AMBASSA ZANG DIEUDONNÉ
Ancien Ministre des Travaux Publics
Ancien député à l’Assemblée Nationale
S/C Maître EBA’A MANGA –Avocat au Barreau
1.095, Rue ONAMBELE MBALLA- ETOA MEKI
Boîte Postale 4338 YAOUNDÉ-CAMEROUN
NOTE À L’ATTENTION DE MONSIEUR YAP ABDOU
PRÉSIDENT DU TRIBUNAL CRIMINEL SPÉCIAL
YAOUNDÉ – CAMEROUN
A/S Récusation de la procédure pénale en cours
PROPOS LIMINAIRE
Il est souligné d’emblée que je vous adresse la présente note, en votre qualité de Président du Tribunal Criminel Spécial, juridiction pénale d’exception créée par la Loi n°2011/028 du 14 décembre 2011 portant création d’un Tribunal criminel spécial modifiée et complétée par la Loi n°2012/011 du 16 juillet 2012.
Ordonnance de renvoi devant le Tribunal Criminel Spécial pour allégation de détournement de deniers publics
Le Magistrat JERÔME KOUABOU, Juge d’Instruction dans l’affaire qui m’oppose à l’État du Cameroun et au Ministère Public, m’a renvoyé devant le Tribunal Spécial par Ordonnance du 09 juin 2014. De l’exploitation de l’Ordonnance de Renvoi du Magistrat Instructeur, il ressort que je suis renvoyé devant le Tribunal Criminel Spécial pour détournement allégué de deniers publics d’un montant global de 5.820.645.438 FCFA ventilé ainsi qu’il suit pour chaque chef d’inculpation :
-
Pénalités de retard irrégulièrement annulées : 10.340.287 FCFA
-
Dépenses injustifiées des comptes bancaires : 133.433.925 FCFA
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Dépenses injustifiées des fonds destinés à la gestion des opérations nécessitant des interventions d’urgence (Régies d’Avances) : 422.500.000 FCFA
-
Passation d’un marché avec une entreprise en déconfiture et en période suspecte de faillite ne présentant pas de garanties financière, économique et technique : 4.891.407.226 FCFA
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Dépenses injustifiées pour les Comités internes et interministériels : 73.785.000 FCFA
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Per-diem irrégulièrement octroyés aux membres de commission de passation de marchés autres que les travaux neufs : 16.635.000 FCFA
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Indemnités pour travaux spéciaux sans pièces justificatives : 59.250.000 FCFA
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Indemnités au profit des personnels d’appui des commissions de passation des marchés : 4.860.000 FCFA
-
Somme payée à titre de frais aux membres de la commission de passation des marchés des travaux neufs et de la commission de passation des marchés de l’entretien routier : 117.375.000 FCFA
L’exil non pour fuir les poursuites mais pour échapper à la persécution
Il me plaît de faire savoir que si j’ai opté pour l’exil pour le moment, ce n’est pas parce que je me reproche particulièrement quelque chose par rapport aux accusations mises à ma charge. C’est plutôt en raison :
(i)-De la manière très cavalière dont mon immunité parlementaire a été levée par le Bureau de l’Assemblée Nationale du Cameroun, sur la demande du Magistrat NTAMACK JEAN FILS KLÉBER par lettre du 10 juillet 2009 au Président de l’Assemblée, en sa qualité de Procureur de la République près le Parquet du Tribunal de Grande Instance du MFOUNDI-YAOUNDÉ. Cette démarche était elle-même consécutive à la demande formelle de mise en mouvement de l’action publique adressée par Mr ETAME MASSOMA alors Ministre Délégué chargé du Contrôle Supérieur de l’État au Ministre de la Justice. Homme de Loi et de Droit, vous n’êtes pas sans ignorer que Mr ETAME avait commis là un grave vice de procédure, les Ordonnateurs et Gestionnaires de Crédits Publics étant justiciable, sauf cas de flagrant délit, devant le Conseil de Discipline Budgétaire et financière et à charge pour cette instance de procéder à la saisine du Juge Judiciaire pour les faits apparus à l’examen crimes et/ou délits (Loi 74/18 du 05 décembre 1974 et ses modificatifs subséquents) ;
(ii)-Des craintes quant à mon incarcération, en cas de retour au Cameroun, sans réelle possibilité de défendre mon innocence dans le cadre d’un jugement équitable. Je précise qu’en violation du principe de la présomption d’innocence, plusieurs mandats d’arrêt internationaux ont été lancés contre moi sans le moindre début de preuve des faits mis à ma charge ;
(iii)-Des violences dont j’ai été personnellement victime (Suspension du paiement de mon indemnité législative en violation des dispositions de l’article 80 de la Loi 73/1 du 08 juin portant Règlement de l’Assemblée Nationale et ses modificatifs subséquents), ainsi que de ma famille et de mes proches notamment le viol de ma compagne et l’allégation contre Mon Conseil (Maître EBA’A MANGA) de détournement de la somme de 08 millions de francs CFA par Rapporteur du Conseil de Discipline Budgétaire et Financière.
Tous ces faits sont autant de graves violations de mes droits humains, lesquels droits sont consacrés par les instruments juridiques internationaux auxquels le Cameroun a adhéré et sont par ailleurs affirmés dans le Préambule de la Constitution Camerounaise. Aux termes des dispositions de l’article 14 (al 1) de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme « Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile en d’autres pays ». Et c’est à juste titre que d’une part j’ai été admis après de longues investigations au Statut de Réfugié Politique en France et, d’autre part, l’Union Interparlementaire a jugé recevable ma requête et s’investit depuis 2010 dans la recherche d’une solution amiable et équitable dans mon cas. S’agissant d’ailleurs de l’Union Interparlementaire, l’intérêt accordé à mon cas l’a amenée à dépêcher au Cameroun Maître Simon FOREMAN, Avocat au Barreau de Paris, pour une mission d’observation de l’audience du 17 septembre 2014 dont le rapport est joint en annexe (Annexe 1). Il n’est pas superflu de rappeler que l’intéressé, sur sa demande, a été reçu par le Procureur Général NSOGA et vous-même.
