Pour l’Avocate Lydienne Yen Eyoum, la Cour Suprême du Cameroun vient de confirmer 25 ans de prison dans les affaires impliquant cette française. Ce qui devrait sous-entendre comme l’a précisé Me Caroline Wasserman sur les ondes de Radio France Internationale que la seule issue serait une amnistie qui doit être signée par le Chef de l’Etat afin de permettre à l’avocate de se réinsérer dans la société et de recommencer à exercer. Une ligne directrice de la France qui avait déjà été confirmée au soir de la condamnation par la Cour Suprême par Hélène Le Gal, la conseillère Afrique de l’Elysée qui, répondant à une question de journaliste va préciser que : « Nous restons attentifs à la situation de notre compatriote, en lien avec sa famille et ses conseils. Les autorités camerounaises connaissent notre mobilisation et notre inquiétude. La France soutient depuis sa création le groupe de travail des Nations Unies sur les détentions arbitraires, qui est composé d’experts indépendants, afin qu’il puisse rendre des avis sur des situations particulières comme celle de Mme Yen-Eyoum. ». Toujours d’après des sources proches du dossier, la France ne compte plus se faire mener en bateau par le Cameroun concernant les procès de ses ressortissants.
A cet effet, introduite depuis des mois déjà devant les juridictions françaises la plainte pour « torture, actes de barbarie et détention arbitraire » attendrait une autorisation des autorités judiciaires camerounaises pour ouvrir une enquête et des auditions de personnalités. Une procédure qui pourrait avoir pour corollaire d’enclencher des condamnations et des interdictions de survoler le territoire français à plusieurs personnalités. Rupture de banc ou bras de fer déclenché ? La posture presque identique qu’adopte la France aujourd’hui ressemble, d’après les experts, étrangement à celle qu’avait adoptée le pays de Michel Platini lorsque le Chef de l’Etat camerounais s’y était rendu le 30 Janvier 2013. François Hollande d’entrée de jeu avait alors mis sur la table avant toute discussion le cas Michel Thierry Atangana en posant la question à Paul Biya de savoir : « Qu’à-tu fais de Michel Atangana ? ».
Si le Président camerounais ne répondra pas tout de suite, quelques jours plus tard, après une autre visite au Pape qui va également évoquer ce sujet, va se résigner à signer un texte permettant d’amnistier Titus Edzoa et Michel Thierry Atangana. Un contrepied qui prendra de revers les mauvaises élucubrations de certains pourfendeurs du régime Biya. A ce jour et au regard de l’enchainement des évènements, les collaborateurs du Chef de l’Etat Paul Biya continuent à le faire tourner en bourrique. Cachant la triviale vérité qui les enfonceront où qu’ils soient. Des jouisseurs qui, au fil des check-up et visite médicale à l’hexagone ne se voient pas hors des sphères de décisions de la république.
Comme une épée de Damoclès
A l’instar de plusieurs prisonniers de l’Opération Epervier qui bénéficient aujourd’hui des décisions du Groupe de travail des Nations Unies sur les détentions arbitraires, le discrédit porté sur cette Opération Epervier supposée assainir les mœurs publiques pousse à plusieurs interrogations. Dans les coulisses du pouvoir où plusieurs personnalités ont joué d’influences pour faire incarcérer des « innocents », la panique est certaine. Désormais à la Cour Suprême, les raisons d’ajournement ne cessent de fuser pour retarder des délibérés pourtant dans les starting-blocks. L’on s’interroge sur l’avenir et la posture controversée du Nnom Nguii qui n’aura pas hésité dans le cas Atangana à signer un « contrepied ».
D’après Monsieur Malick Sow, Président du Groupe de travail sur la détention arbitraire aux Nations Unies, le cas Atangana sera qualifié d’inhumains, de cruels, de dégradants, etc. Pour Lydienne Eyoum, les experts de cette « instance » ont précisé dans leur rapport qu’il juge cette détention d’arbitraire parce qu’il n y a pas eu de notification des motifs de l’arrestation de l’avocate et que celle-ci sera restée en détention en dehors des délais légaux fixés par la loi camerounaise. Comme un couperet, cette décision n’avait pas fait l’objet d’une réponse du gouvernement camerounais et avait ainsi revêtu le caractère de la chose jugée. A ce propos Malick Sow donnera des précisions lors d’une conférence tenue à Paris : « Le groupe de travail est la seule procédure du conseil des droits de l’homme des Nation Unies, qui a des compétences quasi juridictionnelles, fonctionnant comme un tribunal qui respecte donc le principe du contradictoire, pose des délais à respecter avec des voies de recours. Le groupe de travail prend de véritables décisions qui pour des raisons diplomatiques sont appelés avis. ».
Dans le cas de Michel Thierry Atangana Malick Sow ajoutera que le Cameroun avait choisi de ne pas répondre. Idem pour Lydienne Eyoum. Si pour Michel Thierry Atangana, les avis ou décisions ont revêtues le caractère de la chose jugée, deux points n’ont daigné être appliqués par le Cameroun sur les trois « chefs d’accusations » retenus contre l’Etat du Cameroun à savoir l’ouverture d’une enquête sur les faits et la sanction des personnes responsables de la privation de liberté de Monsieur Thierry Atangana et le versement d’une indemnité pour le préjudices qui sont énormes et multiples, causés par la privation de liberté depuis le 12 Mai 1997. Seule la libération immédiate de Monsieur Thierry Atangana recommandée par le Groupe de travail avait été exécutée.
Des noms évoqués sous cape
Dans cette peur, les membres du gouvernement et personnalités ayant fait partie du fameux rouleau compresseur de 1997 paniquent. Ces derniers n’ayant pu faire « disparaitre » cette affaire n’ont plus d’argument pour convaincre le Chef de l’État de ne rien faire. Tant les préjudices sont énormes. L’affaire Atangana ayant ainsi dévoilé au fil des jours ses complexités. Comment comprendre que plus de 800 millions issus d’un crédit BNP Paribas et ayant atterrit dans les caisses de la BICIC en faveur de Michel Thierry Atangana se soient volatilisés ? (Un argent qui n’avait rien à voir avec le Copisur) ! Comment expliquer après la signature de l’amnistie du Chef de l’État que les commissions rogatoires ayant permis de sceller les comptes de Michel Thierry Atangana ne soient pas jusqu’à présent annulées ? Edouard Akame Mfoumou, Amadou Ali, Tikela Kemone, Edgar Alain Mebe Ngo’o et bien d’autres n’auront jamais le sommeil tranquille jusqu’au dénouement de cette affaire.
En visite en terre camerounaise, le Président François Hollande est ainsi très attendu sur ces deux questions. Affaire à suivre.