Reporter sans frontières (RSF) a exigé jeudi la libération de quatre journalistes burundais et de leur chauffeur, arrêtés deux jours plus tôt par la police au Burundi, alors qu’ils couvraient l’incursion meurtrière de rebelles burundais venus de la République démocratique du Congo (RDC) voisine.
Les journalistes travaillaient pour Iwacu, l’un des derniers médias indépendants du Burundi. Ils ont été arrêtés dans la province de Bubanza (ouest).
Au moins 14 rebelles du groupe burundais RED-Tabara, basé dans l’est de la RDC, ont été tués lors de cette attaque, la première depuis 2017, selon la police burundaise.
Le gouvernement burundais et de nombreux diplomates estiment que ce groupe rebelle est dirigé par l’un des plus farouches opposants au régime burundais, Alexis Sinduhije, ce que l’intéressé a toujours nié.
Selon RSF, les quatre journalistes et leurs chauffeur “ont été arrêtés alors qu’ils étaient en train de recueillir des témoignages d’habitants qui fuyaient les combats”. Ils sont depuis détenus au commissariat provincial de Bubanza.
“Ces journalistes n’ont fait rien d’autre que leur travail en allant vérifier sur place les informations qui faisaient état d’affrontements armés”, a jugé Arnaud Froger, responsable Afrique à RSF, qui a appelé les autorités “à les libérer sans délai”.
Jeudi, le porte-parole adjoint de la police, Moïse Nkurunziza, n’a pas voulu révéler le motif de leur arrestation, en invoquant “le secret de l’instruction”.
La police les soupçonne d’avoir été prévenus à l’avance de l’attaque, selon une source des services de sécurité.
Human Rights Watch a également exigé la “libération immédiate” des journalistes, dans un communiqué publié mercredi.
Pour un journaliste burundais, qui s’exprimait sous couvert de l’anonymat, “l’objectif était d’empêcher la présence des médias dans cette zone et c’est réussi, aucune information en dehors de celle distillée par les officiels au compte-gouttes n’a filtré”.
Selon plusieurs témoignages recueillis dans la province de Bubanza, la situation reste tendue, avec une multiplication de patrouilles des forces de l’ordre et des arrestations d’opposants présumés.
Un responsable administratif local a fait état de la mort d’un policier dans la région, tué “par un groupe résiduel des rebelles”.
Le Burundi a chuté en 2017 à la 160e place du classement de la liberté de la presse dans le monde établi par RSF, alors qu’il était considéré il y a à peine plus de deux ans comme un des rares Etats de la région des Grands lacs à être doté d’une presse libre et indépendante.
C’était avant le début de la crise politique déclenchée par l’annonce, en avril 2015, de la candidature du président Pierre Nkurunziza pour un troisième mandat, qu’il a obtenu en juillet de la même année.
Cette crise a déjà fait de 500 à 2.000 morts imputées essentiellement aux forces de l’ordre selon les sources (ONU et ONG).