L’acheminement de la procédure vers un procès inique après les réquisitions du Ministère Public
À la suite de la Résolution du Conseil Directeur de l’Union Interparlementaire, adoptée à sa 195ème session le 16 octobre 2014 à Genève (Annexe 2) et de toutes les interventions faites par moi dans divers media, j’étais en droit de penser que tant le Ministère Public que la Collégialité veilleraient à une bonne application des dispositions de l’article 11(al1) de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme selon lesquelles « Toute personne accusée d’un acte délictueux est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d’un procès public où toutes les garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées ». À mon plus grand regret et à ma plus profonde déception, dans son compte-rendu de l’audience, le quotidien gouvernemental « Cameroon Tribune » révèle que lors de l’audience du 28 mai 2015 le Procureur, après avoir requis ma condamnation pour détournement de deniers publics pour un montant de 5.820.645.438 FCFA et précise ensuite qu’il s’est fendu dans un commentaire disant que je n’ai pas eu « le courage d’affronter ma responsabilité en prenant la poudre d’escampette ». Manifestement le souci n’est pas de dire le droit et la procédure conduite par votre juridiction s’achemine inexorablement vers une très lourde condamnation à la suite un procès inique marqué par une grave violation des droits de la défense.
Dans l’impossibilité :
-
D’une part de me présenter physiquement devant le Tribunal Criminel Spécial à cause de mon statut de Réfugié Politique, de la procédure pendante devant les Instances compétentes de l’Union Interparlementaires et des violences me visant personnellement ainsi que ma famille et mes proches,
-
D’autre part de faire assurer ma défense par un Conseil en application des dispositions de l’article 349 de la Loi N°2005/007 27 Juillet 2005 portant Code de Procédure Pénale, dispositions aux termes desquelles « Lorsque le prévenu cité à personne ne comparait pas et ne présente pas d’excuse reconnue valable par le Tribunal, la parole n’est donnée à son conseil que pour justifier son absence et le jugement à intervenir est contradictoire »,
il m’est apparu opportun et de la plus haute importance, de vous adresser la présente note pour récuser formellement la procédure pendante devant votre juridiction, pour une bonne administration de la justice et afin d’éloigner le risque d’une grave erreur judiciaire qui se profile à l’horizon. Les raisons qui motivent cette récusation seront exposées dans les développements qui vont suivre.
-
EXCEPTION D’INCOMPÉTENCE MATÉRIELLE DU TRIBUNAL CRIMINEL SPÉCIAL
La compétence d’une juridiction, comme le Tribunal Correctionnel, est déterminée à raison des matières qu’elle juge (compétence ratione materiae), des personnes qu’elle peut juger (compétence ratione personae), du ressort territorial sur lequel elle exerce sa juridiction (compétence ratione loci). La question de la compétence de la juridiction est la première que doit se poser le Tribunal Correctionnel lorsqu’il est saisi d’une affaire, pour savoir s’il peut la juger. Sinon, il doit relever son incompétence. Cette exception d’incompétence est d’ordre public absolu, ce qui signifie que, même si toutes les parties à un procès pénal étaient d’accord pour « choisir » leur Tribunal Correctionnel au mépris des règles de compétence, ce Tribunal a l’obligation de se déclarer incompétent. Et en procédure pénale, l’incompétence de la juridiction peut être soulevée à tout moment (pas seulement in limine litis) par le Tribunal comme par les parties.
En prenant son Ordonnance par laquelle il me renvoie devant le Tribunal Criminel Spécial, le Magistrat Instructeur reconnaît à cette une juridiction d’exception la compétence à la fois ratione loci et ratione materiae. Et, pour la collégialité, se poser la question de la compétence du Tribunal criminel Spécial n’est pas à l’ordre du jour puisque les débats se déroulent allègrement au fil des audiences depuis le 20 août 2014. Mais à l’analyse d’une part des textes de loi et, d’autre part, des chefs d’accusation visés dans cette Ordonnance de Renvoi, force est de constater faire un constat douloureux : l’incompétence ratione materiae du le Tribunal Criminel Spécial sur l’ensemble des chefs d’inculpation.
A1-Une confusion regrettable entre faute de gestion et détournement de deniers publics
La faute de gestion et le détournement de deniers publics sont deux notions distinctes disposant de régimes de répression différents. Et la manœuvre consistant à me renvoyer devant votre juridiction pour connaitre des fautes et irrégularités présumées de gestion mise à ma charge par les Vérificateurs du Ministère Délégué à la Présidence chargé du Contrôle supérieur de l’État (CONSUPE) est une démarche illégale et suspecte, laquelle est illustrative de l’amalgame entretenu dans le cadre de l’Opération épervier entre d’un côté la « faute de gestion » et de l’autre côté le « détournement de denier public ».
En admettant que ces irrégularités et/ou fautes de gestions soient fondées, devrait-on leur conférer la qualification juridique de « détournement » ? Sous réserve de l’appréciation des professionnels du droit, pour ma part, très modestement et très sincèrement, j’en doute et pour cause. La loi n°74/18 du 05 décembre 1974 relative à la sanction des ordonnateurs, gestionnaires et gérants de crédits publics et des entreprises d’Etat, telle que modifiée par la Loi n° 76/4 du 8 juillet 1976, a défini la faute de gestion et a tout de même procédé à une énumération assez détaillée, mais non exhaustive, des irrégularités commises par les ordonnateurs, et constitutives de faute de gestion. Aux termes de l’article 3 de ladite loi :
« Est considérée comme irrégularité au sens de la présente loi toute faute de gestion préjudiciable aux intérêts de la puissance publique notamment :
-
engagement d’une dépense sans avoir qualité pour le faire ou sans avoir reçu délégation à cet effet ;
-
engagement d’une dépense sans crédit disponible ou délégué ;
-
engagement d’une dépense sans pièces justificatives suffisantes ;
-
engagement d’une dépense sans visa, autorisation ou réquisition préalable de l’autorité compétente ;
-
engagement dépense ou certification des pièces sans justification de l’exécution des travaux, des prestations de biens ou de services f) recrutement et emploi effectif d’un agent sans intervention du contrôle budgétaire quand ce contrôle est prévu par les règlements ;
-
recrutement d’un agent en infraction çà la règlementation du travail en vigueur ;
-
modification irrégulière de l’affectation des crédits ;
-
appels à la concurrence, lettres de commande et achats effectués en infraction à la règlementation sur la passation des marchés publics ;
-
utilisation à des fins personnelles des agents ou des biens de l’Etat et des collectivités publiques lorsque ces avantages n’ont pas été accordés par les lois et règlements ».
