Pratiques autoritaires et l’État-nation moderne
Par Olivier J. Tchouaffe, PhD, Porte-parole du CL2P
Le racisme de Donald Trump et sa pratique autoritaire du pouvoir doivent être placés dans le contexte plus vaste de l’idéologie de la blanchite et de la formation de l’État-nation moderne.
En effet, l’État-nation moderne lui-même est une formation de la suprématie blanche prédit par des penseurs tels que Georg W. Hegel, qui affirmait que l’État était une manifestation de la volonté de Dieu et voyait Napoléon comme l’incarnation de cette volonté. Une analyse plus approfondie révèle que la suprématie blanche ne peut être réduite à des personnalités. La suprématie blanche est plutôt systémique et enracinée dans les institutions, les constitutions, les lois, l’éducation et le capitalisme.
Dans ce rapport, Ta-Nahesi Coates affirme que la montée en puissance de Trump pendant la présidence du premier président noir des États-Unis Barack OBAMA était le produit de la récupération du pouvoir de blanchite après huit (08) ans de présidence noire.
Coates écrit :
« Pour Trump, la blanchite n’est ni notionnelle ni symbolique mais constitue le cœur même de son pouvoir. En cela, Trump n’est pas singulier. Mais alors que ses ancêtres portaient leur blanchite comme un talisman ancestral, Trump a ouvert l’amulette rougeoyante, libérant ainsi son énergie sinistre. «
En pratique, par conséquent, l’attitude de Trump explique en partie les relations de l’Amérique avec les pays noirs, comme Haïti et les pays africains. De plus, cela se retrouve dans la manière dont les États-Unis traitent leurs propres citoyens noirs, qui sont systématiquement marginalisés et stigmatisés par ce président. Au point où bientôt les Afro-Americains lui devront même d’être américains…comme pour confirmer cette illusion assez répandue chez un certain nombre de racistes notoires, qui consiste à penser que ceux qu’ils traitent comme des sous hommes leur doivent tout, y compris ce qui devrait leur revenir de droit.
Il n’empêche que certains de ses admirateurs dont des réactionnaires africains mettront toujours son racisme pathologique sous le compte d’une « stratégie de campagne » … d’un président américain qui, ont-ils l’habitude d’affirmer, « fait plus pour l’Afrique et les noirs qu’Obama ».
Force est de constater malheureusement après les dernières fusillades notamment à El paso au Texas, que dans un pays où les armes circulent librement, ces dérapages racistes pourraient agir auprès de ses principaux soutiens suprémacistes blancs comme une autorisation présidentielle de « buter des nègres » et toutes les autres minorités raciales en toute impunité.
Précisément comme aux pires années des expéditions meurtrières du KKK…
Tout cela montre que l’État-nation moderne n’était pas seulement une formation suprémaciste blanche, mais aussi la manifestation de la volonté de Dieu. En pratique, cela signifie que ceux qui s’opposent à cette logique ne sont pas simplement des adversaires politiques, ils sont considérés comme des pervers et méritent de souffrir puis de mourir. Leur martyr et même leur meurtre est assimilé par les auteurs comme le salaire de leur péché.
Nous voyons exactement la même attitude dans les satrapies néo-coloniales, comme au Cameroun, où le tyran qui se fait aussi appeler «prophète » n’hésite pas à faire martyriser ses adversaires légitimes pour avoir eu l’ambition sacrilège de le remplacer au pouvoir.
Voilà pourquoi il est important de réévaluer, y compris la dictature africaine, dans un contexte où l’idéologie de l’État moderne fait de lui une expression de la volonté de Dieu avec des questions précises telles que la politique de réparation, ou la nature du « nivellement du terrain de jeu ». Il faut notamment comprendre comment ce genre de politique est mis en place et gagne sans cesse du terrain sur la planète.
Pour cela, le CL2P a toujours été franc et direct contre cette orientation réactionnaire de la politique marquée par la recrudescence d’une masculinité toxique, du racisme et de l’ethnofascisme qui ont jalonne aussi bien l’Amérique de Trump que le Cameroun d’un Biya. Nous résistons de manière productive aux tentatives de ces personnalités autoritaires de (re) définir leurs nations respectives en termes d’exclusion et de préjugés.
Dans cette optique le CL2P fournit des repères, des grilles d’analyses, et d’acquisition des connaissances qui assurent la continuité et l’intelligibilité socio-historiques de la politique d’opposition légitime africaine en tant que forces de changement, en mettant notamment en lumière les notions d’exemplarité, de représentativité, et de soif de vérité à tout prix en tant que ressource culturelle dans une tradition humaniste et prophétique africaine régénérée.
