J’ai toujours plaidé pour une mobilisation générale de la communauté internationale face à la menace pour la «survie de l’espèce humaine » que constitue le réchauffement climatique. Pour moi, « Il y a urgence », car « Déjà certains dommages causés par les changements climatiques sont irréversibles. Il faut donc à tout prix arrêter ce processus d’autodestruction » (Déclaration au Sommet mondial sur les changements climatiques à Copenhague, le 17 décembre 2009). Le Cameroun, par ma voix, est convaincu que le caractère global des changements climatiques requiert des solutions elles aussi globales. Je suis préoccupé par les effets néfastes des changements climatiques tels que la déforestation, la désertification, la montée des eaux océaniques, l’appauvrissement de la biodiversité, la recrudescence des inondations, etc, qui ont des conséquences négatives sur l’agriculture, l’alimentation et la santé humaines. Un exemple saisissant de la gravité de la situation est l’assèchement dramatique du Lac Tchad qui a vu sa superficie passer de 26 000 km2 dans les années 60 à 1 500 km2 aujourd’hui. Cet écosystème sensé faire vivre de milliers de familles camerounaises et tchadiennes a perdu près de 90% de sa superficie initiale. L’assèchement accéléré du Lac Tchad met en jeu la survie des populations des pays riverains. Je constate, pour le déplorer, que « L’Afrique, à l’instar des autres continents, expérimente durement les effets du réchauffement climatique, quand bien même elle ne participe que faiblement à l’émission des gaz à effet de serre ».
J’ai relevé à plusieurs reprises que certains pays en développement, à l’exemple du Cameroun, jouent déjà un rôle important dans l’action mondiale contre le changement climatique. Raison pour laquelle il plaide pour « un réel transfert aux pays du Sud de technologies écologiquement rationnelles pouvant à la fois favoriser le développement et sauvegarder l’environnement ». Pour moi, il « s’agit-là à proprement parler d’un devoir, sinon d’un impératif de solidarité internationale ». Pour moi, la lutte contre les changements climatiques doit être compatible avec les exigences du développement durable et l’éradication de la pauvreté dans les pays du Sud. En septembre 2007, lors de la réunion de haut niveau sur les changements climatiques, à l’occasion de la 62ème Assemblée Générale des Nations Unies, j’avais déjà convié la communauté internationale à renforcer les capacités d’intervention du Fonds d’adaptation au changement climatique, prévu par le Protocole de Kyoto pour aider les pays en développement.
Sur la question du transfert de technologies et des financements, je pense qu’il serait équitable, dans les arrangements à venir, qu’un traitement particulier soit accordé aux pays en développement, notamment ceux du Bassin du Congo qui consentent de lourds sacrifices pour entretenir et régénérer la deuxième réserve forestière mondiale.
Les constats et propositions fortes ci-après sur les changements climatiques traduisent mon engagement dans la lutte contre cette menace planétaire.
1. I n t e r v e n t i o n à la 60ème Session ordinaire de l’Assemblée Générale des Nations Unies, New York (Etats-Unis), le 16 septembre 2005.
« Je voudrais rappeler que le Cameroun et les autres pays du Bassin du Congo, qui est la deuxième réserve forestière mondiale, ont adopté des politiques de gestion qui préservent durablement l’environnement et l’écosystème. Nos pays sont heureux de contribuer ainsi à l’amélioration de la qualité de vie sur notre planète. Mais il serait, me semble-t-il, équitable que la perte considérable de revenus qu’ils ont consentie reçoive une juste compensation ».
2. Intervention dà la 63ème Session ordinaire de l’Assemblée Générale des Nations Unies, New York (Etats-Unis), le 24 septembre 2008.
« L’impact croissant du changement climatique notamment en Afrique est particulièrement préoccupant. En ce domaine où se joue, plus qu’ailleurs, le sort des générations futures, l’urgence d’une action solidaire de la communauté internationale est une nécessité impérieuse ».
3. Déclaration au Sommet mondial sur les changements climatiques de Copenhague (Danemark), le 17décembre 2009.
« Nous sommes tous témoins en effet des conséquences néfastes des changements climatiques sur l’agriculture, la biodiversité, les ressources en eau et, bien entendu, sur l’alimentation et la santé humaines. Mon pays, le Cameroun, subit de plein fouet l’impact de ces modifications du climat. Ainsi, dans la zone soudano-sahélienne, la situation est de plus en plus critique. Tandis que la température est en augmentation constante, la pluviométrie continue de baisser, entraînant une inexorable avancée du désert. En une vingtaine d’années, la ceinture de production de certaines cultures comme le coton et le maïs s’est déplacée de plusieurs centaines de kilomètres vers le sud, exposant la partie septentrionale du pays à un déficit chronique de la production agricole.
L’assèchement accéléré du Lac Tchad est aussi un phénomène très préoccupant pour le Cameroun et les autres pays riverains, qui met en jeu la survie des populations concernées. Sur sa façade atlantique, mon pays est exposé à la dégradation de ses écosystèmes littoraux en raison de l’ensablement sédimentaire, des inondations et de la montée des eaux salées. Dans la partie Sud du Cameroun, la conservation et l’exploitation écologiquement rationnelle de la forêt tropicale soulèvent de nombreux problèmes, en raison de l’importance de ce secteur pour l’économie nationale ». « Nous participons au présent Sommet avec la conviction que le caractère global des changements climatiques requiert des solutions elles aussi globales.
