Au lieu de conclure les négociations, lundi soir 27 mars, par la signature de l’arrangement particulier, la Conférence épiscopale nationale congolaise (CENCO) a fait le bilan de ses bons offices avec beaucoup d’amertume, au vu des quelques points non résolus : le mode de désignation du Premier ministre, le chronogramme de mise en place du gouvernement ou encore la question de la présidence du Conseil national de suivi de l’accord du 31 décembre. Un constat d’échec, mais la CENCO s’est abstenue de dire qu’elle mettait fin à sa médiation.
Les évêques espéraient la signature de l’arrangement particulier qui devait permettre l’application de l’accord de la Saint-Sylvestre. Mais encore une fois, les négociations entre majorité présidentielle et opposition congolaise n’ont pas abouti lundi soir.
En lieu et place de la plénière et de la signature prévue, c’est le président de la Conférence épiscopale nationale congolaise qui a pris la parole. Un discours en forme de bilan de ces trois rounds de négociations sous l’égide de l’Eglise catholique. Avec d’abord l’accord « salué » : celui de la Saint-Sylvestre. Puis l’enlisement dans les négociations de l’arrangement particulier de partage du pouvoir qui a duré trois mois au lieu des trois jours prévus. Et enfin avec le coup de semonce qu’a représenté la mort d’Etienne Tshisekedi qui devait prendre la tête du Conseil de suivi de l’accord.
Les évêques ont rappelé leurs propositions rejetées par l’un ou l’autre des acteurs. Pour la désignation du Premier ministre, la Cenco proposait des consultations entre le président Kabila et le Rassemblement de l’opposition. La majorité, dès la mi-journée, avait opposé une fin de non-recevoir en maintenant que trois noms devaient être soumis au chef de l’Etat.
Pour ce qui est de la présidence du Conseil national de suivi, après la mort de l’opposant historique, les évêques avaient cherché le compromis en demandant le respect de la lettre de l’accord, c’est-à-dire que la présidence revienne au président du conseil des sages du Rassemblement de l’opposition, mais en disant que cette personnalité devait faire consensus. Or l’ancien conseiller du président Kabila, Pierre Lumbi, désigné par le Rassemblement, n’était accepté ni par la majorité, ni par le MLC de Jean-Pierre Bemba.
Les évêques l’ont dit : ils ne peuvent pas continuer cette mission de bons offices éternellement, mais les mots qu’ils n’ont pas prononcés, c’est de fermer la porte à toutes discussions. Et même poussée par les médias, la Cenco s’est refusée à toute phrase définitive.
Pour l’abbé Nsholé, secrétaire général de la Cenco, la balle est à présent dans le camp du président, de la classe politique, mais aussi de la population.
« La mission des évêques était de faire se parler les uns et les autres pour trouver ensemble une solution. Ce pari a été gagné, et dans le déroulement des travaux on a beaucoup obtenu, a-t-il déclaré. Maintenant il y a deux points qui bloquent et font problème, et ce malgré les propositions faites par la Cenco. Les évêques n’ont pas d’armes, les évêques n’ont pas de fouet, les évêques ont la parole. Et là ils ont dit tout ce qu’ils pouvaient dire. Nous espérons que la parole qui n’a pas été écoutée pendant que les évêques étaient dans la salle pourra être écoutée demain. »
L’abbé Nsholé a tout de même exprimé la « déception » de la médiation. « C’est quand même une déception la façon dont se sont comportés les hommes politiques, a-t-il regretté. Une déception du fait que cette classe politique n’a pas tenu compte de la misère de la population alors que les évêques se sont engagés, non pas pour faire la passe aux hommes politiques, mais plutôt pour trouver une solution qui apporterait soulagement à la misère. »
Et il a encore une fois appelé les Congolais à rester « vigilants ». « Les évêques ont déjà dit plusieurs fois à la population qu’elle doit demeurer vigilante, elle doit être debout. Les hommes politiques, ce sont leurs frères, ce sont leurs sœurs, ce sont leurs oncles, ce sont leurs députés, donc ils ont un rôle à jouer pour les raisonner », estime l’abbé Nsholé.
La majorité avait déjà pris acte de la volonté des évêques d’en finir avec les discussions, avant même la plénière. Elle avait accusé le Rassemblement de l’opposition d’être à l’origine du blocage.
Le Rassemblement, lui, s’est dit triste pour la République démocratique du Congo de voir les évêques renoncer à la médiation. Pour la Plateforme, présidée par Felix Tshisekedi, c’est la majorité qui porte le poids de l’« échec » de la mise en œuvre de l’accord.