Et ce sont les irrégularités et faute de gestion visées dans la loi sus-rappelée telles « dépenses injustifiées », « non-présentation des pièces justificatives » ou « indemnités irrégulières » que le Magistrat Instructeur égrène tout au long de son Ordonnance de renvoi, au mépris du principe de la légalité des délits et des peines. En droit pénal, le principe de légalité des délits et des peines dispose qu’on ne peut être condamné pénalement qu’en vertu d’un texte pénal précis et clair (En latin, Nullum crimen, nulla pœna sine lege). Nous notons à cet égard, et à titre d’exemple, que le Magistrat Instructeur se borne à affirmer que les indemnités de session servies aux personnels temporaires d’appui des CPM sont « irrégulières » sans pour autant dire le texte législatif ou règlementaire sur lequel il fonde l’accusation.
Au plan procédural et des institutions compétentes, les irrégularités et les fautes de gestion relèvent de la compétence du Conseil de Discipline Budgétaire et Financière tandis que les autres faits répréhensibles sont de la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.
. Notre affirmation sera illustrée par le détournement allégué de deniers publics relativement à ma gestion de l’opération de réhabilitation du pont sur le Wouri.
A2- La responsabilité contractuelle et la présence d’une clause compromissoire dans le marché-programme de réhabilitation du pont sur le Wouri
Aux termes de l’article 1134 du code civil, « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ». Et l’alinéa 1 de l’article 5 du Décret N°2004/275 du 24 septembre 2004 portant Code des Marchés Publics précise que le « Marché Public est un contrat écrit » et selon l’art 1101 du Code Civil, « le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent envers une ou plusieurs autres à donner, à faire, ou à ne pas faire quelque chose. Le contrat permet de créer un rapport de droit, de le modifier et même de l’éteindre ».
L’État du Cameroun représenté par le Ministère des Travaux Publics (Maître d’Ouvrage), d’une part, et, d’autre part, le Groupement Conjoint formé des entreprises de travaux publics UDECTO et ETIC International (Entrepreneur) ont signé le 22 avril 2003 le Marché-Programme N°00036/M/MINTP/CPM-TN/2003 relatif à la réalisation des travaux de réhabilitation du pont sur le Wouri à Douala au Cameroun. La légalité et/ou la validité de ce contrat n’a jamais été remise en cause et pour cause :
-
La procédure de passation prescrite tant par la réglementation camerounaise des marchés publics (Décret 95/101 du 09 juin 1995) et les directives de l’Agence Française de Développement (Bailleur de fonds) ont été strictement respectées ;
-
Le Maître d’Ouvrage, préalablement à la signature du marché, a obtenu les autorisations formelles requises tant du bailleur de fonds que de la Commission Spécialisée de Contrôle des Marchés des Routes et Autres infrastructures (Annexe 3 et Annexe 4)
-
Le Premier Ministre, Chef du Gouvernement et Autorité des Marchés a fait apposer son « VISA »
L’article 58 du Marché-Programme N°00036/M/MINTP/CPM-TN/2003 relatif à la réalisation des travaux de réhabilitation du pont sur le Wouri dispose que : « Tout litige survenant entre le Maître d’Ouvrage et l’entrepreneur dans le cadre de l’exécution du présent marché fera l’objet d’une tentative d’arrangement à l’amiable ; En cas d’échec de cet arrangement, le différend sera tranché par la Chambre Internationale de Commerce de Paris ». En insérant cette clause compromissoire dans le marché-programme, les parties se sont engagées à saisir un arbitre impartial, neutre et indépendant en cas de litige sur l’application du contrat ou encore en cas de rupture du contrat. Cette clause
Le Magistrat Instructeur, en affirmant dans son Ordonnance de Renvoi que « L’entreprise UDECTO n’a pas pu réaliser les travaux provoquant la résiliation dudit marché au préjudice de l’État qui a subi un préjudice financier évalué à 4.891.407.226 FCFA […] » reconnaît de manière explicite que le litige né entre UDECTO et l’État du Cameroun rentre dans le cadre de la responsabilité contractuelle. En effet, Le préjudice subi par l’État du Cameroun est lié à l’arrêt unilatéral des travaux par UDECTO, à la mise générale en régie et au retard global du projet. En effet, la demande d’indemnisation porte sur : le paiement des pénalités de retard, le remboursement du surcoût de la maîtrise d’œuvre et des coûts additionnels, la compensation des coûts en régie, le remboursement des prix plus élevés payés à RAZEL pour l’achèvement des travaux etc. C’est donc dire que le préjudice réel subi par l’état du Cameroun résulte de l’inexécution et/ou de la mauvaise exécution du marché des travaux de réhabilitation du pont sur le Wouri par l’entreprise UDECTO défaillante. La juridiction pénale n’est nullement compétente pour connaître d’un tel contentieux.
A3- L’application des dispositions de l’article 62 (al e) du Code de Procédure Pénale : la « res judicata »
En application de cette clause compromissoire, UDECTO a porté le litige devant la Cour Arbitrale de la Chambre Internationale de Commerce de Paris (CCI) laquelle a rendu une sentence arbitrale le 13 juillet 2010 (Voir sentence arbitrale – Affaire N° 14422/EC/ND – La société UDECTO c/ La République du Cameroun). Le principe non-bis in idem trouve ici sa pleine application. Le tableau synoptique ci-après fait ressortir la nature des réclamations, les prétentions de l’État du Cameroun et les montants alloués pour chacune des réclamations par la Cour Arbitrale.
