journal Apple Daily, que cet autodidacte a créé il y a trente ans. Il a remis sa démission « afin de passer plus de temps à s’occuper de ses affaires personnelles », a rapporté l’agence Bloomberg, citant un communiqué du groupe de presse.
L’année 2020 a été marquée par un recul sans précédent des libertés à Hongkong. La Chine s’était pourtant engagée, avant de récupérer Hongkong en 1997, à préserver les libertés et la semi-autonomie du territoire pendant cinquante ans, en application du principe « Un pays, deux systèmes » négocié avec Londres. Mais les dirigeants chinois ont opéré, cette année, une reprise en main musclée du territoire semi-autonome, où certaines opinions sont maintenant passibles de la prison à vie.
Le Monde avec AFP