A son arrivée au Cameroun le 8 août, son père, Marafa Hamidou Yaya, détenu au Secrétariat d’Etat à la Défense (Sed), a fait une demande de « permis de communiquer » qui a été déposée au Tribunal criminel spécial (Tcs) par les soins de son avocat. Ce document délivré par le parquet général de cette juridiction devrait permettre à sa fille de le rencontrer dans sa cellule.
Deux jours après, le 10 août, n’ayant pas eu le retour du Tcs, elle se rend au « pénitencier » où les geôliers de son père avaient été prévenus par lui-même de sa visite. Ceux-ci n’accordent à Aïssatou que moins d’une heure avec son papa.
Le père et la fille ne se sont plus revus depuis juillet 2011. Le lendemain, 11 août, Aissatou se rend à nouveau au Sed. Cette fois-ci, elle ne parviendra pas à rencontrer son papa, et ce, jusqu’à la fin de son séjour au Cameroun, motif pris de ce qu’elle n’a pas de « permis de communiquer ».
Face à cette situation, le 20 août, Marafa Hamidou Yaya interpelle le secrétaire d’Etat à la Défense, Jean-Baptiste Bokam dans une correspondance dont ampliation a été faite au ministre de la Justice, Laurent Esso.
« Cette véritable torture morale qui consiste à n’avoir aucun contact avec ma famille directe s’ajoute à d’autres mesures arbitraires donnant à mes conditions d’emprisonnement toutes les caractéristiques d’un acharnement (…) Monsieur le ministre, le Cameroun ne s’honore pas à donner au traitement d’un détenu tous les aspects d’une persécution individuelle», se désole-t-il non sans relever les craintes qu’il eues pour la sécurité de sa fille lorsqu’elle était en séjour au Cameroun. «La veille de mon arrestation, redoutant les dangers que pourrait courir ma famille, j’ai fait exiler mon épouse et nos enfants.
Après l’assassinat, toujours non élucidé, de mon assistante Christiane Soppo en janvier 2014, j’ai toutes raisons de croire que cette mesure d’éloignement a pu sauver ma famille (…) En attendant le dé- part de ma fille, je sollicite sa protection compte tenu des menaces de mort dont certains membres de ma famille font l’objet et dont vous-même et le délégué général à la Sûreté nationale ont été saisis par ailleurs», s’inquiétait-il.
En dehors de sa fille, Marafa Hamidou Yaya fait également face au refus qui est donné à ses frères et sœurs de lui rendre visite en cellule.« L’année dernière, à l’occasion des vacances scolaires, mon jeune frère, que je n’ai pas vu depuis mon arrestation, est venu de Turquie pour me rendre visite. Je ne sais par quel miracle il avait été autorisé à accéder jusqu’à moi. Mais avant que nous ayons pu échanger un mot, il a été expulsé manu militari des lieux où je suis détenu.
Cette année encore, il a effectué le voyage. Après un séjour de plus d’un mois au Cameroun, il s’apprête à repartir sans que nous puissions nous entretenir car, comme mes autres frères et sœurs vivant dans notre pays, ils n’ont pas le droit de me rendre visite, sous prétexte qu’ils ne disposent pas d’un « permis de communiquer », écrit-il dans sa lettre au Sed. « Comme cela a toujours été le cas depuis mon transfert au Sed, il y a trois ans, le parquet refuse de délivrer ce document (« permis de communiquer ») à quelque membre de ma famille que ce soit », dénonce Marafa.