Réclamations
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Fond
|
Montant FCFA de la réclamation
|
Montant FCFA alloué
|
Montant USD alloué
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Pénalités retard
|
admise
|
654.704.248
|
654.704.248
|
|
Surcoût marché RAZEL
|
admise
|
1.716.849.768
|
932.734.433
|
|
Surcoût Maîtrise d’œuvre
|
admise
|
1.222.906.270
|
786.215.072
|
|
Surcoût Maîtrise d’ouvrage
|
rejetée
|
600.000.000
|
Zéro
|
|
Surcoût de la régie
|
admise
|
527.964.214
|
477.964.215
|
|
Surcoût exploitation véhicules
|
rejetée
|
7.300.000.000
|
Zéro
|
|
Préjudice moral
|
rejetée
|
527.655.752
|
Zéro
|
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Frais de procédure
|
admise
|
717.642.000
|
190.242.200
|
368.500
|
TOTAL
|
14.267.722.252
|
3.041.860.168
|
368.500
|
Il ressort du tableau ci-dessus que, sur des prétentions de l’État du Cameroun dont le montant total est de 14.267.722.252 FCA, la Cour Arbitrale de la CCI de Paris a condamné l’entreprise UDECTO à payer à l’État du Cameroun les sommes respectivement de FCFA 3.041.860.168 au titre de l’indemnisation pour préjudice subi et 368.500 US dollars au titre du remboursement des frais d’arbitrage.
L’État du Cameroun n’a jamais remis en cause la sentence rendue par la Cour Arbitrale de la CCI de Paris. Et bien au contraire, le Ministre des Travaux Publics avait fait un communiqué de presse (Annexe 5) paru dans l’édition du quotidien gouvernemental « Cameroon Tribune » du 28 septembre 2010 pour en faire un large écho. Ce communiqué a par ailleurs été accompagné d’un article dudit quotidien gouvernemental ventant l’action de l’équipe chargée de la défense du Cameroun dans un article intitulé : Réhabilitation du pont sur le Wouri : Le Cameroun gagne son procès contre UDECTO (Annexe 6).
L’autorité de la chose jugée d’une sentence arbitrale rend irrecevable une action exercée devant la juridiction d’État dès l’instant où il y a identité d’objet entre les demandes et à supposer même qu’il fût avéré qu’il existe entre les deux demandes une différence de fondement juridique. Les effets de l’autorité de la chose jugée pour les sentences arbitrales sont les mêmes que ceux qu’elle produit en droit commun de la procédure. Il convient à cet égard de rappeler qu’aux termes des dispositions de l’article 62 (1, e) de la loi N° 2005/07 du 27 juillet 2005 portant code de Procédure Pénale au Cameroun « L’action publique s’éteint par […] La chose jugée ».
Surabondamment, en vertu du principe « non bis in idem », l’accusation portant sur le « détournement de deniers publics » correspondant au préjudice subi par l’État du Cameroun dans le cadre de l’opération de réhabilitation du pont sur le Wouri aurait dû être abandonnée après que la sentence arbitrale ait été rendue, ce qui n’est malheureusement pas le cas. D’application universelle, ce principe est consacré par plusieurs instruments internationaux de protection des droits fondamentaux signés et ratifiés par le Cameroun, tel que le Pacte de New York relatif aux Droits Civils et Politiques de 1966 (article 14, al 7) ainsi que le préambule de la Constitution Camerounaise.
-
DES POURSUITES ABUSIVES DE L’ÉTAT DU CAMEROUN ET DU MINISTÈRE PUBLIC
Par poursuites abusives et injustifiées, j’entends des poursuites qui n’ont pas lieu d’être engagées contre moi, parce qu’elles ne sont fondées ni en droit ni en fait. Instruisant « à charge et à décharge », le Magistrat Instructeur, s’il avait fait son travail en toute indépendance et impartialité, aurait dû abandonner les accusations mises à ma charge par Mr ETAME MASSOMA dans sa lettre au Ministre de la Justice courant avril 2009.
B1- La mobilisation par l’État du Cameroun des cautions données par UDECTO
La procédure en cours devant le Tribunal Criminel Spécial, s’agissant de ma gestion de l’opération de réhabilitation du pont sur le Wouri vise à me condamner à réparer le préjudice évalué sans aucune base objective et par des personnes ne disposant d’aucune expertise. Ce préjudice est établi à la somme d’environ 4,8 milliards de francs CFA. Il s’agit ni plus ni moins que d’une poursuite abusive car :
-
Le Maître d’ouvrage n’est pas partie au contrat et il n’y a pas un mécanisme de substitution de responsabilité avec celle du co-contractant UDECTO défaillant ;
-
La responsabilité contractuelle du co-contractant UDECTO a été reconnue par la CCI de Paris et l’entreprise condamnée à réparer le préjudice subi par l’état du Cameroun ;
-
L’État du Cameroun a mobilisé les différentes garanties fournies par UDECTO.
Pour revenir sur les garanties fournies par UDECTO, lesdites sûretés données par une banque camerounaise (CBC) pour le compte d’UDECTO d’un un montant total de 2.834.073.931 FCA se répartissent ainsi qu’il suit :
-
caution avance de démarrage, 1.208.681.318 FCFA ;
-
caution avance matériaux, 580.149.398 FCFA ;
-
caution de bonne fin, 496.232.977 FCFA ;
-
retenue de garantie, 549.018931 FCFA.
Faut-il le rappeler, ces sûretés ont été données par UDECTO en application :
-
D’une part des dispositions de la Réglementation des Marches Publics règlementaires du Décret 95/101) :
-
Articles 16 et 17 : cautionnement garantissant l’exécution intégrale des prestations et cautionnement en garantie de bonne fin du marché et des sommes dont le titulaire du marché serait reconnu débiteur ;
-
Article 71 : cautionnement à 100% des avances de démarrage.
-
D’autre part, des dispositions contractuelles du Marché-Programme N°00036/M/MINTP/CPM-TN/2003 (Article 16).
