Alors que le procès de Paul Chouta vient d’être ajourné, Reporters sans frontières (RSF) dénonce une disproportion totale entre le sort réservé au journaliste actuellement privé de liberté et les poursuites pour diffamation et diffusion de fausses nouvelles dont il fait l’objet.
Le journaliste Paul Chouta devait comparaître le 9 juillet devant le tribunal de première instance de Yaoundé. Il est finalement resté dans sa cellule de la prison centrale de Kondengui située dans la capitale camerounaise. Son procès a été reporté au 13 août. En cause, l’absence de la plaignante, l’écrivaine franco-camerounaise Calixthe Beyala qui avait porté plainte contre le célèbre journaliste, dont la page Facebook “Le TGV de l’info” compte plus de 80 000 abonnés, après que ce dernier a posté une vidéo la montrant en pleine altercation avec un homme. Le reporter qui s’est rendu célèbre pour ses interviews et reportages diffusés en direct est détenu depuis le 28 mai dernier. Il est poursuivi pour diffamation et diffusion de fausses nouvelles.
“Difficile de ne pas voir dans son maintien en prison un signe de représailles des autorités à l’égard d’un journaliste très suivi mais aussi très critique du pouvoir, estime Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de RSF. Sans juger du fond de l’affaire, sa détention préventive est une sanction complètement disproportionnée par rapport aux poursuites de diffamation et de diffusion de fausses nouvelles dont il fait l’objet. Nous demandons que le journaliste puisse recouvrer la liberté sans délai avant que ne se tienne son procès”.
Si les autorités se sont empressés de mettre Paul Chouta aux arrêts suite à une plainte pour diffamation, elles n’ont pour l’heure toujours pas identifié qui sont les individus à l’origine de l’agression au couteau dont a été victime le journaliste au mois de janvier. RSF avait dénoncé cette attaque alors que le journaliste faisait déjà l’objet de menaces récurrentes pour ses reportages critiques du pouvoir de Paul Biya. Lors de la réélection du président pour un septième mandat en octobre 2018, il avait même dû fuir son domicile pour se mettre en sécurité.
Les journalistes camerounais font régulièrement l’objet d’arrestations arbitraires. Poursuivi pour des crimes économiques que l’accusation a été incapable de mettre au jour, l’ancien directeur de la CRTV Amadou Vamoulké est en détention depuis près de trois ans sans avoir été jugé. Une vingtaine d’audiences, dont la plupart n’ont duré que quelques minutes, ont déjà eu lieu depuis le début de son procès il y a deux ans. RSF a récemment écrit au président Paul Biya pour lui demander de mettre fin à sa détention, soulignant que cette figure du journalisme camerounais ne méritait pas “une retraite derrière les barreaux”.
Le Cameroun occupe la 131e place sur 180 dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.