Grace au concours des évolutions technologiques, nous pouvons retrouver, faire connaître et contribuer à légitimer une histoire publique, créer un contexte profond de reconnaissance publique pour une communauté commune de destin, dotée de la bonne culture et de la bonne attitude nécessaires pour saisir toute l’importance et les possibilités révolutionnaires, les solutions de remplacement existantes pour faire face à un monde que des révolutionnaires africains tels que Ruben Um Nyobe, Félix Moumie, Ernest Ouandie, Ossende Afana etc… ont commencé à changer en laissant malheureusement le travail inachevé de décolonisation pour que les nouvelles générations successives puissent continuer et amplifier la lutte.
Olivier J. Tchouaffe, PhD, Porte-parole du CL2P
English version
Authoritarian Practices and the Modern Nation-State
By Olivier J. Tchouaffe, PhD, Spokesperson of the CL2P
Donald Trump’s racism and authoritarian practice of power must be placed in the larger issue of the governing ideology of whiteness and the formation of the modern nation-state.
Indeed, the modern-nation state itself is a formation of white supremacy predicted by thinkers such as Georg W. Hegel who claimed that the state was a manifestation of God’s will and he saw Napoleon as the embodiment of that will. A deeper analysis reveals that white supremacy cannot be reduced to personalities. Rather, white supremacy is systematic and embedded in institutions, constitutions, the laws, education and capitalism.
In this Ta-Nahesi Coates argues that Trump’s rise to influence and power during the presidency of America’s first black president was a product of his whiteness reclaiming power after eight years of a black president.
Coates writes:
« To Trump, whiteness is neither notional nor symbolic but is the very core of his power. In this, Trump is not singular. But whereas his forebears carried whiteness like an ancestral talisman, Trump cracked the glowing amulet open, releasing its eldritch energies. »
In practice, consequently, Trump’s attitude explains America’s relationship to black countries, such as Haiti, and African countries. More, America’s treatment of its own black citizens who are routinely marginalized and harmed by this president.
Still a fairly widespread illusion among a number of notorious racists, to think that those whom they treat as sub-humans owe everything to them, including what should rightfully be theirs.
Some of his admirers including African reactionaries will always put this pathological racism under the account of a « campaign strategy » … of the American president who, they usually say, « is doing more for Africa and the blacks than Obama « .
Unfortunately, in a country where arms circulate freely, these racist slippages could act with its main white supremacist support as a presidential authorization to « stumble negroes » ans others minorities with impunity. As in the worst years of deadly KKK expeditions…
All of these show that the modern nation-state was not only a white supremacist formation but also the manifestation of God’s will. In practice, it means that those who oppose this rationale are not simply political adversary, they are evil and they deserve to suffer as the wages of their sin.
We see this attitude in neocolonial satrapies, such as Cameroon, where the tyrant who call himself the “prophet” does not hesitate to make his legitimate opponents suffer martyrdom for having had the sacrilegious ambition to replace him in office.
It is important, consequently, to reevaluate, even African dictatorship in a context that the ideology of the modern-state makes him an expression of God’s will with precise questions such as the politics of reparation or the nature of “leveling the playing field” and how these kinds of politics will be put into places.
Ultimately, the CL2P has always been outspoken against these kinds of racist and ethnofascist toxic male backlash politics that have ignited Trump’s America and Biya’s Cameroon, productively resisting these authoritarian figures’ attempts to (re)define their respective nations in exclusionary and bigoted terms.
Hence, the CL2P provides knowledge that ensure the socio-historical continuity and intelligibility of African legitimate oppositional politics as forces for change and spotlighting notions of exemplarity, representativity and a thirst for truth at all costs as cultural resource in a regenerated African humanist and prophetic tradition. In turn, a mode of technology that helps to recover, publicizes and legitimates a public history creating a deep context of public recognition and acknowledgement for a community of destiny with the right culture and the right attitude to grasp the importance and revolutionary possibilities of alternatives to properly define and face a world that these African revolutionaries, such as Ruben Um Nyobe, Félix Moumie, Ernest Ouandie, Ossende Afana etc… commenced to change but left the work of decolonization unfinished for the new generations to continue the fight.
Olivier J. Tchouaffe, PhD, Spokesperson of the CL2P