L’État du Cameroun s’est fait justice en procédant de manière abusive, alors même que la procédure était encore pendante devant la Cour Arbitrale de la CCI de Paris, à l’appel des cautions fournies par UDECTO. En rappelant qu’il s’agit de garanties à première demande, l’État du Cameroun a fait jusqu’à présent preuve d’une extraordinaire discrétion qui cache mal la volonté des Autorités de ne pas faire preuve de transparence sur la destination et l’utilisation des sommes reçues de la banque camerounaise « Commercial Bank Cameroon » (CBC) qui a souscrit ces engagements par signature pour le compte d’UDECTO. Des informations concordantes et crédibles données par des anciens Ingénieurs proches de ce dossier ont donné à constater que, à fin juin 2009, la CBC avait déjà libéré la somme de 1.788.830.716 FCFA. Les tableaux synoptiques ci-après font ressortir par tranche de marché les informations suivantes : numéro de caution, montant de la caution, montant total des mains-levées et le reste de la caution à fin juin 2009.
Tableau 1 : Cautions d’avance de démarrage
Tranche ferme
|
Tranche C 1
|
Tranche C2
|
Total (FCFA)
|
|
Numéro de la caution
|
004167 – CBC
|
005426 – CBC
|
005428 – CBC
|
|
Montant de la caution
|
1.098.036.475
|
473.808.298
|
413.087.137
|
1.984.931.910
|
Montant total des mains levées
|
776.250.592
|
0
|
0
|
776.250.592
|
Reste de la caution
|
321.785.883
|
473.808.298
|
413.087.137
|
1..208.681.318
|
Tableau 2 : Cautions d’avance sur matériaux
Tranches conditionnelles 1 et 2
|
Total
|
|
Numéro de la caution
|
007802 – CBC
|
|
Montant de la caution
|
580.149.398
|
580.149.398
|
Montant total des mains levées
|
0
|
0
|
Reste de la caution
|
580.149.398
|
580.149.398
|
Tableau 3 : Cautionnement définitif
Tranche ferme
|
Tranche Cond.1
|
Tranche Cond.2
|
Total
|
|
Numéro de la caution
|
004168-CBC
|
00542-CBC
|
005427-CBC
|
|
Montant de la caution
|
274.509.119
|
118.452.074
|
103.271.784
|
549.018.238
|
Montant total des mains levées
|
0
|
0
|
0
|
0
|
Reste de la caution
|
274.509.119
|
118.452.074
|
103.271.784
|
496.232.977
|
Tableau 4 :Retenue de garantie
Tranche ferme
|
Tranche ferme
|
Total
|
|
Numéro caution
|
006846-CBC
|
006109-CBC
|
|
Montant caution
|
274.509.119
|
274.509.119
|
549.018.238
|
Montant total des mains levées
|
0
|
0
|
|
Reste caution
|
274.509.119
|
274.509.119
|
549.018.238
|
L’État du Cameroun devrait donc faire toute la lumière sur les cautions bancaires en précisant les montants appelés et payés, les montants appelés mais impayés et, éventuellement les montants qui resteraient à appeler.
B2- Gestion des Régies d’Avances au MINTP en 2003 et 2004
Dans l’ordonnance de renvoi devant le TCS, le Magistrat Instructeur affirme que l’utilisation des fonds mis à disposition par le MINFI au titre des Régies d’Avances pour les exercices 2003 et 2004, soit « 422 millions FCFA » n’a pas été prouvée, « les livres journaux de leur gestion n’ayant pas été présentés à la mission de vérification du Contrôle Supérieur de l’État ni lors de l’enquête préliminaire ».
Je voudrais faire observer avant toute chose que le volume financier global des opérations supportées par les Régies d’Avances ouvertes au MINTP au cours des exercices budgétaires 2003 et 2004 n’est pas de 422 millions mais plutôt de 677.000.000 FCFA, somme répartie ainsi qu’il suit par exercice : 422.500.000 FCFA en 2003 et 254.500.000 FCFA en 2004.
Sur le fond, aux termes des dispositions de l’article 1er du Décret n° 86/055 du 14 janvier 1986, les Régies de Recettes et d’Avances relèvent du Ministre Chargé des Finances (Direction du Budget) qui les créé par Arrêté et en désigne les responsables par Décision. Les dispositions relatives à l’ouverture et à la gestion des Régies de Recettes et d’Avances sont visées au début de chaque exercice budgétaire, dans les circulaires relatives à l’exécution et au contrôle de l’exécution du Budget de l’État.
Nous exposons ci-après les dispositions les plus significatives en matières de justification des dépenses contenues dans la Circulaire N° 04/001/MINFIB du 08 janvier 2004 portant Instructions relatives à l’Exécution et au Contrôle de l’Exécution du Budget de l’État et des Organismes Subventionnés pour l’Exercice 2004 :
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« Les opérations en caisses d’avances sont justifiées par des pièces de dépenses, à l’exception de celles relatives aux hôtels particuliers des Membres du Gouvernement et assimilés, des caisses d’avances dites spéciales qui sont justifiées exceptionnellement par un certificat de dépenses ».
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« Au moment de l’arrêté des écritures, la comptabilité de clôture détenue par le régisseur doit être récupérée par le vérificateur et déposée dans le contrôle financier compétent pour les services extérieurs, et à la Direction du Budget pour les services centraux. La comptabilité de la clôture de la caisse d’avances est transmise au poste comptable de rattachement par la Direction du Budget, le Contrôleur Financier Spécialisé, le Contrôleur Provincial ou Départemental des Finances ».
C’est dire que la question des pièces justificatives des dépenses dans la gestion d’une régie d’Avances tient un rôle essentiel et, en cas de faute, la responsabilité du Régisseur est mise en cause, la sanction étant généralement la mise en débet. Le respect des dispositions règlementaires susvisées encadrant la gestion des Régies d’Avances fait partie des attributions de la Direction du Budget dont les personnels appelés « Contrôleurs Budgétaires » sont désignés par Décision du MINFI à l’occasion de la clôture au 31 décembre de chaque exercice budgétaire pour les Régies d’Avances ouvertes en début de l’exercice concerné. Les Contrôleurs budgétaires sont tenus de rédiger, à l’issue des opérations de vérification des Régies d’Avances, un Procès-Verbal de Vérification dans lequel sont relevées et consignées, aux fins de sanction à l’encontre du Régisseur fautif, les irrégularités de gestion.
