Prise par un ministre Français d’origine Africaine Pap Ndiaye ou pas (en réalité par le secrétaire général de son département ministériel), force est de reconnaître que la suspension du Professeur de philosophie à l’éducation nationale française, Franklin Nyamsi, était imminente.
Cela aurait été le cas à Bamako, Ouagadougou, Pretoria ou Washington DC, dès lors que ces différents pays estimeraient que, faisant face à des menaces pour leur sécurité nationale en pleine confrontation directe des blocs, ils ne peuvent plus laisser des personnes (indépendamment de leurs origines ethniques ou régionales) fragiliser leurs alliances et choix stratégiques, donc leurs intérêts directs dans le monde, à travers des rhétoriques manichéennes essentiellement conspirationnistes et belliqueuses.
C’est de ça qu’il s’agit désormais et chacun devra prendre ses responsabilités, au besoin en s’exilant vers des latitudes jugées plus épanouissantes pour ses convictions anti-occidentalistes ou anti-françaises, dans le cas d’espèce le Mali ou la Centrafrique.
L’époque où l’on pouvait cyniquement s’abriter derrière les libertés garanties par les démocraties occidentales – dont la liberté d’expression et de conscience – pour fustiger ouvertement leurs choix diplomatiques en se réjouissant parfois de leurs pertes sur les théâtres d’opérations…est révolue. Il en va d’ailleurs de même de leurs adversaires déclarés comme la Chine ou la Russie qui ne tolèrent aucune voix dissonante sur leur sol contre leur diplomatie expansionniste voire impérialiste, notamment en Afrique.
Allez donc critiquer la présence du Groupe Wagner en Centrafrique, quand vous êtes africain installé en Russie, et vous verrez si vous en ressortirez vivant!
Aucun pays, même le plus démocratique (comme nous l’avons vu dernièrement avec la suspension justifiée de France 24 par le Burkina Faso), ne tolère que sa sécurité nationale soit fragilisée par des critiques ou rhétoriques passionnelles contre ses choix diplomatiques dans le monde, notamment lorsqu’il fait face à des tensions extérieures marquées par la résurgence d’une confrontation des blocs, ou la déstabilisation des groupes terroristes sur son territoire.
Ne confondons jamais les libertés individuelles dont celle d’expression que nous garantissent les lois fondamentales dans les grandes démocraties, puis nos prises de positions sur les différents forums relativement à leurs choix stratégiques et diplomatiques à l’étranger, notamment lorsqu’ils sont couverts de secret défense. Quand nous critiquons ceux-ci, assurons-nous toujours qu’ils ont été suffisamment documentés et même vulgarisés dans le débat public, et ne sont plus revêtus d’un quelconque secret d’État.
La défense puis l’élan de solidarité que nous avons naturellement envers les libres penseurs et activistes politiques opposés légitimement à la Françafrique, requiert aussi que nous puissions leur tenir un langage de vérité.
L’urgence de défendre et protéger les activistes et défenseurs de l’émancipation internationale de l’Afrique
Nous vivons une époque formidable où les enfants d’Afrique sont enfin audibles et jugés « nuisibles » par ceux qui avaient fait de ce continent leur chasse gardée.
Ce pluralisme doit être respecté et il n’y a aucune raison que des menaces d’interdiction de toutes sortes soient instrumentalisées par des démocraties qui promeuvent la liberté de conscience à l’intérieur de leurs frontières. Elles devront désormais l’étendre en dehors, notamment dans cette Afrique multiple et complexe.
Défendons et protégeons les activistes et défenseurs de l’émancipation internationale de l’Afrique, en dépit de nos différences et divergences d’opinions.
Joël Didier Engo, CL2P
http://www.cl2p.org