Il importe :
– que les engagements de réduction des gaz à effet de serre par les pays industrialisés soient clairement définis et énoncés.
– que des transferts de technologie soient envisagés afin de permettre d’atténuer les effets des changements climatiques dans les pays en développement.
– que le mécanisme de contrôle proposé tienne compte des différents niveaux de responsabilité en ce qui concerne la pollution atmosphérique. On sait en effet que l’Afrique, bien qu’elle ne participe que très peu aux émissions de gaz à effet de serre, subit fortement les effets de la pollution.
D’une façon générale, je crois qu’il serait équitable que, dans les arrangements à venir concernant les financements et les transferts de technologie, un traitement particulier soit accordé aux pays en développement, notamment à ceux du Bassin du Congo. Ils consentent en effet de lourds sacrifices pour entretenir et régénérer la deuxième réserve forestière mondiale après l’Amazonie, l’une et l’autre étant les poumons de la planète grâce à leur capacité de rétention du carbone et de production d’oxygène ».
« Déjà, certains dommages causés par les changements climatiques sont irréversibles. Il faut donc à tout prix arrêter ce processus d’autodestruction. Nous ne pourrons y parvenir que par une mobilisation résolue de tous et de chacun. Il y a urgence. Ne n’oublions pas ».
4. Discours lors du XIIème Sommet de l’Organisation internationale de la Francophonie, Montreux (Suisse), le 23 octobre 2010.
« Il ne faudrait pas perdre de vue que sécurité alimentaire et changement climatique constituent deux versants d’une même réalité. Comment en effet fournir une alimentation suffisante et équilibrée à l’humanité dans un contexte de changement climatique constant ? De même, peut-on ignorer qu’une agriculture hautement productive, mais peu soucieuse de l’environnement, est l’une des principales causes du réchauffement de la planète? Pour sortir de ce cercle vicieux, il n’est d’autre solution qu’une politique responsable, axée sur le développement durable ». « Qu’il me soit permis de suggérer que soit envisagée la création d’un fonds de solidarité d’urgence au sein de l’OIF, afin de faire face aux éventuelles catastrophes d’ampleur considérable qui pourraient survenir dans l’espace francophone. Il y aurait là un bel exemple de cette solidarité active dont nous sommes tous, j’en suis sûr, des partisans convaincus » [Haïti venait d’être ravagé par un terrible séisme].
5. Déclaration lue par le MINREX, à la 67ème Session ordinaire de l’Assemblée Générale des Nations Unies, New York (Etats-Unis), le 26 septembre 2012.
« Si nous voulons laisser aux générations futures un monde vivable, l’économie verte me semble la solution la plus efficace pour assurer un développement permettant à la fois de satisfaire les besoins des populations et de préserver l’environnement. Pour ce qui nous concerne, le Cameroun a déjà initié des actions à cet égard. Il entend oeuvrer davantage en faveur de la préservation de son capital naturel et dans la recherche des solutions à faible intensité de carbone ainsi que pour la promotion des modes de production et de consommation durables. Selon nous, la mutation vers l’économie verte doit être progressive et bénéficier du soutien de la communauté internationale. A ce propos, le document adopté à l’issue de la Conférence de Rio [en juin 2012 pour célébrer les 20 ans du Sommet de la Terre] a engagé la communauté internationale à respecter les nombreux engagements pris à l’égard de l’Afrique en matière de développement durable, en assurant notamment un transfert des technologies appropriées. Les institutions financières internationales et la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED) sont invitées à renforcer leurs actions à cet effet ».
6. Intervention lors du XIVème Sommet de l’Organisation Internationale de la Francophonie, Kinshasa (RD Congo), le 14 octobre 2012.
« Dans sa partie centrale, et notamment en RDC, l’Afrique abrite le deuxième massif forestier du monde, parfois assimilé à l’un des principaux «poumons» de la planète. Il nous est recommandé de le gérer et de l’entretenir pour le bien commun. Mais que fait-on pour nous aider à lutter contre la désertification? ».
7. Discours lors du XVème Sommet de l’Organisation Internationale de la Francophonie, Dakar (Sénégal), le 29 novembre 2014.
« Les pays d’Afrique Centrale ont le sentiment qu’en préservant la grande forêt du bassin du Congo, ils contribuent de façon significative à la réduction des gaz à effet de serre. C’est pourquoi ils se réjouissent que la Chine et les Etats-Unis paraissent s’engager dans cette voie. Ceci est de bon augure pour le succès de la Conférence de Paris sur le climat. La situation du Lac Tchad est une autre source de préoccupation pour nous. Nous assistons presque impuissants à sa tragique disparition progressive. De plus, il pose des défis sécuritaires et sociopolitiques. La Conférence de Paris pourrait oeuvrer à la mise en place d’un plan de sauvetage du Lac Tchad. C’est une suggestion ».