Aux termes des dispositions de l’article 1er du Décret n° 86/055 du 14 janvier 1986, les Régies de Recettes et d’Avances relèvent du Ministre Chargé des Finances (Direction du Budget) qui les créé par Arrêté et en désigne les responsables par Décision. Les dispositions relatives à l’ouverture et à la gestion des Régies de Recettes et d’Avances sont visées Ordonnance n° 62/0F/4 du 7 février 1962 portant régime financier de la République Fédérale du Cameroun modifiée par la loi N° 2002/001 du 19 avril 2002 (Articles 126 à 131). Et, au début de chaque exercice budgétaire les modalités d’application des dispositions de l’Ordonnance susvisée sont précisées dans les Circulaires relatives à l’Exécution et au Contrôle de l’Exécution du Budget de l’État.
Concernant plus précisément l’accusation de détournement de deniers publics d’un montant de 422.500.000 FCFA, elle est abusive car les Régies d’Avances ont fait l’objet d’un contrôle de la Direction du Budget du Ministère des Finances. Ce contrôle a donné lieu à l’examen des pièces de dépenses et, ensuite, à l’issue du contrôle des Procès-Verbaux ont été signés entre le régisseur des Régies d’Avances et les Contrôleurs budgétaires. On ne saurait donc parler de détournement de deniers publics à partir du moment où cet « apurement administratif » a été fait selon la législation.
Plus concrètement, aux termes des dispositions de l’article 1er du Décret n° 86/055 du 14 janvier 1986, les Régies de Recettes et d’Avances relèvent du Ministre Chargé des Finances (Direction du Budget) qui les créé par Arrêté et en désigne les responsables par Décision. Les dispositions relatives à l’ouverture et à la gestion des Régies de Recettes et d’Avances sont visées Ordonnance n° 62/0F/4 du 7 février 1962 portant régime financier de la République Fédérale du Cameroun modifiée par la loi N° 2002/001 du 19 avril 2002 (Articles 126 à 131). Et, au début de chaque exercice budgétaire les modalités d’application des dispositions de l’Ordonnance susvisée sont précisées dans les Circulaires relatives à l’Exécution et au Contrôle de l’Exécution du Budget de l’État
En application de la législation, les Caisses et Régies d’Avances ouvertes en début d’exercice doivent être clôturées au 31 décembre dudit exercice. Pour cette clôture, le Ministre des Finances signe une Décision nommant des personnels de son Département Ministériel appelés Contrôleurs Budgétaires chargés d’aller procéder à des contrôles sur place et sur pièces. Et c’est tout le sens des dispositions de l’article 282 de l’Ordonnance n° 62/0F/4 du 7 février 1962 aux termes desquelles « Les écritures et les livres des comptables agents intermédiaires, agents spéciaux, régisseurs de caisse d’avances… sont arrêtés et vérifiés chaque année le 30 Juin par des fonctionnaires ou agents désignés par le Ministre des Finances, et le sont également à l’époque de la cessation de fonctions des intéressés ». Et en ce qui concerne les Régies d’Avances du MINTP des exercices 2003 et 2004, elles ont été toutes soumises à ces contrôles, sur initiative et à la diligence du MINFI (Voir document des procès-verbaux de clôture des Régies d’Avances des exercices 2003 et 2004).
Ce contrôle est essentiel et incontournable en ce sens qu’il revêt la forme d’un « apurement administratif » ressortissant à la compétence exclusive du Ministre chargé des Finances et du Budget. Cet apurement des comptes du Régisseur d’Avance est un acte non-juridictionnel portant sur
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d’une la conformité de la nature et du volume des dépenses supportées par la Régie d’Avances au regard des prescriptions de l’Arrêté d’ouverture signé par le MINFI
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l´exactitude matérielle des opérations de recettes et de dépenses portées dans les Livres Journaux tenus par le régisseur d’Avance ainsi que leur conformité avec les lois et règlements en vigueur.
À l’issue de ce contrôle :
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si l’arrêté de compte constate la régularité des opérations, aucune responsabilité pécuniaire n’est engagée et Régisseur est implicitement considéré quitte de sa gestion.
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si l’arrêté de compte constate un défaut comptable, la responsabilité personnelle et pécuniaire respective du Régisseur d’Avance est fixée par un arrêté de débet du Ministre chargé des Finances et du Budget.
Les contrôles des Régies d’Avance ouvertes au MINTP au cours des exercices 2003 et 2004 n’ont révélé aucune irrégularité et, en tout état de cause, le Régisseur et le gestionnaire ont eu « quitus » pour leur gestion. Et les documents comptables et financiers emportés par les Contrôleurs Budgétaires en application des dispositions légale sont remis au poste comptable de rattachement pour être intégrés dans sa comptabilité, laquelle est ensuite adressée à la Chambre des Comptes de la Cour suprême qui seule dispose de ce que l’on appelle le « droit d’évocation ». Le renvoi devant le TCS pour détournement des deniers publics d’un montant de FCFA 422.500.000 pour non-présentation des documents comptables et financiers des Régies d’Avances des exercices 2003 et 2004 à la fois injustifié et mal fondé
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LES MANŒUVRES DU PROCUREUR GÉNÉRAL
Le Procureur Général, par des manœuvres diverses, s’emploie depuis le début de l’affaire à entrainer la Cour vers un procès qui se traduira inévitablement et s’il est suivi par une grave erreur judiciaire. Deux exemples vont illustrer notre propos.
C1- La question des « Témoins »
Pour des chefs d’accusation aussi importants et délicats, le Ministère Public qui est le représentant de l’accusation a communiqué la liste de ses témoins. À la lecture de cette liste et objet de sa correspondance N° 629/CF/12/098/AP/PG/TCS du 20 août 2014 (Annexe 3), on ne peut qu’être surpris en constatant qu’il s’agit de :
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Représentant du Ministère des Travaux Publics- En principe, le MINTP fait corps avec le Ministère Public;
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Mr NOLLA BATTA. Pour mémoire, c’est lui qui a été le Chef de la mission d’audit de l’exécution du budget du MINTP pour les exercices 2003 et 2004. L’intéressé est retraité depuis plus de 04 ans et rien ne justifie qu’on aille le tirer de sa retraite pour qu’il vienne parler d’un dossier pour lequel il n’aurait pas produit le rapport final avant de quitter l’Administration. Vivant dans la précarité, il s’agit pour l’intéressé d’une aubaine et il ne viendra lire que le rapport que ceux qui sont derrière ce dossier auront préparé à son attention ;
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Les deux autres, à savoir MM KIMAKA Dieudonné et MOUSSI MANFRED Émile sont des Personnels Techniques du CONSUPE. Ils ont en commun de n’avoir pas été membre de la mission d’audit.
