Abel Eyinga, Woungly Massaga, Enoh Meyomesse et Pierre Désiré Engo ont été mis hors d’état de nuire. Les populations de leurs localités respectives pointent un doigt accusateur sur leurs frères et non sur Paul Biya.
Tous, originaires de la Mvila et de l’Océan, certaines figures politiques du Sud considérées à tort ou à raison comme une menace pour le régime en place ont été pourchassées par les fils du pouvoir jusqu’à ce qu’ils soient mis sous l’éteignoir d’une façon ou d’une autre. Mais la grande question qu’on se pose est de savoir si le nom du chef de l’État avait été utilisé pour que certains criminels politiques accomplissent leur sale besogne, celle de les éliminer dans le but de s’épanouir à leur tour au sein du régime en place. Depuis l’amorce du processus démocratique au Cameroun vers les années 1990, le chef de l’État a tendu la main aux intellectuels camerounais partis vivre en exile pour des raisons politiques. C’est dans ce sillage qu’Abel Eyinga et Woungly Massaga alias commandant Kissamba sont rentrés au Cameroun tout comme d’autres exilés politiques du Nord et de l’Ouest.
Mais l’acharnement sans précédent du pouvoir contre certains leaders d’opinion du Sud suscite les commentaires et les inquiétudes sur les visages des auteurs de cette chasse à l’homme au nom du chef de l’État. Pourquoi au Nord, à l’Ouest et partout au Cameroun les leaders d’opinions n’ont pas été neutralisés physiquement comme ceux du Sud, fief du chef de l’État Paul Biya ? A ce niveau, on comprend les opportunistes politiques qui sont passés par la destruction de leurs frères pour se faire une place dans le sérail. Une volonté de nuire ceux qui pouvaient leur faire ombrage grâce à leurs niveaux de culture politique et leur popularité dues à leur générosité. Ainsi, le regret porte qu’au Cameroun, les élites du Sud brillent par l’accomplissement des missions néfastes au sein d’un régime qui les élève non pour leur génie mais leur cruauté vis-à-vis de leurs frères d’un autre genre. Il serait injuste de demander à Paul Biya les sorts malheureux d’Abel Eyinga, Woungly Massaga, Enoh Meyomesse et Pierre Désiré Engo engloutis dans les méandres de la politique du pays organisateur.
Portraits des victimes politiques du Sud et leurs bourreaux
Pour n’avoir pas adhéré aux idéaux politiques de l’homme du renouveau et leurs frères du Sud, certains ont été encerclés par la répression du pouvoir, d’autres asphyxiés mystiquement tandis qu’un autre a connu des défaites politiques successives, question de le réduire à un simple valet politique, ami des média animateurs de la galerie gouvernementale pendant que son âge l’entraîne indubitablement vers le précipice.
Qui sont-ils?
Abel Eyinga: Né en 1930 à Ondondo par Ebolowa, cet intellectuel a séjourné en France pour échapper aux crimes politiques perpétrés par l’ancien régime Ahidjo. Il rentre au Cameroun en 1991 profitant de l’avènement du processus démocratique des pays africains. Au lieu d’adhérer au sein du Rdpc parti au pouvoir, Abel Eyinga résolu de créer son propre regroupement politique, Le National. Ce fut le début d’une descente aux enfers qui allait profiter à d’autres acteurs politiques de la Mvila. Alité par une maladie qui l’a paralysé après un repas à lui offert par un patriarche de la Mvila, Abel Eyinga meurt dans un état physique horrible. Son âme repose à Ondondo village de ses ancêtres.
Woungly Massaga: Cet originaire de l’Océan dans la localité de Lolodorf est connu pour son adhésion
remarquable au maquis des années 1960-1980. Après avoir échappé de justesse à la répression orchestrée par Ahmadou Ahidjo contre tous les nationalistes de l’Upc, le commandant Woungly Massaga va emprunter la route de Djoum pour arriver au Congo Brazzaville ensuite par l’Angola. Un exile mystérieux. Il rentre au Cameroun après le multipartisme et fonde le PS (Parti Socialiste). Devenu tout-puissant maire de Lolodorf, Woungly Massaga sera dégommé politiquement en 1993 par Emmanuel Nguiamba Nloutsiri alors DG de Intelcam puis Camtel.
Enoh Meyomesse: Né en 1952 à Nyazo’o, village situé à quelques encablures d’Efoulan, un
arrondissement de la Mvila, Enoh Meyomesse a brillé par les études universitaires en France avec l’obtention tour à tour des diplômes supérieurs en sciences politiques, droit, histoire et journalisme. Devenu écrivain, Enoh Meyomesse a assombri sa carrière par des prises de positions farouches contre le régime en place dont il maîtrise parfaitement les rouages pour avoir côtoyé son père, ancien fonctionnaire du ministère des sports. Il dit avoir rencontré Paul Biya en 1973 deux ans avant sa nomination comme Premier ministre en compagnie de son père. Les deux hommes qui se connaissaient bien se sont embrassés au niveau du carrefour Ekoumdoum puis le père d’Enoh Meyomesse a présenté son fils à Paul Biya en signe de parrainage. Condamné à 07 ans d’emprisonnement pour braquage à main armée et complicité dans un chantier minier à Betare Oya, Enoh Meyomesse a été libéré en appel mais continue son combat pour l’alternance au sommet de l’État.
© L’Epervier : Jean Lambert Eyeng