C’est aussi cela le visage hideux des dictatures en Afrique, où des ressortissants engagés et favorables au changement doivent parfois leur survie à leur pluri-nationalité. C’est le cas ici où l’écrivain, universitaire, et activiste Patrice Nganang doit vraisemblablement sa libération de ce jour à la pression exercée par Washington sur le régime de Yaoundé.
Mais ce feuilleton ne s’arrêtera pas nécessairement là.
Parce qu’une fois à New York M. Nganang pourra poursuivre ses ravisseurs – tapis dans les allées du pouvoir de Yaoundé – devant les juridictions américaines, avec les conséquences prévisibles et incalculables pour l’État du Cameroun.
Car on ne peut pas tolérer la multiplication de ces enlèvements suivis de séquestrations de ressortissants du Cameroun dans leur pays d’origine, au motif de leurs opinions politiques divergentes avec celle de la dictature trentenaire de Paul Biya (85 ans, 35 ans de règne).
Tout cela doit cesser!
Joël Didier Engo, Président du CL2P
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Au Cameroun, l’écrivain Patrice Nganang relaxé et expulsé
Après trois semaines de détention, Patrice Nganang a été libéré, mercredi 27 décembre, peu après 13 heures. L’écrivain a par la suite été conduit « par des policiers cagoulés et lourdement armés », selon son avocat, à l’aéroport international de Yaoundé-Nsimalen, d’où il a été expulsé vers les États-Unis.
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« Patrice Nganang a été jeté de force dans une voiture de la police camerounaise après que le tribunal de Yaoundé l’a remis en liberté ce matin, affirme Me Emmanuel Simh. Son passeport camerounais a été confisqué sans décision de justice, ainsi qu’un document consulaire appartenant à son beau-père ; ces deux pièces sont entre les mains de la police. » M. Nganang, qui enseigne la littérature à l’Université de New York, dispose toujours de son passeport américain, pays dont il a également la nationalité.
Arrêt des poursuites
Mercredi matin, le juge du tribunal de première instance de Yaoundé a ordonné, contre toute attente, l’arrêt des poursuites contre l’écrivain. Son procès, ouvert le 15 décembre, avait pourtant été renvoyé au 19 janvier 2018. « Hier [mardi], Patrice Nganang a reçu un message lui demandant de se rendre au tribunal ce jour. On ne lui a pas dit de quoi il s’agissait », s’était étonné Me Simh deux heures avant l’audience.
Interpellé le 6 décembre à l’aéroport international de Douala alors qu’il s’apprêtait à rejoindre son épouse à Harare, au Zimbabwe, Patrice Nganang était resté introuvable pendant quarante-huit heures. C’est finalement à la police judiciaire de Yaoundé que son avocat avait appris les charges qui pesaient contre lui : « outrage au chef de l’Etat » et « faux et usage de faux ».
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L’écrivain était accusé d’avoir menacé de tuer le président de la République, Paul Biya, dans un post publié sur sa page Facebook. « Faites-moi confiance et je ne blague pas, je l’ai devant moi, lui Biya, et j’ai un fusil, je vais lui donner une balle exactement dans le front. Je le dis depuis Yaoundé où je suis », avait écrit M. Nganang le 3 décembre sur le réseau social. Le 15 décembre, son procès s’était ouvert avec de nouvelles accusations : « apologie de crime », « menaces » et « outrage à corps constitués ». Il avait plaidé non coupable.
Carnet de route
Pour ses proches, l’homme de lettres a été arrêté à cause de ses prises de parole dans la crise qui secoue le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, les deux régions anglophones du Cameroun, depuis un an. Arrivé au Cameroun fin octobre, M. Nganang avait sillonné pendant plusieurs jours cette partie du pays abritant environ 20 % de la population.
Le 5 décembre, l’auteur notamment de Temps de chien, prix Marguerite-Yourcenar et Grand Prix de la littérature d’Afrique noire, avait publié un « Carnet de route en zone (dite) anglophone » sur le site Internet de l’hebdomadaire Jeune Afrique. Il y dénonçait la gestion de la crise et concluait son récit en appelant à un changement de régime. « Il faudra sans doute un autre régime politique pour faire comprendre à l’État que la mitraillette ne saurait endiguer une foule en mouvement. Seul le changement au sommet de l’Etat pourra régler le conflit anglophone au Cameroun », assurait-il.
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« Comme je le rappelle depuis le début, il s’agit d’un procès politique. C’est une vengeance des personnes qui estiment que Patrice Nganang fait beaucoup d’écrits, de prises de parole contre ce régime », précise Me Simh. « Patrice Nganang a été arrêté pour ses écrits sur la politique en général, mais plus précisément sur la crise anglophone », jure de son côté Gérard Philippe Kuissi, son compagnon de lutte.
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L’écrivain Patrice Nganang, arrêté le 06 décembre 2017 , pour “ outrage et menaces au chef de l’Etat “ , sans bien entendu parler d’une chimérique intelligence avec une entreprise terroriste, a été libéré et expulsé du Cameroun , en s’étant au passage , fait soulager de son passeport camerounais , si on en croit TV5 Monde .
Selon la même source , citant les équipes de défense de l’écrivain, le juge aurait supprimé toutes les charges qui pesaient contre lui , et son procès prévu pour le 19 janvier n’aura conséquemment pas lieu .
Alors , que signifie tout cela dans les faits ? En droit , quand des charges sont abandonnées , ou supprimées , cela signifie tout simplement que n’ayant pas crime , il n’ y a pas davantage de sanctions ! Cette expulsion, et confiscation de passeport , seraient-ce des sanctions déguisées , en lieu et place ?
J’entends bien , que Patrice Nganang , soit aussi détenteur de la nationalité américaine , et que la double nationalité est anti-constitutionnelle au Cameroun , mais là encore , l’État camerounais , si tenté que cette appellation puisse s’appliquer à la mafia au pouvoir , manque juridiquement de cohésion ( consistence ) dans sa propre logique . Car , si ce principe venait à être appliqué de façon non-discriminante , le Cameroun n’aurait plus du tout de gouvernement ! Tous les ministres camerounais , jusqu’aux sous-ministres , à une exception près , disposent de la nationalité française . Même Atanga Nji, le patron de la sécurité nationale , dispose comme Patrice Nganang , du passeport américain . Issa Tchiroma Bakary , le perroquet qui fait office de ministre de la communication, en réalité un griot-courtisan , spécialiste de la désinformation , passé du jour au lendemain et sans transition , toute honte bue , du statut d’opposant féroce à celui de chantre du régime , est détenteur d’un titre de séjour en France, où il ne vit pourtant pas , et son dossier de demande de naturalisation serait introduit depuis 5 ans au moins , sans la moindre suite . Lui qui d’habitude , se targue de tout savoir , ignore que l’obtention de la nationalité française , par voie de naturalisation est plus complexe , que celle de la simple déclaration .
Le chef de l’État camerounais en personne , en plus de son passeport suisse , obtenu à la fin des années 1980 , pourrait très bien prétendre , sans difficulté aucune , à un passeport français par simple déclaration, en vertu de l’article 21 du code civil , en arguant de la communauté de vie ( matérielle et affective ) qu’il partage avec une conjointe française depuis 1994 , excédant largement le délai de trois ans , fixé par la loi .