Comme on peut le constater, ce sont des « témoins » triés sur le volet et qui ne diront que ce qu’on aura bien voulu leur faire dire, au détriment de la manifestation de la vérité. C’est d’une extrême gravité quand on sait que, en application des dispositions de l’article 349 du Code de Procédure Pénale, « Lorsque le prévenu cité à personne ne comparait pas et ne présente pas d’excuse reconnue valable par le Tribunal, la parole n’est donnée à son conseil que pour justifier son absence et le jugement à intervenir est contradictoire ». En fait, pour atteindre la « cible », le Procureur Général près le TCS a voulu avoir sous sa main des personnes sur lesquelles il a une influence quasi certaine et pouvant se plier à une « corruption morale ». Comment ne pas affirmer dès lors que l’opération épervier est essentiellement une « affaire politique ». Et même, il est avéré que tous les Témoins du Ministère Public n’ont pas comparu devant la Cour.
Au-delà, on est ahuri de constater que l’on aille prendre comme « témoins » des personnes qui soit n’ont pas une expertise avérée et sont à l’origine des rapports controversées qui me valent des poursuites. On est loin du respect du principe de l’égalité des armes et de la recherche d’un procès équitable. Et comment imaginer que le TCS puisse rendre un verdict équitable lorsque les témoins de l’accusation, exclusivement à charge, ne peuvent pas lui apporter l’éclairage utile pour la bonne administration de la Justice
C2- Le refus de prendre en compte la sentence arbitrale rendue dans le cadre de l’affaire Etat du Cameroun c/ l’entreprise UDECTO
Mon Conseil, Maître EBA’A MANGA, bien que empêché d’assurer ma défense en vertu de dispositions légales et soucieux d’apporter une contribution à la contradiction et à la manifestation de la vérité :
(i)-D’une part, a adressé au Procureur Général une correspondance datée du 10 septembre 2014 (Annexe 4) pour attirer son attention que, en exécution des hautes directives du Président de la République au Ministre Délégué à la Présidence chargé du Contrôle Supérieur de l’État par lettre N° B135/SG/PR du 26 juillet 2012, une Décision me traduisant devant le conseil de Discipline budgétaire et financière avait été signée (Annexe 5). Cette lettre de mon Conseil n’a pas retenu outre mesure l’attention du Procureur Général et, contre toute attente, je suis poursuivi pour les mêmes faits à la fois devant le Tribunal Criminel Spécial et devant le Conseil de discipline Budgétaire et Financière.
(ii)-D’autre part, a fait notifier au Procureur Général, par Exploit d’Huissier le 29 septembre2014 (Annexe 6 ), la sentence arbitrale rendue par la CCI de Paris dans l’affaire opposant l’État du Cameroun à l’entreprise UDECTO relativement à l’opération de réhabilitation du pont sur le Wouri. Les réquisitions du Ministère Public demandant ma condamnation pour un prétendu détournement de deniers publics de 5,8 milliards FCFA donne à voir que cette décision de justice ayant acquis autorité de la chose jugée a été ignorée. C’est un grave déni de justice et une remise en cause de l’État de droit, toutes choses montrant le degré d’insécurité juridique et judiciaire existant au Cameroun.
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DES POURSUITES DISCRIMINATOIRES DU TRIBUNAL CRIMINEL SPÉCIAL
Il est manifeste, au travers des poursuites sélectives et discriminatoires du Tribunal Criminel Spécial, que la seule cible à atteindre est AMBASSA ZANG DIEUDONNÉ.
D1-Accusations portant sur le paiement des indemnités dites « indues » et/ou « irrégulières »
Aux termes de la réglementation camerounaise des Finances Publiques, et notamment le Décret N°77/41 du 03 février 1977 fixant les attributions et l’organisation des Contrôles Financiers (Annexe7), le « visa » de régularité doit être apposé sur les projets de Décisions et d’actes ayant une incidence financière. Il me plaît ici de rappeler les dispositions des articles 3 et 9 dudit Décret :
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Article 3
« Les Contrôles Financiers sont chargés d’assurer le Contrôle des actes administratifs générateurs des recettes et des dépenses soit par les chefs des départements Ministériels, les chefs des missions diplomatiques et consulaires, les responsables des organismes et d’établissements publics, soit par leurs subordonnés ».
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Article 9
« Tout projet d’arrêté, d’instruction ou de décision de nature à entraîner une incidence financière directe sur le budget concerné doit être communiqué au Contrôleur Financier pour avis. Ses avis doivent être versés au dossier et y restés en permanence ».
Les projets de Décisions autorisant le paiement des indemnités et primes jugées irrégulières et/ou indues par le Magistrat Instructeur sans trop savoir sur quelles bases, préalablement à ma signature, ont été soumis au contrôle de régularité du Contrôle Financier auprès du Ministère des Travaux Publics. Il s’agit d’une formalité substantielle car aucun acte d’un Gestionnaire ayant une incidence financière ne peut suivre le cycle de la dépense au niveau des différents services compétents du Ministère des Finances que s’il est dûment revêtu du « visa » du Contrôle Financier attestant de la régularité de la dépense.
Ce visa ayant attestant de la régularité ayant été accordé, s’il y a problème, il est contraire au droit et au principe de l’égalité de tous devant la loi que seul l’Ordonnateur soit exposé aux poursuites, à l’exclusion des Responsables du Contrôle Financier.
