Les prisonniers politiques et la question de la liberté à Yaoundé
On se souvient de cette vieille chanson du musicien camerounais, Jackie Mbimbe Doumbe aussi connu sous le nom de Kape, où il dit que “les choses qui arrivent aux autres commencent dejà à m’arriver”. En vérité, lorsqu’il s’agit d’injustices, même celles qui sont motivées par une violence non réglementée et sans retenue, nous pensons généralement la même chose. Ces injustices n’arrivent qu’aux autres parce que nous n’avons rien fait de mal.
Cependant, grâce aux nombreuses années de lutte en faveur de la libération des prisonniers politiques reconnus par notre organisation, le CL2P comprend comment combattre l’injustice et que les injustices sont des afflictions qui n’excluent personne dans cette pratique généralisée de déshumanisation devenue systématique au Cameroun: ce que le célèbre histoirien Achille Mbembe appelle les nécropolitiques qui est le pouvoir du souverain de dicter qui doit vivre et qui doit mourir. Dans la pratique, cela nous indique à suffisance combien nous vivons tous dans un état de condamnation à mort avec sursis, avec des prisonniers politiques comme martyrs sacrificiels.
C’est pourquoi combattre l’injustice, qui est en fait lutter contre la mort sociale, n’est pas seulement la responsabilité de ceux qui en subissent les conséquences ou de ceux qui commettent le tort. Lorsqu’il s’agit de remédier à l’injustice, pour beaucoup, la première étape consiste à attribuer le blâme – attente généralement satisfaite par le biais d’un individu spécifique ou du régime. La grandeur morale peut faire en sorte qu’une personne pharisaïque se sente bien dans sa peau, et pourtant ne fasse absolument rien pour abolir les injustices. En fait, cela supprime notre capacité à résister aux injustices et les régimes autoritaires jouissent de l’indignation et de la magnificence morale parce qu’ils savent que l’indignation silencieuse et la magnificence morale ne sont pas adaptées à l’action révolutionnaire, à l’engagement ou à quelque chose de mieux, puis à la façon dont nous valorisons la vie. En fait, nous ne faisons que nous aligner sur le régime.
En effet, la responsabilité de l’injustice ne doit pas incomber à quelques-uns, mais plutôt au plus grand nombre.
La réalité est que l’oppression et les inégalités font du tort à tout le monde, aux auteurs, aux spectateurs et aux victimes. Étant donné que l’injustice est mauvaise pour tout le monde, pas seulement pour ceux qu’elle touche directement, il est donc dans notre intérêt de la combattre sous toutes ses formes, que nous soyons directement touchés ou non.
En pratique, le CL2P propose de nouvelles voies pour comprendre les conséquences des injustices systémiques.
Lorsqu’il s’agit de systèmes autoritaires oppressifs, comme le régime de Yaoundé, ce n’est pas seulement un devoir moral pour les individus de s’unir contre cette menace pour la justice, mais c’est aussi dans leur propre intérêt. Bien que l’oppression passe par la marginalisation et l’oppression d’identités spécifiques, laissant beaucoup de personnes apparemment «intactes», nous devons comprendre que «Personne n’est libre tandis que les autres sont opprimés!»
En conséquence, le message du CL2P pour la société est que si nous voulons vraiment obtenir la justice, nous ne pouvons pas le faire séparément ou seulement quand cela concerne nos identités personnelles, mais plutôt que tous les membres de la société doivent s’unir contre l’injustice car cela nous nuit à tous.
En vérité, jour après jour, le CL2P essaye laborieusement de sauver le pays d’une mentalité passive, d’investir dans l’achèvement du travail de faire de cette plantation néocoloniale biopolitique qu’est le Cameroun une maison dans laquelle nous pouvons vivre en étant à l’avant-garde de la pratique civique. En effet, quoi de plus républicain que de risquer sa santé pour restaurer la santé du corps politique?
Veiller à ce que l’une des promesses les plus élémentaires de l’État soit correctement remplie: qu’il veille à l’application de la loi de manière égale, égale, humaine et responsable au service des personnes qu’il doit servir.
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques – CL2P
English version
Political prisoners and the question of freedom in Yaoundé
We remember this old song by Cameroonian musician, Jackie Mbimbe Doumbe also known as Kape, where he says that “things that happen to others start to happen to me”. The truth is, when it comes to injustices, even those motivated by unregulated and unrestrained violence, we usually think the same. These injustices only happen to others because we have done nothing wrong.
As with many years of struggle for political prisoners recognized by our organization, however, the CL2P understands how to fight injustice and that injustices are afflictions that exclude no one in this widespread practice of dehumanization which is becoming systematic and this that Achille Mbembe calls the necropolitics which is the power of the sovereign to dictate who should live and who should die. In practice, how we all live in a state of suspended death sentence with political prisoners as sacrificial martyrs.
Fighting injustice, which is actually fighting social death, is not just the responsibility of those who suffer the consequences or those who do the wrong. When it comes to redressing injustice, for many the first step is to assign blame – usually satisfied through a specific individual or the regime. Moral greatness can make a Pharisaic person feel good about themselves, however, it does nothing to do away with injustices. In fact, it suppresses our ability to resist injustices, and authoritarian regimes enjoy outrage and moral magnificence because they know that silent outrage and moral magnificence are not suited to revolutionary action, to commitment or something better and how we value life. In fact, we are just aligning ourselves with the regime.
This is because the responsibility for injustice should not fall on the few, but rather the many.
The reality is that oppression and inequality damage everyone, perpetuators, bystanders, and victims alike. Since injustice is bad for everyone, not just those it directly impacts, it is therefore in our best interest to combat it in every form no matter whether or not we are directly impacted.
Indeed, the responsibility for injustice should not lie with the few, but rather with the many. The reality is that oppression and inequality hurt everyone, perpetrators, bystanders and victims. Since injustice is bad for everyone, not just those it directly affects, so it is in our best interests to fight it in all its forms, whether we are directly affected or not.
In practice, the CL2P offers new avenues for understanding the consequences of systemic injustices.
When it comes to oppressive authoritarian systems, like the Yaoundé regime, it is not only a moral duty for individuals to unite against this threat to justice, but it is also in their own interests. Although oppression passes through the marginalization and oppression of specific identities, leaving many people seemingly “untouched”, we need to understand that “No one is free while others are oppressed!” As a result, CL2P’s message to society is that if we are serious about achieving justice, we cannot do it separately or only when it concerns our personal identities, but rather that all members of society must unite against injustice because it harms us all.
Truly, day in and day out, the CL2P is trying to save the country, to invest in completing the work of making this biopolitical neocolonial plantation a home we can live in being at the forefront of civic practice.. Indeed, what could be more republican than to risk one’s health to restore the health of the body politic? Ensuring that one of the state’s most basic promises is properly fulfilled: that it applies its law enforcement in an equal, humane, and accountable manner to the people it serves.
The Committee For The Release of Political Prisoners – CL2P