“Le Cameroun est en crise, une crise profonde, une crise d’identité même. On peut constater une montée en puissance du tribalisme qui crée une véritable scission au niveau national. Outre cela, on ne peut ignorer les crises dans les zones anglophones et même dans l’extrême nord du pays. Il est urgent qu’il y ait un véritable dialogue national au Cameroun, un dialogue inclusif.” Cette déclaration est de Serge Espoir Matomba, l’un des candidats à la dernière présidentielle camerounaise.
Pour Serge Espoir Matomba, beaucoup de choses sont dissimulées aux Camerounais, y compris leur propre histoire. D’où l’urgence de se parler et redéfinir le nouveau profil du Camerounais autour d’une table.
Maximilienne Ngo Mbe, la coordonnatrice du Réseau des droits humains en Afrique centrale (REDHAC), soutient que la solution au problème camerounais va désormais au-delà d’un simple dialogue national. Selon elle “depuis juillet 2018, le REDHAC, après avoir analysé la situation, a proposé une commission vérité justice et réconciliation qui permettrait aux Camerounais de se regarder en face et se pardonner. Parce que nous pensons qu’on ne peut plus parler de dialogue lorsque les membres des forces de sécurité sont égorgés.”
Le RHEDAC affirme avoir documenté pas moins de 4.000 personnes tuées au Cameroun depuis octobre 2017, et qu’au moins 1.000 personnes seraient en détention à ce jour, dans le cadre de la crise anglophone. Cette idée d’une commission vérité justice et réconciliation est partagée par Serge Espoir Matomba. “La vérité, nous allons d’abord commencer par nous regarder en face, à nous dire les vérités, à poser les actes de justice pour démontrer l’impartialité, allant dans le sens de la droiture. Et puis la réconciliation, parce qu’il faut le dire, plusieurs choses sont brisées” estime Espoir Matomba.
Le conflit armé entre forces de l’ordre et séparatistes a redoublé d’intensité dans la région du Nord-Ouest après plusieurs mois d’accalmie
C’est dans un contexte de guerre civile qui menace de se généraliser et d’appels au dialogue et à la réconciliation que Paul Biya, l’homme du 6 novembre 1982 – date de sa première investiture – réélu pour la septième fois le 7 octobre dernier, va à nouveau prêter serment après 36 ans de règne. Et c’est encore un 6 novembre, ce mardi 6 novembre 2018.
Alors que la tension continue de monter, 82 personnes, dont 79 élèves, ont été enlevées lundi dans la région anglophone du Nord-Ouest du Cameroun, en proie à un conflit armé entre les séparatistes réclamant l’indépendance et les forces de sécurité camerounaises.