D2-Accusation de passation d’un marché avec une entreprise en déconfiture et en période suspecte de faillite ne présentant pas de garanties financière, économique et technique
La gestion du Marché-Programme des travaux pour la réhabilitation du pont sur le Wouri, aux différentes phases (passation, exécution, paiement, contrôle de l’exécution) a impliqué plusieurs intervenants et le Maître d’ouvrage n’aura été que l’un des maillons. Je voudrais rappeler à cet égard que la chaîne des intervenants comprend, outre le Maître d’ouvrage:
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la Commission de Passation des Marchés des Travaux Neufs ;
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le Maître d’œuvre, en l’occurrence le Groupement constitué des Bureaux d’Études SCETAUROUTE International /SCET Cameroun et ECTA-BTP. Il était lié à l’État du Cameroun par un contrat (marché n°1753/AO/SPM/CNM/2000-2001) ;
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l’Agence française de Développement, bailleur de fonds ;
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le Comité ad hoc mis en place pour conduire les négociations avec UDECTO ;
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le Conducteur d’Opérations ou Ingénieur du Marché ;
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la Commission Spécialisée de Contrôle des Marchés des Routes et Autres Infrastructures ;
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le SETRA, Bureau d’Études du Ministère français de l’Équipement.
En tout état de cause, il importe d’identifier les rôles et attributions de chacun des intervenants de manière à savoir à qui incombent les responsabilités des irrégularités présumées, en termes d’imputabilité. À titre d’exemple, comment demander au Ministre des Travaux Publics, bien que Maître d’ouvrage, d’avoir à justifier les paiements des décomptes sur les fonds AFD alors que lesdits fonds n’ont pas été mis à sa disposition et qu’il n’en n’était en conséquence pas l’ordonnateur ? De même, pourquoi accabler le Maître d’ouvrage en l’accusant de ne s’être pas « entouré des toutes les garanties possibles à travers la recherche d’informations fiables sur la solvabilité et sur l’expérience de la société UDECTO » alors que cette responsabilité incombait à la Commission de Passation des Marchés des Travaux Neufs ainsi que la Sous-commission d’Analyse mise en place par ladite Commission, dans le cadre de la procédure dite de « pré-qualification » et en application des dispositions de la Réglementation des Marchés ?
La personne poursuivie et qui du coup apparait comme le seul acteur dont on estime devoir engager la responsabilité est AMBASSA ZANG DIEUDONNÉ, tout juste parce qu’il était le Ministre des Travaux Publics et donc Maître d’ouvrage. Au-delà de tout, je voudrais souligner la très grande responsabilité qui incombait au Groupement des Bureaux d’Études ayant été chargés de la maîtrise d’œuvre. Ces acteurs de premier plan n’ont même pas été appelés comme témoin, pour éclairer la Cour. Et de fait, il se trouve que, le 28 juillet 2000, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, a signé le marché n°1753/AO/SPM/CNM/2000-2001 avec le Groupement constitué des Bureaux d’Études SCETAUROUTE International /SCET Cameroun et ECTA-BTP à la suite d’un appel d’offres international, marché portant maîtrise d’œuvre pour la réhabilitation du pont du Wouri. D’un montant initial de TTC de FCFA 544.413.328, ledit marché a été divisé en trois tranches ainsi qu’il suit :
Nature de la tranche
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Consistance des travaux
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Montant (TTC, FCFA)
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Tranche ferme
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Auscultation, justification économique et étude environnementale, avant-projet en vue de la réhabilitation du pont sur le Wouri à Douala, production des dossiers de pré-qualification des entreprises et de consultation des entreprises (mission n°1)
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275.626.674
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Tranche conditionnelle n°1
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Assistance au Maître d’ouvrage pour l’analyse des demandes de pré-qualifications, des offres des travaux et de la mise au point du marché des travaux (mission n°2)
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16.879.140
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Tranche conditionnelle n°2
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Contrôle des travaux (missions n°3, 4 et 5)
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251.907.514
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Cela témoigne bien du fait que les accusations mises à ma charge et reprise par le Magistrat Instructeur sont une véritable aberration et défie toute logique. Et cette question est cruciale au regard des dispositions du 87(nouveau) Décret n° 95/101 du 9 juin 1995 portant réglementation des marchés publics modifié et complété par le décret N° 155/ du 30 juin 2000 aux termes duquel
« (1) la responsabilité du Maître d’œuvre ou de tout autre surveillant des procédures de passation ou de l’exécution d’un marché est engagée en cas de complicité.
(2) La complicité au sens du présent décret s’entend de :
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l’omission ou la négligence d’effectuer les contrôles ou de donner les avis techniques prescrits ;
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l’abstention volontaire de porter à la connaissance du maître d’ouvrage les irrégularités sur les violations constatées à l’occasion de leurs interventions ».
Plutôt que d’engager des poursuites contre les Membres de la Commission de Passation des Marchés, de ceux de la Sous-Commission d’Analyse des Offres (Techniques et Financières) et les Bureaux d’Études qui ont assumé les responsabilités de maîtrise d’œuvre pour un coût final TTC de l’ordre de 2,5 milliards FCFA, les Autorités Gouvernementales ont fait le choix de poursuivre celui dont le seul tort est de s’en être remis aux avis qui lui ont été donnés par des organes et personnes mis en place à cet effet par la Réglementation des Marchés Publics. C’est un double déni : déni de l’État de droit et déni de justice.
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CONCLUSION
Monsieur le Président du Tribunal Criminel Spécial,
Arrivé aux termes de ma note par laquelle j’expose les raisons pour lesquelles je récuse la procédure pendante devant votre juridiction afin de me prémunir contre un procès inique et une grave erreur judiciaire, toutes choses qui sont contraires à l’État de droit et démocratique dont se réclame le Cameroun, il m’est apparu opportun et utile d’appeler votre intelligence et celle des autres Juges de la Collégialité sur les dispositions constitutionnelles des alinéas 1 et 2 de l’article 37 ( Loi n° 96-06 du 18 Janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 JUIN 1972, ses modificatifs subséquents) :
(1)- « La justice est rendue sur le territoire de la République au nom de du peuple camerounais ».
(2)- « Le pouvoir judiciaire est exercé par la Cour Suprême, les Cours d’Appel, les Tribunaux. Il est indépendant du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif. Les magistrats du siège ne relèvent dans leurs fonctions juridictionnelles que de la loi et de leur conscience ».
L’histoire vous jugera !
Fait le 09 juin 2015
DIEUDONNÉ AMBASSA ZANG