Le destin a voulu, qu’en ce jour du 13 avril 2020, tu sois rappelé à l’éternité, de suites de maladie ! Ne pouvant être présent à l’une des articulations qui seront organisées en temps utile pour tes obsèques, par devoir de mémoire, je tiens ici à te dire toute ma reconnaissance et ma gratitude.
Accusé d’avoir perpétré un détournement de deniers publics prétendument mis à jour par les Services du Ministère Délégué à la Présidence chargé du Contrôle Supérieur de l’État et chiffré à la somme de FCFA 5.876.786.151 dont presque 05 milliards FCFA pour l’opération de réhabilitation du pont sur le Wouri, sur la démarche du Gouvernement, le Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance du MFOUNDI (Mr Jean Fils Kléber NTAMACK) avait alors par correspondance datée du 10 juillet 2009 saisi le Président de l’Assemblée Nationale aux fins d’obtenir la levée de mon immunité parlementaire pour répondre de ce crime devant la Justice.
Sur convocation de son Président, le Bureau de l’Assemblée Nationale s’était réuni le mardi 14 juillet 2009 afin à l’effet de donner suite à la demande du Procureur de la République. À l’issue de leur conclave, les Membres du Bureau de l’Assemblée ont unanimement repoussé ladite demande, estimant qu’il « fallait aller au fond avant de se prononcer ». Et comme l’a si bien souligné Mr Jean Baptiste SIPA de regretté mémoire, « Le fait était inédit, et d’autant moins banal que de coutume, les désirs de l’Exécutif ici sont toujours traités comme des ordres. Au point que pour certains, notre Parlement n’est qu’une chambre d’enregistrement !» (Cameroun: Inconséquence et outrage – http://fr.allafrica.com/
Cette résolution du Bureau de l’Assemblée Nationale, faut-il le souligner, était conforme en tous points aux usages et pratiques parlementaires. En effet, s’il est traditionnellement admis que l’Assemblée Nationale n’apprécie pas le bien-fondé des accusations formulées à l’encontre d’un Député, par contre, elle doit s’assurer que la demande de levée de l’immunité présentée par le Gouvernement est « sérieuse, loyale et sincère », c’est-à-dire sans arrière-pensée politique. Mais hélas, la position du Bureau de reporter sine die sa décision a été interprétée à tort comme un « geste de défi à l’égard du Président Paul BIYA », à la fois par certains média et les milieux politiques proches du pouvoir. Cette interprétation erronée aura eu des impacts nocifs sur la suite de la gestion de mon cas. Comme me l’avait d’ailleurs confié en son temps un Député, « c’était devenu une affaire d’État ».
L’opinion nationale se doit de savoir que, alors Vice-Président de l’Assemblée (SDF) et Avocat de son état, l’Honorable Joseph NJANG MBAH NDAM avait été l’un des principaux artisans de la résolution historique du Bureau à l’issue de son conclave du 14/07/2009. Il ressort de l’exploitation du « Compte-Rendu Intégral de la Réunion du Bureau mardi 14/07/2009 » que l’Honorable Joseph NJANG MBAH NDAM a conclu sa longue prise de parole lors des débats en ces termes: « Je m’oppose à la levée de cette immunité fondée sur de simples allégations. Il faut que ce soit consigné ici ! ». Et bien mieux, dans une interview accordée au quotidien « Le Jour » dans son édition 0486 du mercredi 15 juillet 2009 à l’issue de la réunion du Bureau et laquelle interview a fait couler beaucoup d’encre et de salive, il a déclaré : « Je suis étonné par la rapidité avec laquelle a été menée l’enquête judiciaire sur Dieudonné AMBASSA ZANG. Ouverte le 15 avril 2009 suite à un rapport du Contrôle Supérieur de l’État, elle a déjà été bouclée et envoyée au Parquet, qui a saisi le Bureau de l’Assemblée Nationale. La levée de l’immunité ressemble à un règlement de comptes. Dieudonné AMBASSA ZANG et Paul AYAH ABINE sont les rares Députés RDPC qui posent des réels problèmes. Leurs interventions ne plaisent pas beaucoup à leur parti. Pourquoi nous demande-t-on de lever aujourd’hui l’immunité parlementaire de l’Honorable AMBASSA ZANG alors qu’il a quitté le gouvernement depuis 2006 ? En 2007 il a été élu Député du RDPC. Or l’investiture au sein du parti passe par l’enquête de moralité. Les anciens Ministres aujourd’hui en prison ont été sortis du Gouvernement avant d’être arrêtés. Pourquoi ne peut-on pas laisser l’Honorable AMBASSA ZANG terminer son mandat avant d’affronter la Justice ? Je suis pour que les détourneurs de fonds soient punis. Mais je refuse que le Parlement soit instrumentalisé et affaibli ».
L’Honorable Joseph NJANG MBAH NDAM avec qui je n’avais pas de liens particuliers s’était montré ainsi, contre toute attente, le plus farouche dans la défense de mon cas. Et si mon immunité parlementaire a été finalement levée au forceps lors du second conclave du Bureau de l’Assemblée convoqué subrepticement le 07 août 2009, c’est parce que parce, à dessein, il avait été mis mission officielle pour ne pas prendre part à ladite session. Tout un chacun peut donc se rendre compte que cet Homme de droit et de loi a transcendé les appartenances et logiques partisanes et linguistiques, optant uniquement de défendre la bonne cause : l’État de droit. Au moment où L’Honorable Joseph NJANG MBAH NDAM quitte définitivement le monde des vivants, je voudrais rendre hommage à ce Patriote et Grand Défenseur des Gens.
Pensons avec affection à ses proches surtout sa femme et ses enfants, à sa famille biologique, à sa famille politique (SDF) ainsi qu’aux Parlementaires qui auront été ses collègues….. Je leur adresse mes condoléances émues!
Par Dieudonné Ambassa Zang, ancien ministre et député camerounais en exil