Politique électorale, Fair-play démocratique, et Devoir de résistance
Au cours de cette courte distraction populaire sous forme de couronnement politique qui vient de tenir de campagne électorale libre, juste, et transparente au Cameroun, M. Paul Biya, au pouvoir depuis 36 ans et âgé de 85 ans s’est présenté à ses concitoyens comme un « prophète » et un « sage de la nation » camerounaise, dessinant de la sorte un portrait peu flatteur de toute forme d’oppositions légitime, tous les contradicteurs et critiques de son régime… présentés comme des hérétiques pratiquant un non-respect systématique envers sa «légitimité politique», en particulier les activistes des droits civils anglophones sur lesquels il a ironisé lors de sa seule sortie de campagne à Maroua, les appelant des «soi-disant libérateurs».
Dans ce pays ceux qui ne sont pas considérés comme des «libérateurs» sont généralement décrits comme des « Prévaricateurs de la fortune publique ». Cette manœuvre habile, cynique, et abondamment exploitée par le « prophète » s’appuie notamment sur l’argument voulu républicain selon lequel tous les Camerounais ont le devoir de respecter la loi, même quand ces lois sont particulièrement injustes et cruels comme sous cette dictature trentenaire. Cependant ce que le « prophète » a toujours omis de prendre en compte, ce sont les privilèges de pouvoir qu’il possède en tant que président doté d’un pouvoir exécutif renforcé, lui conférant de facto le pouvoir absolu d’un monarque.
Avec ce pouvoir monarchique, l’idée qu’il existe des règles du jeu équitables dans lesquelles tous les Camerounais sont moralement engagés mutuellement dans un schéma démocratique fondé sur le fair-play et sur des avantages réciproques est clairement une blague. Plus fondamentalement, l’idée qu’une seule et même personne puisse autant bénéficier de rentes sociales et politiques abusives constitue une grave injustice qui appelle à une résistance politique, car le devoir de loyauté et l’obligation de se conformer à la loi ne sont plus justifiés.
Qui plus est, l’exploitation et la discrimination sont des archétypes de l’injustice. Car la répartition des avantages permet à certaines personnes d’avoir plus au détriment des autres. Ainsi, un système juste ne permet pas de politique d’exception qui consiste à soumettre certaines personnes ou plusieurs personnes à des formes injustes de privations matérielles. En pratique, le fair-play démocratique ne permet pas d’instaurer une culture de l’exception permanente, comme celle que le prophète a mise sur pied au Cameroun depuis 36 ans, et a l’intention de continuer à perpétuer aux dépens de l’écrasante majorité des Camerounais.
Comme le «prophète Biya» l’a reconnu dans une interview légendaire accordée en 1984 à l’ancien présentateur du journal télévisé de la CRTV Éric Chinje, il conçoit detenir le droit de vie et de mort sur tous les Camerounais, sans que le moindre droit soit respecté. Cet épisode mémorable de délire narcissique et égoïste est assez conforme à la tendance généralement affichée par son gouvernement dans son intolérance épidermique des normes démocratiques, allant parfois jusqu’à la haute trahison.
En conséquence, chaque Camerounais a le droit de s’opposer à ces formes de pouvoir absolu et abusif. La CL2P défend donc l’existence d’un devoir moral de désobéissance civile à la loi inique, mais aussi de désobéissance civile fondée sur un des motifs tirés des obligations politiques imposées par le contexte tyrannique camerounais. Plus précisément, le CL2P comprend qu’il est normal qu’un parti au pouvoir veuille y rester. Mais il existe également des protocoles qui sous-tendent un régime démocratique et une éthique de fair-play non codifiée, qui doivent présider à la légitimité de tout système électoral. Prises isolément, toutes les mesures que ce gouvernement a prises pour éviter tout contrôle et manipuler à sa guise les institutions contre l’opposition sont peu recommandables. Prises dans leur ensemble, elles sont purement et simplement dangereuses, parfois mortelles.
C’est pour cela que le CL2P dit NON À UNE ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE LE 07 OCTOBRE 2018 SOUS LA DÉTENTION ARBITRAIRE DE MARAFA HAMIDOU YAYA ET DE TOUS LES AUTRES PRISONNIERS POLITIQUES
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques (CL2P) sera inlassablement là pour rappeler au Président à vie du Cameroun Paul BIYA (85 ans, 36 de règne) au premier devoir du «démocrate»: «laisser autant libre ses opposants comme ses partisans dans leurs choix; prendre le risque d’affronter ses «concurrents» politiques et «adversaires» internes désignés dans des urnes transparentes. Nul besoin pour ce faire de les séquestrer arbitrairement afin de se maintenir à vie au pouvoir grâce à la fraude électorale et la répression politique systématique.
