MEON et l’invention de l’autochtone
Lors d’un récent débat sur Vision 4, M. Mathias Éric Owona Nguini, également connu sous le nom de MEON, a déclaré être un “autochtone de Mvengue” (le village d’où est originaire son père le Pr. Joseph Owona, situé dans le Sud du Cameroun). Nous devons admettre que MEON est une curiosité pour moi et Joël Didier Engo qui se trouve être le président du CL2P. Il est une curiosité parce que nous ne sommes pas des étrangers par rapport à MEON, même comme il pourrait également dans son mode de raisonnement d’aujourd’hui nous identifier comme des étrangers, voire des allogènes.
En effet, nous appartenons clairement à la même génération, sommes issus du même milieu social ayant d’ailleurs eu à nous fréquenter pendant des années comme voisins au quartier Bastos de Yaoundé (pour Joël Didier Engo), et avons suivi un parcours académique comparable.
Il est alors très curieux que MEON sous nos yeux invente littéralement, à des fins politiques, une nouvelle tradition. MEON est comme nous et nous sommes tous de Yaoundé malgré nos villages établis respectivement dans différentes régions du Cameroun, voire la même que la sienne . Si nous devions donc revendiquer l’autochtonie, nous sommes tous des autochtones de Yaoundé.
Par conséquent, prétendre qu’il est un “autochtone de Mvengue” est en réalité absurde, mais ce genre d’invention est politiquement et symboliquement significatif et dangereux. C’est dangereux car MEON est clairement un apologiste de la dictature et du génocide. Ce genre d’arrivisme sans moral est flagrant et assez répandu dans le sérail politique camerounais aujourd’hui, surtout quand il réduit cyniquement la crise anglophone à un problème d’autochtone pour justifier les massacres de milliers de nos compatriotes (13 000 au dernier décompte du Congrès américain) par le régime de Yaoundé dans les régions Anglophones.
L’invention de MEON sur l’autochtonie représente en cela un idéal plutôt très dangereux et criminogène: la prétendue défense des supposés autochtones contre de soi-disant millions de Bamilékés envahisseurs qualifiés d’allogènes dans leur propre pays. Ce dogme de l’autochtone théorisé depuis la constitution de 1996 par la dictature de Paul Biya fait partie de la montée en puissance de la politique ethno-fasciste avec la transmission dans le cas de MEON (presque de père en fils) d’un dangereux héritage symbolique et politique.
En effet cette notion d’autochtonie est clairement inventée comme le mythe structurant la pensée du régime Biya.
Un mythe que des gens comme MEON aident à faire répandre via l’idéologie et les médias, pour enfermer définitivement les gens dans un conformisme tribal ethno-fasciste. MEON est connu pour intellectualiser la merde de taureau et obtenir sans effort la reconnaissance et le statut social conférés par le régime qu’il défend. Un régime connu pour fonder ses politiques exclusivement sur le « Bull Shit » qu’il invente frénétiquement depuis 37 ans. Parfois, c’est de la merde actuelle, parfois c’est de la merde historique, mais c’est toujours la merde.
De plus, avec la construction des autochtones, MEON canalise à la fois un sentiment de supériorité et de soumission. C’est la soi-disant idée des indigènes comme figure de l’impuissance et l’inévitable vengeance de l’impuissant contre le colonisateur «envahisseur». La vengeance de l’impuissant ici est d’être plus intelligent que l’intelligent, plus violent que le violent, plus puissant que l’envahisseur colonisateur. Les autochtones deviennent de la sorte ceux qui sentent qu’ils ont moins de contrôle sur certains aspects de leur vie qu’ils le souhaiteraient, qui sentent à un moment ou à un autre que les « envahisseurs » sont plus puissants qu’eux, ce qui est injuste. Dans ce cas, cela justifie et devrait systématiquement justifier la dictature et la violence de l’État.
Dans un pays riche en diversité comme le Cameroun, nous devons pratiquer ce que Achille Mbembe appelle «l’éthique du passant», qui est l’idée que nous ne sommes pas déterminés par d’où nous venons mais par qui nous rencontrons sur le chemin et nos capacités pour réaliser de grandes choses à l’avenir. C’est une philosophie qui regarde en avant plutôt qu’en arrière avec l’audace de l’espoir. Par conséquent, plutôt que l’essence fixe chimérique, nous devons embrasser notre capacité d’auto-expérience et d’auto-transformation.
Dr. Olivier J. Tchouaffe, Porte-parole du CL2P
English version
MEON and the Invention of Autochthony
By Olivier J. Tchouaffe, PhD, Spokesman of the CL2P
In a recent debate on Vision 4, Mr. Eric Mathias Owona Nguini also known as MEON claimed to be from Mvengue. We have to admit that MEON is a curiosity from me and Joel Didier Engo who happened to be president of the CL2P. He is a curiosity because we are not strangers from MEON as he wants to commodify us as strangers. We are clearly from the same generation, same social milieu and comparable educational background.
Thus, it is very curious that MEON in front of our eyes literally invents, for political purpose, a new tradition. MEON is like us and we are from Yaoundé. If we have to make some claims from autochthony, then, we are all autochthons from Yaoundé. Hence to claim that he is from Mvengue is actually absurd, however, it is politically and symbolically significant and dangerous.
It is dangerous because MEON regularly crosses the line and he is clearly an apologist for dictatorship and genocide. This kind of ambitiousness without morals is glaring, especially, when he cynically reduces the Anglophone crisis to an issue of autochthony to justify the regime’s massacre in the Anglophone’s regions.
MEON’s invention of autochthony represents a very dangerous ideal: the so-called defense of invented natives against the so-called millions of encroaching Bamilekes qualified as “invaders” in their own country. This invented autochthonous tradition is part of the rise of ethno-fascist politics and a dangerous symbolic and political heritage.
This notion of autochthony is clearly invented as the established myth of the Biya’s regime.
A myth that folks like MEON help to enforce via ideology and the media to lock people up into ethno-fascism tribal conformism. MEON is known to Intellectualize bull shit and get recognition and good money from the regime of Yaoundé. A regime known for basing policies exclusively on Shit They Made Up. Sometimes it’s current shit, sometimes it’s historical shit, but shit it always is.
What is more, with is construction of the autochthones, MEON both channels a sentiment of superiority and submission. It is the so-called idea of the natives a figure of powerlessness and the revenge of the powerless against the colonizer “invader.” The revenge of the powerless is to be smarter than the smart, more violent than the violent, more powerful than the powerful colonizer invaders. The autochthones become those who feel that they have less control over aspects of their life than they would like, who feel, at some time or another, that the “invaders” are more powerful than themselves which is unjust. In this case, it is justifying the dictatorship and the violence of the state.
In a country rich in diversity, such as Cameroon, we must practice what Achille Mbembe calls “l’ethique du passant,” which is the idea that we are not determine by where we come from but who we meet on the journey and our capacity to achieve great things in the future. It is a philosophy that looks forward instead of backward with the audacity of hope. Hence, rather than chimeric fixed essence, we need to embrace our capacity for self-experiment and self-transformation.
Olivier J. Tchouaffe, PhD, Spokesman of the CL2P