Devoir au quotidien présenter bien malgré nous la vraie nature dictatoriale d’un régime qui se présente à la face du monde comme un modèle de « démocratie apaisée », rappeler l’élimination judiciaire et carcérale que son créateur Paul BIYA réserve systématiquement à ses rivaux potentiels désignés comme des « prévaricateurs de la fortune publique » …n’est hélas pas toujours un exercice facile sous un formatage dictatorial des esprits et un complotisme permanent.
Mais nous continuerons inlassablement de le faire. Parce que le silence est la pire des sentences pour un prisonnier d’opinion. Il participe largement à la banalisation du crime politique, particulièrement au Cameroun.
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques – CL2P
English version
Electoral Politics, Democratic Fair-Play, and the Duty to Resist
During this brief political coronation masquerading as a free and fair political campaign, Mr. Paul Biya, 36 years in power and 85 years of age, has presented himself as a Cameroonian “prophet,” and “sage of the nation” to position all his legitimate opposition, contradictors, and critiques of his regime as targets of blame for failing to respect his political “legitimacy,” particularly, the Anglophones civil right activists that he derided as so-called “liberators.”
Those who are not deemed “liberators” are usually portray as “prevaricators of the public fortune.” This exploitative and cynical manoeuver from the “prophet” follows the Argument that all Cameroonians have a duty to follow the law even if these laws are unjust. What the “prophet” failed to take into account is the power differentials he owns as a president with reinforced executive power that give him the absolute power of a monarch. As with that power, the idea that there is a level playing field where all Cameroonians are morally bound mutual participants in a democratic scheme based on fair play and mutual reciprocating benefits is clearly a joke.
More to the point, the idea that a person may benefit from exploitative social and political schemes constitute grave injustices that require political resistance because the duty of fair play and the obligation to comply to the law is no longer justified. What is more, exploitation and discrimination are archetypes of unfairness because the distribution of benefits allow some people to have more at the expense of others. Thus, a just system does not allow for “free riding” which is to subject some people or more people to unjust forms of material deprivation. In practice, democratic fair-play does not allow for a culture of exception as the like the prophet has been running in Cameroon for the past 36 years and intend to continue to do so at the expense of the majority of Cameroonians.
As the “prophet” recognized in a now legendary interview with Eric Chinje in 1984, he has the right of life and death over any Cameroonian without any due process of the law. That episode of self-righteous nonsense is consistent with a pattern displayed by this government of impatience with democratic norms, verging on high treason. Accordingly, every single Cameroonian has the right to oppose these forms of absolute and abusive power and practices. The CL2P, therefore, defends the existence of a moral duty to disobey the law and engage in civil disobedience on the basis of one of the grounds of political obligation.
More to the point, the CL2P understands that it is normal for a party in power to want to stay there. But there are also protocols that underpin a democratic regime and an uncodified ethos of fair play that sustains the legitimacy of any electoral system. Taken in isolation, any of the steps this government has taken to avoid scrutiny and manipulates the institutions against the opposition is disreputable. Taken as a package, they are downright dangerous.
THIS EXPLAIN WHY THE CL2P FORCEFULLY ARGUES: NO TO A PRESIDENTIAL ELECTION ON 07 OCTOBER 2018 UNDER THE ARBITRARY DETENTION OF MARAFA HAMIDOU YAYA AND ALL OTHER POLITICAL PRISONERS
The Committee of Release of Political Prisoners (CL2P) will be tirelessly there to remind the President for life of Cameroon Paul BIYA (85 years, 36 of reign) to the first duty of the « democrat »: « let his opponents as free as his supporters in their choice; take the democratic risk to confront your political « competitors » and « opponents » designated in transparent ballot boxes. There is no need to sequester them arbitrarily in order to stay in power for a lifetime through electoral fraud and systematic political repression.
Have to present on a daily basis the true dictatorial nature of a regime that presents itself in the face of the world as a model of « peaceful democracy », to recall the judicial and prison elimination that its creator Paul BIYA systematically reserves for his potential rivals designated as « prevaricators of the public fortune » … is unfortunately not always an easy exercise under a dictatorial formatting of the spirits and a permanent conspiracy.
But we continue to do it tirelessly. Because silence is the worst sentence for a prisoner of conscience. It participates widely in the trivialization of political crime, and particularly in Cameroon.
The Committee For The Release of Political Prisoners – CL2P